D'excellentes idées dans ce film qui, malheureusement, manque cruellement de subtilité. Car si l'on retrouve le style caractéristique de Rithy Panh, alternant images d'archives et usage, virtuose, de petites figurines, c'est sur l'aspect "fiction" que ça coince. Tout n'est pas à jeter, loin s'en faut. Quoi que minimalistes, les décors sont très justes, et les dialogues en cambodgien, incompréhensibles pour les journalistes français mais sous-titrés pour le spectateur, donnent lieu à quelques petites scènes extraordinaires. Le problème est ailleurs : Les ficelles sont trop grosses, la direction d'acteurs ne sonne pas toujours juste - Le fameux moment du : j'allume ma cigarette et je tire une bouffée ; classique, qui signifie l'attente dans laquelle sont plongés les journalistes, est ici utilisé à l'excès -, et la rencontre avec Pol Pot, point culminant du film, est un pétard mouillé (L'entrée en matière et la mise en scène sont superbes, mais le déroulement de l'entrevue est un peu expéditif. C'est bien dommage : N'était-il pas envisageable de rendre plus marquant le dirigeant du Kampuchéa Démocratique ?). Dans l'ensemble, on est très loin de la maîtrise d'un film comme l'Ombre de Staline et c'est pourquoi ce nouveau métrage de Rithy Panh laisse un sentiment mitigé. D'un côté, on ne peut que saluer la quête continue du réalisateur pour documenter les crimes atroces du régime des Khmers rouges en alliant l'utilisation d'archives aux figurines et à la fiction, au point de fondre le tout. De l'autre, la direction des acteurs français est beaucoup moins convaincante que celle des acteurs cambodgiens. C'est le véritable point noir de ce film. Fondamentalement imparfait mais touchant, engagé et sensible, "Rendez-vous avec Pol Pot" est pourtant une fenêtre ouverte sur une page sombre de l'histoire du Cambodge et de l'humanité dans son ensemble, et c'est pourquoi on peut, moyennant une grande indulgence pour ses quelques tares, le regarder avec effroi.