Pauvre Lisa, son petit ami Stuart vient de rompre avec elle parce qu'il la jugeait ennuyeuse, quel saligaud ! Lors d'un voyage au Mexique, pour la consoler, sa soeur lui propose de faire une plongée en mer dans une cage au milieu des requins les plus frappadingues de la faune sous-marine...
-À l'échelle, on peux imaginer que, pour la réconforter du décès d'un de ses proches, elle lui offrirait sans doute un bain dans une piscine de seringues usagées ou de s'enduire de miel au milieu de dizaines de milliers de fourmis rouges. Mais soit. Reprenons-
...À l'invitation de deux inconnus rencontrés la veille...
-Ah, le "Mais soit" risque d'arriver souvent à la lecture de ce qui suit donc on vous laisse le prononcer-
...elles embarquent dans un vieux bateau de pêche équipé de la cage d'exploration la plus rouillée de la planète. Après avoir laissé leurs deux compagnons d'un jour faire le premier voyage pour bien user le câble du treuil aussi fin que du fil dentaire pour requins, elles montent à leur tour dans la cage...
-Bon, si, à ce stade, vous ne voyez pas ce qui va arriver au vu du titre et de l'affiche du film, c'est que vous devez être un petit poussin à peine sorti de votre oeuf et, à vrai dire, on se demande bien comment et pourquoi vous vous êtes retrouvés en train de lire ceci-
...Craaaac, tout part en vrille, le câble lâche et la cage avec les deux soeurs se retrouve à 47 mètre au fond de l'océan avec tout plein de squales affamés leur tournant autour...
L'ennui, c'est qu'on a tellement fait faire n'importe quoi aux requins dans des DTV minables, que, lorsqu'arrive un truc plus sérieux que les autres, on s'attend tout de suite à un nouveau "Les Dents de la Mer". Il faut savoir relativiser, oublier cette référence qui ne sera probablement jamais égalée et juger ce type de longs-métrages pour ce qu'ils sont souvent, des petits films à suspense qui tentent dans un premier degré absolu de redonner ses lettres de noblesse à la peur primaire suscitée par ces prédateurs des fonds de mer et, vu leur rareté contemporaine, cette simple ambition mérite d'être saluée. En ce sens, le "Instinct de Survie" de Jaume Collet-Serra cochait toutes les cases du shark-movie jouant sur ce registre plus sérieux et constituait une agréable surprise d'été à déguster en salles, ni plus, ni moins. Même s'il se situe quelques crans en-dessous qualitativement parlant, "47 Meters Down" s'inscrit aussi dans cette droite lignée. Déjà pas si mal, nous direz-vous.
Une présentation des deux héroïnes réduite a minima, balancée un peu n'importe comment à l'écran (vacances-révélation de la rupture-fête-dragouillage de deux locaux-quelques minutes d'hésitation sur le bateau) et hop, pas le temps de souffler, nous voilà déjà plongés littéralement dans la crainte des ailerons et des dents pointues à laquelle "47 Meters Down" rajoute un sentiment de claustrophobie avec ces deux soeurs captives, un compte à rebours inexorable sur l'épuisement des réserves d'oxygène et la peur du vide provoquée par ces grands fonds marins. Ça fait beaucoup pour un seul long-métrage, peut-être même un peu trop car le film de Johannes Roberts va rarement aller jusqu'au bout de ses intentions frissonnantes sur tous ces plans. S'il y a une forte jubilation à découvrir les apparitions des requins toujours filmés comme des manifestations maléfiques de films d'épouvante (ils surgissent absolument de nulle part et sont hargneux comme des teignes, ces bougres) et la condition sidérante de ces héroïnes qui engendre forcément un phénomène d'identification, le récit de "47 Meters Down" va trop souvent tirer sur de grosses ficelles narratives pour réellement surprendre.
Au-delà du point de départ haletant, le film aura un mal fou à maintenir une tension constante autour du sort de ces deux soeurs en se noyant dans les dialogues éculés, les facilités et certaines incohérences assez folles : les bars d'oxygène disparaissant dans une absurdité temporelle totale (une des soeurs en perd quinze en cinq minutes pendant que l'autre met plus de vingt minutes à perdre le même niveau en faisant autant d'efforts sinon plus, gnnnn ?) et des remontées vers la surface pour communiquer à la durée toute aussi aléatoire. Ce manque de crédibilité sera hélas souvent fatal à notre attachement au devenir des deux héroïnes qui appelait pourtant une bonne dose de réalisme, d'autant plus que le jeu des actrices les interprétant et leurs charismes cumulés n'atteindront hélas pas la patte de la mouette de "Instinct de survie" pour vous donner une idée. Dès lors, malgré quelques bonnes idées ici et là, "47 Meters Down" nous amusera plus souvent involontairement qu'il ne saura nous captiver. Et ce n'est pas cette dernière partie fleurtant avec le n'importe quoi général qu'un twist final (horriblement prévisible car le film insiste en permanence et sans subtilité sur une certaine donnée) tentera par tous les moyens de gommer qui rattrapera cette impression d'avoir assisté à un spectacle parfaitement anecdotique mais qui a néanmoins réussi à rester divertissant jusqu'à son terme. Déjà pas si mal, nous disiez-vous...