Les Monty Python sont des génies comiques qui ont révolutionné l’humour et posé des bases valables, aujourd’hui encore. Après avoir secoué la télé anglaise avec leur "Monty Python Flying Circus", ils se sont essayés au grand écran, qui semblait, pourtant, peu adapté à leur humour fait de sketchs improbables et hétéroclites. Leur coup d’essai fut un coup de maître et, selon moi, leur film le plus abouti et le plus hilarant. Quelle grande idée de détourner la légende du Roi Arthur et des chevaliers de la Table Ronde à la sauce Monty Python, propice aux idées les plus loufoques. Et c’est peu dire que le film regarde de trouvailles génialissimes comme les noix de coco comme simuler le bruit des chevaux, les revendications politiques des paysans face à leur monarque, le chevalier à trois têtes, la séquence chantée façon Broadway à Camelot ou encore l’enquête parallèle menée sur les faits par une police très contemporaine. Mais le grand génie du film est d’être parvenu à éviter le piège du film à sketch, souvent inégal par essence, pour, au contraire, construire une histoire, certes absurde et improbable mais qui a le mérite d’être cohérente et structuré. En cela, "Sacré Graal" est, peut-être le film le plus abordable des Monty Python… toute proportion gardée bien sûr puisque, comme toujours avec un humour aussi avant-gardiste et révolutionnaire, il en laissera beaucoup de marbre. Les réfractaires au décalage et à l’absurdité des Monty Python ne devraient, donc, pas trouver leur compte ici. Les autres se délecteront de l’avalanche de scènes hilarantes concoctées par le groupe. Comment ne pas avoir envie de rire à la seule évocation des chevaliers qui font ni, du passage du pont, du passage du pont avec l’épreuve des trois questions, du duel avec le chevalier noir qui refuse de s’avouer vaincu, de l’assaut du château des Français avec leur insultes improbables, de la sorcière avec un faux nez qu’on veut bruler, du ramasseur de mort ou encore du cultissime lapin tueur !!! On retrouve, ainsi, l’écriture inimitable des Monty Python, leur sens du rythme si particulier et, plus généralement, cet humour anglais si typique des 70’s ainsi que sa réalisation un peu datée (encore plus avec les inévitables séquences animées de Terry Gilliam) qui participe au charme. Evidemment, le film ne serait rien sans ses interprètes, qui sont, sans doute, les seuls à pouvoir jouer ce qu’ils écrivent. Graham Chapman (énorme en Roi Arthur dépassé), John Cleese, (classieux et fougueux Lancelot mais aussi hilarant Français), Michael Palin (excellent Galaad), Terry Jones (en juste Bedevere), Eric Idle (impeccable en couard Robin) et Terry Gilliam (invraisemblable gardien du Pont) nous servent, donc, un numéro jouissif avec un plaisir communicatif. En faisant le choix de faire interpréter plusieurs rôles à chacun d’entre eux, les Monty Python assure une certaine continuité avec leurs délires télévisuelles et parviennent à ne pas parasiter le film pour autant. Les Monty Python préservent, également, ce petit cachet artisanal qui a fait leur succès et dont la perte aurait été fatal à leur passage sur grand écran. Sacré Graal est, donc, un des grands chefs-d’œuvre comiques du 7e art et, accessoirement, le point d’orgue de la carrière du groupe. "La Vie de Brian", qui lui succèdera, restera d’un très haut niveau, mais amorcera leur fin.