Après trois ans de préparation, Luc Besson revient proposer une nouvelle aventure de science-fiction. Il opte pour un souvenir d’enfance, ce que la célèbre bande dessinée de Pierre Christin « Valérian » lui apporte. Nous connaissions déjà le prodigieux et cultissime « Cinquième Élément », où le temps lui a donné raison aux yeux des spectateurs. Malheureusement, on ne pourra pas en dire autant de ce dernier essai, trop confus pour satisfaire n’importe quel cinéphile ou lecteur des dessins de Jean-Claude Mézières…
Si la presse américaine a majoritairement haussé le ton sur le travail du réalisateur, insistant sur le cruel manque de fond dans le scénario, cela est confirmé. Mais où diable ce trouve alors la justification ? Dans le respect sans doute. Un grand fan comme lui est tombé dans le piège inéluctable d’une adaptation fermée. En choisissant le tome 6, à savoir « l’Ambassadeur des Ombres » comme trame principale, il préfère jouer sur le suspense constant. Et c’est bien là qu’est la faiblesse du film. Les enjeux ne sont définis que tardivement, sans objectifs pour s’élancer. On reste dans le flou afin de garder un semblant de mystère, mais où est-il alors que toutes les étapes clés se révèlent très, voire trop prévisibles. Aucune comparaison avec la BD sur ce point. On pourra se mettre d’accord sur le fait que les sous-missions résultent d’un MacGuffin flagrant et pas trop dérangeant. Encore faut-il adopter la forme utile et efficace, selon le format exigé au cinéma. Étant donné la lecture rapide d’un récit quelconque, il comble des passages en veillant à montrer davantage le décor que son histoire. Il y a tout de même la baguette d’Alexandre Desplat pour délivrer un peu cette aventure, où l’action s’illustre sobre dans sa globalité. Voulant se démarquer des productions du genre Marvel Cinematic Universe, Besson s’engage dans sa propre vision des choses. Mais il sombre malgré lui dans son piège, créant ce sentiment d’avoir animé des créatures, tenant un peu trop de l’humour ou héritant du mauvais syndrome d’un certain Gungan, dans un certain épisode…
Malgré tout, la richesse se trouve dans un esthétique plutôt raffiné et élégant. On y trouve tellement d’espèces qu’on ne prend pas la peine de nous vendre leur fonction et domaines de compétences qui les ont conduits à s’intégrer dans le système de la cité. C’est pourtant là qu’est la véritable force de l’intrigue. Ce sont ses personnages et cette diversité, forte en caractère et en flexibilité d’écriture, qui ont le potentiel de rendre le récit plus prenant. La cité des milles planètes, Alpha, ou encore Point Central si l’on se réfère à la BD, propose toute cette magie fictive que l’on attendait impatiemment. Au lieu de cela, on nous sert des héros infidèles à eux-mêmes. Ils se révèlent trop linéaire car étroitement liés par une pseudo-romance très mal négociée. De plus les valeurs de chacun se contredisent souvent, à moins que ce ne soit qu’un bouc émissaire pour mieux appréhender leur complémentarité. Dans tous les cas, ce n’est pas clair comme affaire. Valérian et Laureline sont des interprètent de qualité. Dane DeHaan et Cara Delevingne l’ont prouvé par le passé. Ici, difficile de se faire son avis, alors que leurs personnages respectifs sont malmenés par une écriture trop facile, trop linéaire. Laureline est la figure d’une femme forte, mais qui expose trop souvent ses faiblesses émotionnelles. Quant à Valérian, il est réduit au coureur de jupon qu’il induit, sans jamais appuyer ses compétences d’agent confirmé. Seules quelques scènes de poursuites prendront son parti, mais en échange de quoi ? Une bonne photographie, rien de plus. Ce qui alerte de nouveau une difficulté à construire ses personnages et de leur proposer une évolution correcte et sans bavure.
Par ailleurs, sans rentrer dans le détail, on pourra souligner la promotion burlesque de Rihanna et du caméo maladroit, mais toutefois correct, d’Ethan Hawke. Autant d’éléments qui frôlent l’absurde qu’on en finit par ne plus supporter les apparitions gratuites, sans développement derrière.
En somme, « Valérian et la Cité des Mille Planètes » est oubliable au possible, tout comme ses héros qui se cherchent encore au terme de l’aventure. Si ce dernier Luc Besson est un régal pour les yeux, il y a de quoi en être rapidement irriter ou dégoûter, car ces effets visuels se présentent sans saveurs, sans convictions d’atteindre l’écran. On ne dépasse pas les planches de Mézières et le voyage reste du domaine de l’imaginaire sans sensation. Il est bien dommage de constater une telle déception après tant de temps, d’effort et de moyen au service d’une œuvre si maigre dans le fond. Nous sommes donc en droit de réclamer une seconde expérience, s’il le mérite vraiment, afin de pouvoir estimer le mérite des productions françaises sur grand écran. Il sera atout de même difficile de trancher dans quelque chose qui n’illuminera pas notre été, mais qui ne le rendra pas plus triste pour autant !