Cette année « Love Life » et « La comédie humaine » de Kôji Fukada font l’ouverture et la clôture du festival Les saisons d’Hanibi ; une promesse de vivre au rythme du Japon avec 7 avant-premières exclusives pendant 7 jours à travers toute la France.
Et quel excellent choix que ce jeune réalisateur né au début des années 80, dont le cinéma n’en finit pas d’explorer les failles de la société à travers la cellule familiale, tout en faisant un pas de côté avec la morale nippone.
Le film s’intéresse à la vie amoureuse d’un jeune couple, Taeko et Jiro. Ils vivent en famille reconstituée avec Keita, son fils à elle, né d’une première union. Leur bonheur à tous les trois est solaire.
Un terrible drame va surgir lors d’une fête familiale et impacter l’équilibre de leur union. Les ex conjoints respectifs réapparaissent, et chacun se retrouve désaxé, en perte de repères, étranger à sa propre vie.
C’est cette rupture d’alchimie que le réalisateur va chercher dans l’incommunicabilité qui s’installe entre les différents êtres, tel le battement d’ailes d’un papillon. Il y a un avant, dans une première scène magnifique où le bonheur est palpable à l’écran, et un après, qui met à nue les terribles répercussions sur les deux jeunes gens.
Kōji Fukada réalise et scénarise au cinéma depuis 20 ans. Un certain nombre de ses films ont pu sortir dans les salles françaises, « Harmonium », « L’infirmière » ou encore récemment « Suis-moi, je te fuis / Fuis-moi, je te suis ».
Love Life est me semble-t-il le plus abouti. Son scénario est si subtil qu’il efface les mots pour faire parler les signes et les silences.
Je n’ai pu m’empêcher de penser aux films de Ryūsuke Hamaguchi dans les procédés utilisés.
Ils incarnent ensemble cette nouvelle génération de réalisateurs naturalistes, qui décryptent par l’image l’agitation des sentiments humains.
La scène finale, aussi forte que la première, donne au film tout son équilibre dans la réalisation et sa cohérence dans l'histoire intime du couple.
Elle nous transporte en un clin d’œil dans un vieux film de Nanni Moretti, récompensé de la palme d’Or à Cannes. Mais si chez le réalisateur italien, les différents protagonistes marchaient dans des directions opposées sur un même lieux, les jeunes gens chez Fukada évoluent imperceptiblement de manière différente, et c’est très beau à voir.