L'événement cinématographique de la semaine, selon les médias, n'est pas un film facile. Je ne suis pas certain qu'attirer les spectateurs en mettant l'accent sur certaines scènes assez frontales voire radicales, soit un bon plan.
"Rester vertical" propose vraiment un film art et essai qui tente de faire bouger les lignes d'un cinéma français bourgeois et ronronnant. Alain Guiraudie, après le succès surprise ( mais assez relatif) de "L'inconnu du lac", fait table rase et s'éloigne de ce thriller métaphysique assez classique pour revenir vers l'univers de ses débuts. Avec une narration qui se moque des notions d'espace ( le personnage principal peut être à Brest puis en Lozère dans le plan suivant et ce, dans la même journée) et donc de temps, en y posant certains éléments oniriques ( Le docteur Mirande et son cabinet dans une cabane de consultation en plein marais), le réalisateur explose la narration. Son héros se trouve donc embarqué dans une sorte de road-movie d'une totale liberté. Et cette liberté est déroutante car elle ne se cantonne pas qu'à la structure du récit, elle s'applique aussi aux comportements de ses personnages qui cassent les codes sociaux que l'on nous balance par tombereaux à longueur de films. Ici, aucun cliché, aucune convenance, mais une vraie envie de montrer la vie comme elle existe, avec ses dérapages, ses errances et ses appétits bien moins conformistes qu'on veut bien le penser. Du coup surgissent à la queue leu leu, des thèmes très actuels, les sans abris, la misère affective et la pauvreté du monde rural, la théorie du genre, la sexualité, la mort, la vie et la peur de l'autre ( symbolisée ici par le loup), tous passés au filtre de ce regard radical. Rien n'est vraiment aimable là dedans, mais tout est filmé avec beaucoup de douceur.
On trouve dans ce film de nombreuses scènes rarement ou jamais vues dans un cinéma commercial traditionnel. des plans de sexe féminins ou masculins que l'on excite, un accouchement en gros plan, et je ne parlerai pas de la scène d'euthanasie, qui filmée par n'importe qui d'autre aurait été d'une vulgarité insoutenable et qui ici prend les allures d'un tableau classique d'une grande force et d'une beauté, peut être dérangeante, mais qui porte la patte des grandes oeuvres. Cependant le film ne se résume nullement à ces plans extrêmes, il draine tout un questionnement sur la place de l'humain dans une société qui élague plus qu'elle accueille et sans doute, plus globalement sur les rapports que ces mêmes humains peuvent avoir entre eux, lorsque les stéréotypes sociaux peuvent être évacués.
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