Le diable n’existe pas, film Iranien du réalisateur Mohammad Rasoulof, est une véritable pépite. Ne connaissant ni ce réalisateur, ni le cinéma iranien, je suis allé voir ce film sans aucune attente, étant simplement attiré par le synopsis.
Sheytân vodjoud nadârad, de son titre original est une succession de courts-métrages racontant les tranches de vie d’hommes et femmes de différents milieux sociaux, professionnels, géographiques, et dont le trame de fond est la peine de mort et son application en Iran.
Les histoires se succèdent les unes après les autres, avec une intensité dramatique crescendo. Là où le premier court métrage est une mise en bouche à la chute complètement inattendue, les suivants mettent en place des enjeux dramatiques, dans lesquelles les personnages sont en danger physique ou psychologique.
La composition des plans est une véritable réussite, certains vous resteront gravés dans la rétine comme des tableaux de maître. Le réalisateur alterne brillamment des plans en mouvements et des plans fixe, ceux-ci sont particulièrement léchés, pour certains, il y a jusqu’à trois valeurs de plans à regarder.
La peine de mort est abordée ici dans tous ses aspects, le deuil, le rôle du bourreau, et les conséquences de son application sur les autres. Les histoires nous questionnent sur notre rapport à la loi, à l’obéissance face à une autorité considérée comme légitime aux yeux du grand nombre, à l’héroïsme et ses conséquences néfastes, et à la justice.
Quant aux acteurs, tous arrivent à saisir l’ambiguïté de leurs personnages, jouant leur rôle avec une subtilité rarement égalée. De telles histoires exigeant une direction d’acteur irréprochable, elle est ici particulièrement réussie.
Le premier court-métrage
est une longue mise en haleine, dans laquelle le protagoniste joue un homme lambda complètement désincarné dans lequel n’importe qui pourrait s’identifier, jusqu’à la chute incroyable nous révélant la nature de sa profession, que le héros pratique sans aucun état d’âme. Sa scène finale est truculente et terrifiante à la fois.
Dans le deuxième court-métrage, (très réussi, au suspense Hitchcockien),
je m’attendais à une fin tragique dans laquelle les personnages seraient tués, la réalisation de la scène finale me rappelant la fin de Mean Streets de Martin Scorsese. Il n’en est rien, et la douce conclusion de ce court-métrage nous fait le plus grand bien.
La troisième partie est celle m’ayant le plus touché, les performances des acteurs sont fantastiques, l’amour entre les deux protagonistes est évident, et l’on ne peut qu’être déchiré face à la montée croissante des enjeux, et au dilemme face auquel le couple se retrouve confronté.
Le final est dramatique, avec un ultime plan magnifiquement composé, dans lequel la tenue militaire du jeune homme placé sur un arbre comme un pendu évoque la mort de son innocence, de son couple, et sa mort tout court aux yeux de sa compagne, qui décide de se séparer de lui, ne pouvant oublier son acte.
La quatrième et dernière histoire termine d’aborder toutes les facettes de la question de la peine de mort, ici les conséquences pour la famille sont le résultat de la non-application de celle-ci, par conviction. Le dernier plan nous écrase face à l’immensité du monde, nous réconfortant face à l’insignifiance de nos actes, et nous laissons face à une fin ouverte, douce à mes yeux.
Véritable pièce maîtresse qu’il me tarde de revoir, je ne peux que vous recommander le visionnage de Le diable n’existe pas, qui ne vous laissera pas indemne.