En version originale suédoise, le film de Ruben Östlund s'appelait: Force majeure. Traduit en français, ça donne: Snow Therapy. Dingue, non?
Une exquise petite famille de bobos suédois vient passer une courte semaine de vacances, qui va s'égrainer jour après jour, en France. Les parents skient comme des dieux, les deux petits suivent (sans jamais râler..... sont-y bien élevés!!). Et sont ils beaux, après leur première et radieuse journée sur les pistes, faisant la sieste tous blottis les uns contre les autres dans leurs petits Damarts pastels.... Dans la nuit, il se met à neiger, d'une force! Le lendemain, les déclenchements d'avalanche se succèdent (puis je insister sur une première idiotie: on déclenche la nuit, avant l'ouverture des pistes, jamais le jour). Voilà notre petite famille en train de faire un délicieux déjeuner à la terrasse d'un restaurant d'altitude, et dans le couloir juste en face, une avalanche part. Elle est énorme! elle ne s'arrête pas, ne fait que grossir au point qu'on se demande si elle ne va pas sauter le mur et passer sur la terrasse. Panique. Tout le monde reflue vers l'intérieur. Ebba (la ravissante Lisa Loven Kongsli, qui ressemble à Marina Hands avec ses yeux de chat) cherche avant tout à prendre contre elle ses deux petits. Mais Tomas (Johannes Bah Kuhnke), lui, s'est déjà carapaté, non sans oublier de ramasser soigneusement ses gants et son smartphone.... Les enfants ont compris que leur père les avait laissé tomber. Et quand Ebba demande des explications, son compagnon est complètement dans le déni. Ce qui est le summum de l'insupportable pour la jeune femme. Comment vont ils ensuite pouvoir vivre ensemble? Quand celui qui est encore considéré, dans une optique traditionnelle, comme le pivot, le protecteur de la cellule familiale en est indigne, c'est tout un petit monde clos qui s'effondre....
C'est un point de départ absolument formidable. A condition de savoir ensuite en faire quelque chose. Qu'en fait Östlund? Absolument rien.
Déjà, il enferme son film dans un carcan de conventions idiotes pour qu'il ait l'air le plus faux possible. Où ont ils été chercher cette station qu'on ne voit jamais, cette résidence hôtelière dont on ne voit jamais que l'immense vide intérieur genre prison (mais en bois...) sur lequel donnent les appartements. Le couple va sur ce couloir pour régler ses comptes (symbole en gros sabots de l'enfermement familial); il n'y passe jamais personne, à part un garçon d'hôtel vaguement voyeur (et fort mal élevé, tout à fait indigne du supposé chic des lieux....).
Delors, les télé -sièges tournent complètement à vide, les bennes sont vides et sur les tire-fesses il n'y a que la petite famille. Personne sur les pistes. Pas un anorak rouge à l'horizon. Personne n'a testé, avant Tomas et son ami, les itinéraires de poudreuse. A ce propos, l'opérateur ne sait même pas filmer en montagne; là où l'on devrait avoir une sensation de pente, on n'y voit que du plat...... Bref, imaginez Courchevel privatisé pour six personnes; la faillite!
Je ne sais pas du tout où cela a été tourné. Je ne reconnais rien. La montagne est si énorme qu'elle pourrait être l'Himalaya.... Est ce vraiment filmé? Est ce du matte paint? Tout sonne faux..... Bref, le réalisateur ne nous envoie pas dire qu'il est un intello, ah mais, et que les Bidochon font du ski, c'est pas son genre.
Pourtant les deux acteurs sont excellents et les scènes qu'ils partagent avec un couple d'amis (Mats, un gigantesque Viking norvégien roux et barbu, Kristofer Hivju, et sa souris qui pourrait être sa fille, Fanni Metellius), sont assez bien vues. Edda remâche sa déception, et le brave Mats aligne toutes les raisons qui pourraient expliquer le comportement de Tomas: après tout, en avion, en cas de dépressurisation, le père de famille responsable doit d'abord prendre soin de lui en mettant son masque pour mieux pouvoir ensuite veiller sur ses enfants, pas vrai? Non seulement personne n'est convaincu, mais le couple d'amis se met à son tour à se chercher des poux dans la tête...... Ca c'est le côté très positif du film, perdu dans un océan d'ennui. Sans doute, en tant que montagnarde j'ai beaucoup de mal à me passionner pour des plans fixes interminables de dameuses montant à l'assaut..... de télé sièges (vides) tournant dans le vide..... quand ce ne sont pas nos deux héros en train de se brosser les dents (variante; l'un se brosse les dents tandis que l'autre fait pipi en arrière plan). Ca, elles doivent étinceler, leurs molaires, pour sûr!! A côté, Ingmar Bergman, c'est du western spaghettis.
Le film est tué par sa prétention à jouer les films d'esthète. On nous propose un cas psychologique vrai, humain, proche de nous, et on le noie dans un déluge d'artificialité. On devrait se poser de vraies questions sur le courage, la responsabilité, l'instinct et l'éducation, l'image de soi..... Même pas!
Pour bien montrer qu'il est un intello pure laine, le réalisateur se doit de terminer pas une scène à la Bunuel, laquelle n'a pas grand chose à voir avec le reste.... mais qui m'évoque un souvenir de cinéma -que je ne suis pas capable de matérialiser. Ces personnes qui se mettent en marche, je les ai déjà vues quelque part -mais où?
Raté. Dommage.