C’est presque que par hasard que Judith Davis s’est retrouvée à faire du théâtre, puis du cinéma. En fait, sa vocation première, c’était la philosophie et il a fallu une soirée comme spectatrice au théâtre et son coup de cœur pour la troupe flamande « tg STAN » pour que germe en elle l’envie de monter un collectif dédié au théâtre. Ce souhait s’est matérialisé en 2008 sous la forme de la troupe « L’avantage du doute », fondée avec Simon Bakhouche, Mélanie Bestel, Claire Dumas et Nadir Legrand, des comédiens rencontrés lors d’un stage au sein de « tg STAN » et qu’on retrouve dans son premier long métrage, "Tout ce qu’il me reste de la révolution".
Créé à la Comédie de Béthune durant l’hiver 2008, « Tout ce qu’il nous reste de la révolution, c’est Simon » est le premier spectacle monté par le collectif « L’avantage du doute« . Si le film n’est pas l’adaptation fidèle de ce spectacle pour le cinéma, il s’en inspire très largement tant au niveau des thématiques abordés que de l’esprit dans lequel il baigne.
Ce fameux Simon, on le retrouve d’ailleurs dans le film. C’est le père d’Angèle, une urbaniste idéaliste qui rêve d’avoir des idées pour améliorer le quotidien des gens, pour mettre l’humain au cœur de la ville, et de pouvoir les appliquer concrètement dans la réalité. Dans la famille d’Angèle, une famille située très à gauche au départ, seul son père Simon est vraiment resté fidèle à ses idéaux passés, ceux de mai 68, au point d’avoir fait une croix sur son confort personnel et de vivre chichement dans un HLM. Diane, sa mère, a fini par lâcher le combat politique pour aller s’installer à Pourchères, un petit village de l’Ardèche. Quant à Noutka, sa sœur, elle a choisi le monde de l’entreprise et elle est mariée à Stéphane, un cadre qui joue à la perfection le rôle imposé par son métier, sauf qu’il est au bord du burn-out !
Quant à Adèle, elle se cherche, elle se bat, elle n’abdique jamais, à la fois très proche de son père, reprenant les idées de sa mère pour que Paris ne soit plus une île coupée de la banlieue par le périphérique, révoltée par le comportement de son patron qui la licencie sans ménagement alors qu’il se targue d’être de gauche, n’hésitant pas à se balader en plein Paris en arborant une chapka russe et intégrant un groupe d’expression collective regroupant des gens cherchant à changer le monde. Un groupe fonctionnant sans hiérarchie, qui interdit à ses membres de s’interrompre les uns les autres et qui prône la règle de l’enthousiasme obligatoire : toute idée, quelle qu’elle soit, mérite d’être accueillie avec enthousiasme, … du moins dans un premier temps. Et la vie sentimentale, dans tout ça, quand, parfois, il reste un peu de temps ? Le doux et pondéré Saïd, peut-être !
C’est avec grand plaisir qu’à l’occasion de son premier film, on accueille Judith Davis dans la famille du cinéma français, elle et ses acolytes de « L’avantage du doute » : une équipe qui ne tient surtout pas à rentrer dans une case, qui s’écarte donc du tout formaté et qui prouve que rire et réflexion vont très bien ensemble, surtout si on sait insuffler une irrésistible pêche à sa production.