Roïeoïeoïe… J’ai voulu y croire et bien mal m’en a pris ! Après tout, c’est vrai qu’on n’en voit pas souvent des films fantastiques français ! Et si « Le dernier train pour Busan » avait su rafraichir le film de zombie parce qu’il avait su s’implanter dans un univers et une cinématographie coréens, on était en droit d’espérer que « Seuls », parce qu’il était français et qu’il se déroulait en banlieue parisienne, saurait insuffler quelque-chose de nouveau dans le genre, non ? Bon, en tout cas, si dans l’idée il pouvait se passer quelque-chose, dans les faits tout s’est lamentablement écroulé. Ce qui me choque d’ailleurs avec ce film, c’est qu’il se foire sur absolument tout ce qu’il entreprend. Le pire c’est que dans l’idée ça aurait pu être sympa. Même s’il n’y a effectivement rien d’original dans le postulat de départ (en gros c’est un mélange de « Lost » et de « Leftovers »), il y aurait pu au moins avoir l’intérêt de ce décor singulier qu’est la banlieue parisienne… Alors oui, dans les faits on nous parle d’une ville fictive – Fortville – mais bon, à l’écran, difficile de ne pas reconnaître les barres du XIIIe arrondissement, les tours de la Défense ou bien encore l’axe majeur de Cergy. Malgré tout, pour moi, tout cela n’était pas vraiment un souci. Au contraire, ça aurait même pu être le gros point fort du film : inscrire son conte fantastique dans un théâtre si peu coutumier du fait. Mais bon, pour cela, il aurait fallu que ce film ait été un minimum maitrisé, ce qui n’est malheureusement pas du tout le cas. Déjà, commencer le film en reprenant l’intro de « Cars » (oui oui, je parle bien du Pixar), mais avec une photo et un montage dégueulasses, et le tout pour servir une scène qui n’a quasiment rien à voir avec l’intrigue générale du film, je trouve que c’est juste le pire des moyens pour commencer le film. Et ce qu’il y a d’atroce dans cette intro, c’est qu’elle augure de tout ce qui vient par la suite. Les cadres ne disent jamais rien. La photo est la plupart du temps hideuse et mal gérée (les contre-jour : ouah mais par tous les dieux qu’ils sont laids !) Le montage ne suit jamais le bon tempo, notamment dans les discussions ou les scènes d’action (la scène de bagarre avec Leila au début du film est quand même un festival d’amateurisme. Les transitions sont tellement loupées que c’est limite si on n’entend pas le « action ! » du réalisateur au début de chaque plan.) De même, les dialogues sont creux et incroyablement artificiels (pour le coup, si j’avais pu faire une critique vidéo, j’aurais pu vous faire un mix d’un bon quart d’heures de toutes ces répliques qui sonnent faux comme un vieille pièce d’élèves de primaires.) Et je n’ose même pas parler de l’intrigue générale qui empile les clichés et les incohérences comme jamais (
…Parce Leila sait piloter un kart, alors elle sait conduire du premier coup une Ferrari, une Rolls, un camion blindé et… un bus. Bah voyons. De même, parce qu’Yvan est un fils de riche, alors il peut bidouiller une radio longue fréquence. Ah ?... Et enfin, parce que ces pauvres enfants sont livrés à eux-mêmes du jour au lendemain, alors du coup ils deviennent experts dans le maniement d’armes à feu en seulement 24 heures… Et j’ose même pas parler des centrales électriques qui continuent de tourner toutes seules, malgré la disparition de tout le personnel technique !
) Alors après, c’est vrai, au regard de ce que l’intrigue finit par révéler d’elle-même, ces incohérences peuvent encore se comprendre et s’expliquer (
après tout, puisqu’on nous dit à la fin qu’on est dans le délire d’adolescents morts, why not
), mais quand même ! Justement, si le film avait une explication finale, il aurait dû être capable d’en jouer avec nous. Parce que là, quand tu te morfles une heure et demie de scènes mal filmées, animées par des dialogues mal foutus, le tout au service d’une intrigue qui enchaîne les péripéties comme un jeu-vidéo enchaîne les niveaux, tu n’as juste plus envie d’y croire du tout à ce film. De toute façon, même la révélation finale passée, le film n’en prend pas pour autant davantage d’épaisseur et de crédibilité. Et je pense que tout cela s’explique aussi parce que, depuis le départ, la réalisation de David Moreau n’a pas su trouver le ton qui correspondait au mieux à ce genre d’intrigue. Moi, quand je suis allé voir l’esthétique de la BD originale en rentrant chez moi, j’arrivais davantage à y intégrer tous les éléments un peu what-the-fuckesques du film (
Le passage avec l’interrogatoire chelou mené par Ivan dans l’ascenseur, ou bien encore le trip avec les drones et le mec aux couteaux par exemple…
). Tout ça pouvait effectivement fonctionner, mais à condition qu’on ait pris la peine de poser dès le départ un prisme fantastique – voire adolescent – sur cet univers. Là, David Moreau nous la joue limite film social avec un grain très sombre et des scènes d’introduction qui ne cernent le personnage principal qu’au travers d’un quotidien assez rude et peu inventif. C’est con à dire, mais cette réalisation ne nous invite pas à rentrer dans cet univers à travers le prisme d’un adolescent, ce qui, selon moi, était la seule façon de rendre cet univers crédible et – surtout – séduisant. Mais là, parce que tous les choix artistiques opérés sont incohérents et mal maîtrisés, tout ce qui aurait pu être un film à l’atmosphère particulière se transforme en une sorte de téléfilm pour ados totalement loupé.
Moi quand je vois comment ils ont gaulé le maître des couteaux dans ce film, je m’exaspère plus d’un poncif mal digéré plutôt que je me laisse prendre d’épouvante pour ce personnage sensé être charismatique. Quand on me sort en mode random « Stop ! pas de souci c’est juste un enfant attardé ! Regarde il fait partie de l’asso qu’à ma mère et dont je n’ai jamais parlé avant ! », moi dans ma tête ça ne fait pas un « …alors tout s’explique ». Non, ça fait plus un « mais ça n’explique ni le masque chelou ni le fait qu’il veuille tuer tout le monde ! » Pareil, quand je vois et que j’entends la caricature ultime que constitue le grand méchant de cette histoire (qui apparait d’ailleurs un peu comme ça, sans que rien ne l’annonce vraiment), je me dis que non – ce n’est pas possible – je ne suis pas au cinéma, mais devant ma télé, en 1992, en train de me regarder un épisode des « Power Rangers »
. Donc oui, il aurait pu être sympa ce « Seuls ». Mais là, ce film a juste poussé tellement loin la lose, que c’en est devenu impossible pour moi de le défendre. Ne serait-ce que pour l’absurdité de la scène de fin, c’était juste impossible. Et ne croyez pas : ça m’attriste de mettre une telle note pour un film dont les jeunes acteurs semblaient si sympas ! Et ça m’attristerait presque aussi pour la BD originale parce que j’ai l’impression que son univers a de quoi être prenant. Bref, comme quoi les bonnes intentions ne suffisent pas. Quand le talent n’est pas là, c’est juste peine perdue… Triste…