Tiré des mémoires d’Adèle Hugo, fille de Victor, ce cru ’75 de François Truffaut raconte une flamme impossible, et l’incendie qu’elle ne manque pourtant pas de propager. L’amour donne des ailes, on le sait, mais il peut aussi bien tirer vers les pires profondeurs. Isabelle Adjani joue divinement bien les éprises éconduites, qui trompent leur échec dans une abnégation aveugle, égocentrique, inconséquente, et tant pis si tout s’effondre autour, tant pis si leur chimère leur coûte de s’autodétruire. Fidèle à lui-même, le cinéaste n’en laisse que peu au hasard. Chaque plan est une composition, chaque mouvement de caméra une intervention chirurgicale, chaque élément du montage est à sa place, fluidifie le récit ou souligne un trait de caractère, une impression, une réaction, une situation, un contexte. Oui le rythme est lent, la musique est rare, discrète, l’histoire est datée. Mais l’élégance de la mise en scène, sa finesse, son habileté, ses acteurs parfaitement dirigés font passer tout le reste. Comme souvent, maints prix honoreront le surfeur de la Nouvelle vague pour sa réalisation. Et comme souvent, c’est entièrement mérité.