Dans le genre film qui s'agite dans le vide pour complètement passer à côté de l'énorme plaisir coupable qu'il aurait dû être, voici "Mom and Dad" !
Tout était là pourtant : une idée amusante (les parents massacrant leurs enfants à cause d'un phénomène inexpliqué), les messages en filigranes derrière (la difficulté d'être parents d'adolescents insupportables à notre époque et l'envie de renouer avec sa jeunesse pour échapper à l'ennui d'une vie de banlieue formatée), Brian Taylor échappé de son tandem formé avec Mark Neveldine pour son premier en solo ou encore, bien sûr, la présence de Nicolas Cage à la filmographie en totale perdition et celle, trop rare, de Selma Blair dans les rôles-titres.
Avec tout ça, on ne voyait pas trop comment "Mom and Dad"pouvait louper son objectif de petite farce sociétale sanglante et jubilatoire, toutefois, Brian Taylor va s'employer malheureusement à nous démontrer qu'il est possible de livrer le film le plus ennuyeux du monde avec une telle liste d'ingrédients explosifs.
En fait, on a le sentiment que le metteur en scène/scénariste a vite réalisé le potentiel finalement assez limité de son idée de départ mais qu'il s'est dit qu'il allait pouvoir remédier à la faiblesse de celui-ci grâce à son sens de l'esbrouffe visuelle héritée de ses oeuvres précédentes. Ça n'a de toute évidence pas suffit puisque, au contraire, ça n'a fait que l'empirer à l'écran...
Sur le fond, "Mom and Dad" donne de sérieux airs de disque rayé presque dès les premières minutes en répétant sans cesse la détresse des adultes face à des enfants qu'ils ne comprennent plus et dont ils envient la jeunesse. Pour faire patienter avant l'inévitable affrontement final des héros parents/enfants, le récit paraît ne jamais savoir trop quoi faire en balbutiant des saynètes en boucle autour de ces thématiques au risque de lasser très rapidement. Taylor a beau réciter tous les artifices de son catalogue visuel jusqu'à l'overdose pour tenter de dynamiser son histoire (montage épileptique, décalage humoristique ne reposant la plupart du temps que sur des musiques d'ascenseur omniprésentes et en opposition avec les scènes auxquelles elles se superposent, allers-retours temporels pour souligner la contradiction des caractères enfants/parents,...), rien n'y fait, "Mom and Dad" ne provoque que des baillements d'ennui. Même l'ampleur du phénomène, déjà paralysée par un manque évident de budget, peine à être traduite dans la violence des événements jamais réellement généreuse, fun ou, comble du comble avec un sujet pareil, transgressive.
Et lorsqu'arrivera la dernière partie, les maux gangrenant "Mom and Dad" seront si insurmontables qu'ils gâcheront le feu d'artifice final qu'aurait dû être cette ultime confrontation. La construction en flashbacks horriblement répétitifs prendra une tournure ridicule en venant parasiter une narration qui n'en avait pourtant déjà pas besoin (l'idée n'était pas si bête mais son exécution relève tout simplement de la catastrophe) et le pic d'hilarité qu'aurait pu représenter la venue du personnage de Lance Henriksen n'engendrera au mieux qu'un vague sourire (surtout à l'idée que le film est bientôt terminé).
À l'image de sa conclusion qui n'en est pas une comme pour mieux exposer que le film ne savait jamais vraiment où aller, "Mom and Dad" n'aura été qu'une longue déception contaminant peu à peu toutes ses promesses de départ.
De tout cela, on sauvera peut-être la bonne prestation de Selma Blair, la seule à être au moins restée constante qualitativement à l'opposé d'un Nicolas Cage qui, sans doute par peur de rester trop à l'arrière-plan, retombe la tête la première dans tous ses excès habituels. Au moins, il peut se dire que "Mom and Dad" ne tranchera pas tellement avec les autres "oeuvres" de sa filmographie de ces dernières années, lui aussi fait preuve de constance dans un sens...