Bien placé au panthéon des classiques, le film de De Palma m'a cependant sérieusement déçu. Sans doute en attendais-je trop... Le casting, le budget, l'aura des Oscars laissaient présager une oeuvre plus accomplie.
Le succès populaire de ce film assez terne est sans doute en partie dû à l’extraordinaire aura de Al Capone, prototype absolu du gangster américain, fascinant les foules par son culot, sa fortune, sa main-mise absolue sur la pègre et la police, des excès de violence (le fameux Massacre de la St Valentin suivi de l'élimination à la batte de base ball de 4 de ses participants de la main même de Capone!), sa générosité... et aussi le fait qu'il était la clé de la distribution de l'alcool à tous les amateurs de Chicago et d'ailleurs alors que sévissait (en théorie) la prohibition.
Si le gangster fascine, son adversaire aussi: Elliot Ness est "le gentil" par excellence, le pur, l'intact, le chevalier des temps modernes. Profitons-en pour dire un mot des acteurs... De Niro est un Capone crédible mais on regrette que le grand Robert nous serve une fois de plus son jeu plutôt convenu de mafieux à la fois arrogant et faussement paternel.En acolyte courageux de son non moins courageux supérieur, Sean Connery est tel qu'en lui-même, séducteur même sans le vouloir, beau gosse bien que vieillissant, cognant volontiers, le sourcil broussailleux et malicieusement relevé; quand on le voit goûter et apprécier une lichette de whisky de contrebande, plus aucun doute: l'Irlandais type est devant nous! Second cliché donc... Kevin Costner joue bien mais il n'est pas très crédible dans le rôle de Ness, tant dans sa grande jeunesse il semble être plutôt attentiste, indécis - pas vraiment à la hauteur.
La photographie et la mise en scène sont de facture classique, soignées - trop?- mais sans génie; seule une séquence mérite toute notre attention et un grand bravo: celle du landau dans le hall de gare.
Enfin, pour un genre de biopic, on déplorera que la réalité, longue et complexe, ait été considérablement simplifiée. La très longue traque de Capone devient presque anecdotique, les mille aventures deviennent une sorte de partie de cartes assez simple... l'équipe des Incorruptibles elle-même est bien allégée par rapport au réel... Et tous ces personnages sont plutôt falots, stéréotypes sans épaisseur, sans réel passé, sans réelle vie.Cela manque de crédibilité, de profondeur, d'émotion: de passion. Film trop sage, Les Incorruptibles a manqué sa cible...