Dans l'histoire du cinéma, de nombreux cinéastes ont étés fascinés par l'idée de réaliser une grande fresque épique, brassant plusieurs époques et plusieurs destinées, comme Il était une fois en Amérique ou La Porte du Paradis. Peut-être moins connu que ces grands classiques, 1900 (ou Novecento en VO) n'en reste pas moins l'illustration parfaite de ce type de cinéma. Avec ce film, Bernardo Bertolucci signe un grand portait de l'Italie de la première moitié du XXème siècle, en nous racontant l'histoire de la lutte prolétarienne, du développement communiste, de la Première Guerre Mondiale, de l'essor du fascisme jusqu'à sa chute... Le tout à travers les regards de Olmo, paysan, et de Alfredo, propriétaire terrien. Tout un programme ! Cependant, je dois admettre être plutôt déçu sur plusieurs points, suite à mon visionnage : tout d'abord, malgré la densité de l'histoire racontée, l'intrigue est pauvre et de nombreuses longueurs se font vite ressentir, notamment au cours d'un premier acte désastreux (sorte de prologue de plus de 2h30) dans lequel il se passe très peu de choses et où les rares situations intéressantes sont filmées de manière anecdotiques, comme si Bertolucci semblait plutôt être intéressé par sa mise en scène, certes sublime, que par son histoire. Cependant, le deuxième acte sauve véritablement le film, car c'est dans celui-ci que les enjeux dramatiques et les personnages sont le plus développés, et que l'on assiste aux moments les plus forts notamment grâce à des situations plus intimistes. L'autre principal reproche que l'on peut faire au film est que l'on est vite agacé par la pensée binaire de Bertolucci, qui distille tout au long du film son message plus que douteux, à savoir que selon lui les patrons sont forcément les ennemis et que les paysans sont forcément les alliés... Si ce sont ses idées, grand bien lui fasse, mais nous spectateurs n'avons pas à supporter ce genre de propos simplistes, qui relèvent plus du manifeste politique que du cinéma... D'autant plus que de nombreuses situations dans le film visent à nuancer cette idéologie (notamment à travers le personnage de Alfredo, qui est foncièrement bon et qui ne se laisse pas embrigader par les fascistes). Mais ces maladresses sont tout de même contrebalancées par de nombreux points positifs, comme la formidable photographie de Vittorio Storaro (magnifiée par la restauration numérique), la magnifique musique d'Ennio Morricone, ou encore la formidable galerie de personnages, tous interprétés par des acteurs géniaux comme Depardieu, De Niro (dont la jeunesse semble immortelle) ou encore Sutherland (très bon dans le rôle du cruel Attila). On reprochera aussi à Bertolucci de faire parfois preuve de beaucoup de complaisance dans la réalisation de scènes très choquantes (le meurtre du chat, puis du garçon, notamment) et pas forcément nécessaires. Mais malgré cela, 1900 reste tout de même une œuvre assez fascinante et intéressante à regarder, même si ses défauts n'en font pas le chef-d’œuvre auquel on aurait pu s'attendre...