"Loving" démontre le talent certain de Jeff Nichols à se trouver sur tous les fronts tant il fait fort en nous contant cette histoire édifiante, qui est traitée avec grâce, pudeur et sensibilité.
Sa caméra se faufile à pas feutrés dans l'intimité de ce couple au nom prédestiné, en le montrant tel qu'il est, dans sa simplicité la plus totale et même dans un dépouillement étonnant, en évitant toute sensiblerie inutile !
On reste d'ailleurs bluffé par ces deux acteurs tout en réserve, dont le jeu est d'une pureté et donc d'une justesse épatante !
Ce couple dégage ainsi une émotion rarement égalée au cinéma, car cet homme aimant mais taiseux, voire frustre dans ses propos, arrive à entourer tendrement cette femme pleine de charme et d'une délicatesse inouïe...
Jamais l'Amour n'a été si bien montré, rien que par ce mariage tel un défi, ultime preuve d'engagement, rien que par ces visages aux regards perdus, rien que par ces mains nouées fébrilement envers et contre tout...
C'est en effet leur différence de couleur de peau, véritable entrave à leur vie commune dans cet état de Virginie aux lois ignobles, stigmates de la ségrégation raciale, qui interdit cet union.
Ce sera le moteur de cette lutte menée avant tout par Mildred, prête à tout pour faire confiance aux mains tendues et aller de l'avant !
De son côté, elle va oser et tenter le tout pour le tout, tandis que Richard son mari taciturne et méfiant, aura tendance plutôt à se replier tout en acceptant l'attitude et les décisions de sa femme tant il l'aime et la protège !
L'actrice Ruth Negga arrive ainsi merveilleusement à faire passer toute la bienveillance que son personnage dégage envers cet homme interprété avec humilité par Joel Edgerton, solide et pas à la fois, jusqu'à en devenir terriblement troublante plus d'une fois.
Le spectateur lui n'a juste qu'à s'abandonner et observer cette famille pour s'imprégner du ressenti des uns et des autres, famille dans laquelle tout passe par les silences, les peurs, mais aussi l'espoir toujours présent au fond des yeux...
C'est donc un enchantement poignant et véritable, mais utile et nécessaire, que nous propose là Jeff Nichols, sous la forme d'une peinture extrêmement précise d'un fait de société impensable qui prouve une fois de plus la bêtise de l'homme et son racisme exécrable empêchant deux êtres de s'aimer en 1958 soit il y a simplement 60 ans !
Un film humain, magnifique, puissant porté par deux acteurs simplement éblouissants...