Un thriller honnête lorgnant parfois vers une trame hitchcockienne.
De "Frantic" (1988), on retiendra deux points.
Le premier, c'est une réalisation impeccable transcendé par un montage alambiqué, alliant calme et nervosité. La caméra de Polanski nous embringue dans des affaires internationales louches, et ce grâce aux plans serrés et rapprochés, proposé par le réalisateur du "Bal des vampires", qui nous font prendre le point de vue d'Harrison Ford (la même année, il jouait pour Mike Nichols dans le non moins connu "Working girl"), impec' dans la peau d'un médecin en voyage à Paris. Plus le suspense avance, plus on s'enfonce dans l'ambiance scénique du film.
J'en viens à mon second point : l'ambiance. Pourquoi est-elle scénique ? Le suspense va crescendo et se déploie corps et âmes dans des torrents foisonnants de noirceur. Polanski nous envoie valser avec ses propres codes du polar et nous enfonce dans Paris comme Frankenheimer le fera plus tard pour "Ronin". Paris le soir, Paris la nuit, Paris et ses night-clubs. Paris et Grace Jones (un clin d'œil au bondien John Glen pour "A view to a kill" (1985) ?). Les bas-fonds de Paris, pour résumer, allié à la musique d'Ennio Morricone. Le compositeur italien ne se contente pas d'embaumer le tout à sa manière (certes, la musique est grandiose mais n'atteint pas ses chefs d'œuvre d'anthologie (les "Il était une fois...", "Le bon...", "Mission"...)), il se contente d'appuyer la mise en scène de Polanski pour nous composer une partition légèrement décalée pour mieux nous l'imprégner ensuite. Pas un basculement, mais une volonté de plomber sans doute encore l'ambiance par Polanski. Une erreur de sa part ? J'en doute fortement.
Finalement, mes deux points, même s'ils s'imbriquent ensemble, semblent faire deux ou un suivant les moments du film : ambiance à la Polanski et ambiance morriconnienne. De fait, on reste un peu à côté de la plaque, même si la performance d'Harrison Ford est magistrale.
Avec aussi Emmanuelle Seigner, sensuelle à souhait, dans l'un de ses premiers rôles à 22 ans !, et qui deviendra par la suite la muse de Polanski (en atteste le dernier de Roman, "La vénus à la fourrure", quatrième collaboration entre l'actrice et le cinéaste). On peut remarquer la présence de seconds couteaux très bien affûtés : Yves "Moulin" Rénier, Dominique Pinon ("Un long dimanche..."), Gérard Klein l'instit, le cliniquement regretté Artus, et l'inoubliable Alan Ladd, l'Homme des vallées perdues !
Pour terminer, je peux dire que "Frantic" reste plus un policier des 70's à la "Shaft" ou autres "Bullitt" de par ces ingrédients d'ambiance et de jeux d'acteurs (irrémédiablement très bons).
Pour conclure, nous sommes ici en présence d'une œuvre mise en scène par un artisan du cinéma à part entière. Un grand petit film en somme.
Pour les amateurs de Polanski uniquement. 2 étoiles sur 4.
A noter : c'est grâce à "Frantic" qu'Emmanuelle deviendra Madame Polanski à la ville. Et un nouveau scandale Polanski d'éclater !