À chaque nouveau film, Olivier Baroux semble affirmer un peu plus la thématique qu’il se plaît à décliner depuis ses débuts : la propension d’un homme usurpateur à apprendre de son mensonge tout en partageant avec une famille – qu’elle soit réelle ou symbolique – la bulle fictionnelle dans laquelle il vit. Car chacun de ses héros ne parvient ni à renier ses origines ni à se repaître des larcins ou escroqueries commis ; là se tient, en fin de compte, la morale dont Baroux habille ses comédies : ne pas renier qui nous sommes tout en veillant à rétablir avec autrui une harmonie basée sur le partage et la sincérité. Just a Gigolo s’inscrit dans sa filmographie de façon limpide, dans la mesure où les tribulations de ce séducteur décati le conduisent à développer un récit conventionnel, similaire à ceux qu’il a l’habitude d’élaborer. C’est à la fois une qualité et le principal défaut d’un métrage prévisible et aux bascules dramatiques vraiment éculées. À croire qu’une comédie ne peut désormais se passer d’instants où le pathos prend le dessus, où le conventionnel rattrape un projet pourtant audacieux et jouissif… Car le film revendique une tendresse constante et échafaude un univers cohérent dans lequel le comique assure les fondations : voir la teinture d’Alex se répandre dans l’eau d’une piscine privée vaut son pesant d’or ! Pour l’incarner, Kad Merad s’amuse beaucoup et apporte une sensibilité à fleur de peau, une certaine forme d’ingénuité qui fait de lui un grand enfant confronté au monde adulte. Baroux a l’intelligence d’incorporer son personnage dans une cellule familiale en crise qu’il va, grâce à son art de vivre, réparer du mieux qu’il peut. Le parti pris du réalisateur est clair : affirmer le droit à la bêtise et au dilettantisme dans une société trop sérieuse, opposer le slip de bain jaune au costume trois pièces avec cravate. En conjuguant deux solitudes – celle d’un cinquantenaire largué et celle d’une famille monoparentale qui peine à dépasser le deuil –, Just a Gigolo n’est justement pas qu’un gigolo en slip, bien plus un récit d’apprentissage fort divertissant et bienveillant. Regrettable, son échec au box-office ne reflète nullement ses qualités intrinsèques.