Dans le paysage saturé des films d'horreur, "It Follows" de David Robert Mitchell se distingue comme une œuvre à la fois raffinée et perturbante. Le film repose sur un concept singulier — une malédiction transmise par un acte sexuel, incarnée par une entité qui avance implacablement vers sa proie. Cette entité, invisible aux yeux de tous sauf de sa victime, symbolise une terreur primitive, celle d'être poursuivi par quelque chose d'inéluctable et d'inexplicable.
La mise en scène de Mitchell est une réflexion mélancolique sur la jeunesse et ses transitions, ancrée dans une esthétique délibérément rétro qui évoque les classiques du genre des années 80. La photographie de Mike Gioulakis, avec ses plans larges et ses mouvements de caméra fluides, amplifie un sentiment constant d'insécurité, faisant de l'espace un personnage en soi, à la fois ouvert et oppressant. La musique de Disasterpeace renforce cette atmosphère avec des compositions qui oscillent entre nostalgie et menace, rappelant les œuvres de John Carpenter.
Les performances sont mesurées, avec une mention spéciale à Maika Monroe, dont la portrayal de Jay est à la fois vulnérable et résiliente. Elle incarne le désespoir silencieux de son personnage avec une intensité qui rend son calvaire palpable.
Cependant, le film n'est pas exempt de faiblesses. Certaines décisions des personnages frustrent par leur naïveté, et le rythme, bien que généralement maîtrisé, souffre parfois de longueurs qui diluent l'urgence de la menace. De plus, la fin du film laisse un sentiment de résolution inachevée qui peut être interprété soit comme une ouverture stylistique, soit comme une lacune narrative.
"It Follows" excelle dans sa capacité à créer une peur viscérale de l'invisible et de l'inévitable, tout en laissant une large place à l'interprétation. C'est une métaphore de la perte de l'innocence et des angoisses qui accompagnent le passage à l'âge adulte, explorant des thèmes de la vulnérabilité, de la confiance et de la mort. Bien qu'il ne réinvente pas le genre, il le revitalise en retournant à ses racines psychologiques et existentielles.
En somme, "It Follows" est un film qui, malgré certaines imperfections, se distingue par son originalité et son ambition. Il s'agit d'une œuvre qui marque par sa capacité à instiller une horreur sourde et persistante, une prestation qui mérite d'être reconnue et appréciée, même si elle ne plaira pas uniformément à tous les spectateurs.