Réalisé de main de maître, Athena est objectivement une claque cinématographique, ne serait-ce que par la complète nouveauté de l'angle choisi pour filmer des sujets pourtant surexploités : suite à une bavure policière, une cité française s'embrasse.
Romain Gavras tente une thérapie de nos peurs les plus modernes, mais sans faire de politique. Attention toutefois, le sujet étant lui très politique, le film sera autant critiqué qu'idolâtré, vous n'aurez donc d'autre choix que de vous faire votre propre idée.
Un vrai effort est fait, et réussi, pour éviter les clichés. Pas de policiers véreux, ou très peu, pas de racailles abruties, ou très peu. Une étonnante lucidité et une clairvoyance bienvenue.
L'esthétisation de la violence est certaine, mais pas gratuite, et bien ancrée dans le réel. Pas de coup de théâtre à l'américaine, pas d'effet "clip pourri", ni de fusillades de western. On avance dans le récit à vitesse humaine, caméra embarquée, sans grandiloquence, sans héros révélé ni de morale pédante.
Les acteurs sont tous justes, le scénario également, certains points clés sont habilement sous-racontés, ce qui permet d'éviter de nombreux écueils. L'imagination du spectateur continue donc à fonctionner, elle est même indispensable pour combler certains "trous" du scénario, ce qui ne gêne en rien la narration ou la crédibilité, au contraire !
Le spectateur n'est pas pris pour un idiot, ni pour un bulletin de vote, et Romain Gavras ne nous prend pas par la main.
Un grand nombre d'effets de plans et de déplacements de caméra donnent corps à l'action sans avoir besoin de cascades ou de chorégraphies bidons, c'est très bien vu, très rafraîchissant, de nombreux réalisateurs américains feraient bien de s'en inspirer. Une simplicité alliée à un souci d'esthétisme, seul un cinéaste chevronné peut réussir cette alliance, et c'est le cas.
Encore d'autres très bonnes idées, comme le personnage du dealer, toxique à tous points de vue, du djihadiste, touchant et détestable à la fois, du militaire, à la morale parfaite mais incapable de rassembler, et du jeune rebelle façon PNL, excellent acteur, évoluant entre fougue et manipulation, complotisme et sincérité, à l'image de notre société et bien au-delà des cités.
Ces différents mots-clés ne sont d'ailleurs jamais "cités", c'est au spectateur de les visualiser, Romain Gavras se contente d'enchaîner les peintures, sans jamais nous forcer la main, il élève son cinéma et son spectateur, c'est gratifiant. On n'espérait plus autant d'intelligence et d'art brut dans un film Netflix.
Un accomplissement !