"Into The Wood" ou "le film américain avec une longue traduction française inutilement longue à lire" !
Adapter une comédie musicale à succès de Broadway n’est pas chose nouvelle, on a déjà eu des adaptations au cinéma avec "Les Misérables" de Tom Hooper ou encore "Mamma Mia" de Phyllipa Lloyd, mais c’est la première comédie musicale de Broadway adapté par la compagnie Disney et avec un sujet comme les contes pour enfant et un mélange de plusieurs histoires bien connues de notre enfance comme celui de Raiponce, de Jack et le Haricot magique ou encore la célèbre histoire du Chaperon rouge, le tout sur un fond de comédie musicale (un genre que j’apprécie particulièrement) et avec Rob Marshall à qui l’on doit le très agréable Chicago dans le même genre (je n’ai pas encore vu Nine) sans oublier Stephen Sondheim à la musique comme pour l’excellent "Sweeney Todd" de Tim Burton, je ne pouvais qu’être intrigué et attiré par ce que le film pouvait nous présenter.
La promotion autour du film a été assez constante et forte, certains ont même comparé ce film à l’avance avec la célèbre et apprécié série "Once Upon a Time" qui revisite les contes de fées également (série que j’ai à peine commencé). Et le casting présenté ne rendait le tout que plus alléchant, de toute manière : quand on me met Meryl Streep sous les yeux je peux difficilement dire non, alors j’ai été motivé pour le voir le jour de sa sortie en salle.
Et au final… ben je vais être sincère avec vous les gens : le film est assez bon et appréciable mais je suis aussi perplexe en sachant que, tout comme pour la version Burton "d’Alice au pays des merveilles" et "Maléfique" sorti l’année dernière, ça aurait pu être vachement meilleur si le film était allé à fond dans ses initiatives pourtant très prometteuses et avait accepté de plonger entièrement dans l’atmosphère sombre que semblaient vendre les teasers.
Mais n’allons pas trop vite en besogne et parlons d’abord de la mise en scène et de la réalisation de Rob Marshall, et sur ce point le réalisateur nous propose en général de bonne chose, des mouvements de caméra bien étudié et parfois des plans vraiment scotchant mettant bien en valeur la féérie et l’aspect enchanteur des contes de fées que l’on suivra durant ce film,
par exemple la transformation de Cendrillon en princesse au milieu des feuilles dansantes au gré du vent était très réussi et trompeur à l’œil nu.
Sans compter que Marshall offre souvent des plans visuels vraiment beaux sur la forêt que traversent nos personnages de conte,
j’ai d’ailleurs un petit faible pour le plan du loup à la fin de sa chanson hurlant à l’appétit
. Mais si en général la réalisation est travaillé, il y a quand même certains passages ou Marshall a l’air de jouer les je m’en foutistes… et pour l’une d’entre elle ça ne passe simplement pas parce qu’elle était trop importante pour être négligé :
la mort de la femme du boulanger dans la seconde moitié est traité à la va-vite et en un éclair alors c’est censé être dramatique et avoir un impact important sur le boulanger, on n’a même pas l’impression qu’elle est au sommet d’une falaise à ce moment là alors sa mort paraît complètement invraisemblable, on n’y croit pas une seconde et le fait de ne pas voir son corps n’arrive pas à rendre sa mort plus dure
. Mais j’en reparlerais un peu plus bas dans la partie scénario parce que là aussi j’ai des choses à dire, néanmoins le travail de Marshall est appréciable malgré plusieurs maladresses au niveau de la mise en scène.
Les effets spéciaux, pour le peu qu’on en voit, fonctionnent bien comme la poussée des haricots magiques et la magie de la sorcière que je trouve plutôt cool à voir à l’œuvre, mais en revanche
la mère géante en fin de film sent un peu le fond vert et on voit clairement qu’ils ne la montrent jamais entièrement, juste certaines parties du corps cachés par les branches et parfois le visage pour qu’on voit au moins à quoi elle ressemble
. Mais en général ils tiennent la route et on y croit amplement. En revanche, niveau décors et costumes là j’ai rien de mal à dire, l’aspect des branches ainsi que les différents environnements et la répartition des ingrédients de chacun des contes donnent vraiment une ambiance mystique et de féérie qui est la bienvenue dans cette adaptation musical, de nuit comme de jour il y a pas mal de détail à prendre en compte et à décortiquer au regard, de ce côté-là c’est du très bon travail.
Bon, maintenant parlons de la performance des interprètes et acteurs, et quoi de mieux que de commencer par mes deux chouchous : Meryl Streep et Johnny Depp. Pour Johnny Depp… eeeh, je vais pas vous mentir, si vous espériez le voir longtemps vous pouvez passer votre route, son rôle du grand méchant loup est tertiaire (mais pas inutile) comparé au reste des personnages néanmoins pour le peu de temps qu’il apparaît il s’éclate et vocalement, il offre une très bonne performance dans sa seconde interprétation dans une comédie musicale adapté d’une pièce de Stephen Sondheim, mais avoir son nom au casting juste pour attirer la foule alors qu’il apparaît très peu c’est juste une méthode de fan service que j’apprécie pas.
Quant à Meryl Streep, je n’ai pas été déçu, comme d’habitude et la double récompensée aux Oscars livre une performance assez délirante mais maîtrisée d’une sorcière dont l’écriture m’a paru vraiment intéressante. On la présente comme la méchante de l’histoire dans la première partie du film et il y a quand même de quoi,
elle retient Raiponce prisonnière dans une tour et qui n’est autre que la sœur du boulanger, et elle a lancé une malédiction empêchant la femme du boulanger d’avoir un gosse
et je ne dis pas tout. D’un autre côté, c’est une femme de parole
puisque elle respecte ses promesses envers le couple de boulanger et on tente d’en faire une victime ne serait-ce qu’avec la malédiction sur les haricots magiques qui pèse aussi sur elle et l’a changé en vieille peau,
et elle sert une petite morale qui a sa place lors de sa dernière scène. Malheureusement, il y a quand même quelque problème dans son écriture, surtout avec sa relation vis-à-vis de Raiponce, je veux dire…
est-ce qu’elle la considère comme sa propre fille finalement ou alors elle la retenait prisonnière juste pour punir le boulanger et ses parents ?
.
James Corden, alias le boulanger, livre une prestation assez correct dans l’ensemble mais son personnage aurait pu être bien meilleur. Anna Kendrick jouait, selon moi, le personnage de conte le plus mis en avant et intéressant dans ce film, déjà elle est belle à regarder (si si, y'a de quoi se faire plaisir messieurs) mais son personnage a pas mal d’idée intéressante bien exploité
comme le fait de laisser volontairement une pantoufle de verre le troisième et dernier soir pour tester l’amour du prince
, l’actrice s’en sort aussi bien au chant que dans son jeu de comédienne dans l’ensemble… mais là aussi il y a quelques soucis. Emily Blunt s’en sort bien également, son rôle est assez constant et important dans la première moitié du film et apporte des éléments intéressants, mais comme je l’ais dis
sa mort est trop mal traité pour qu’on se sente désolé pour elle.
Pour ce qui est des acteurs enfants, j’ai pas eu de problème avec Daniel Huttlestone et Lilla Crawford, même si pour moi c’était le chaperon rouge qui s’en sortait mieux que Jack, et il n’y a pas de gros problème au niveau de ces deux personnages là à mes yeux.
En revanche… houlà, oh mon dieu : Chris Pine et Billy Magnussen, les princes de Raiponce et Cendrillon. Alors le problème ne vient pas de leur jeu ou de leur interprétation, l’un est même plutôt bien utilisé dans la seconde partie mais une scène m’a paru trop kitsch et ridicule pour que je puisse prendre ces deux imbéciles de prince au sérieux à savoir la chanson "Agony" qui est juste ridiculement musicale avec des paroles trop cul-cul pour moi. Le but c’est bien de tourner les princes en ridicule je pense et de faire dans l’auto-dérision mais pour le coup ça m’a paru trop pathétique et… enfin bon vous voyez ce que je veux dire non ?
Pour en revenir aux princes, celui de Raiponce n’a pas de réel intérêt si ce n’est que pour respecter le conte original, celui de Cendrillon en revanche est discrédité lui aussi mais d’une façon un peu plus approfondi quand même
en nous le montrant dans la seconde moitié du film comme un coureur de jupon lorsqu’il séduit la femme du boulanger et non pas comme un homme sincère ou le rêve de toute princesse.
Quant à Mackenzie Mauzy, elle n’a presque aucune utilité sauf pour un élément dans la première partie, l’actrice fait le boulot mais son personnage est transparent et trop vide, pas mauvaise mais sans réel développement et devient un cliché passager. Pour le reste du casting, ça se tient plutôt bien, mais les personnages sont aussi bien traité et intéressant que trop délaissé quand ils ne sont pas ridicule à souhait.
Parlons de l’aspect comédie musicale, et si pour ma part j’ai bien aimé, je ne pense pas pouvoir dire que tout le monde va forcément apprécier l’ambiance musicale à la broadway de Stephen Sondheim. Les musiques collent très bien à l’univers féérie et conte du film, mais les chansons sont aussi sympathique qu’ils sortent parfois de nulle part (et pour le coup je dois être subjectif sur ce point) : l’introduction musicale est sympa et entraînante à mon sens bien que quatorze minute peuvent paraître longue pour certains, "Hello Little Girl" m’a bien diverti grâce à Depp, "Agony"… trop kitsch et cul-cul la praline pour moi-même si c’est le but, « Your Fault » m’a bien plu aussi et je trouve qu’elle sert bien la morale que ça fait passer en fin de chanson, bon après il y a vraiment un gros paquet donc je ne vais parler de tous (et je comprendrais que certains disent que ça fait trop musicale au final), mais il y a quand même deux qui arrivent de manière trop forcé et inutile, "It Takes Two" en fait partie et n’a pas d’utilité, elle fait même office de remplissage un peu lourd pour être honnête.
Bref, parlons du dernier point… ou je vais être contraint de parler de la plus grande partie des problèmes du film : son scénario. Et là je suis désolé, mais ce film a un énorme problème, j’ai eu l’impression plus d’une fois pendant le visionnage que ce film ne savait pas à quel public s’adresser, si ça devait être plus pour les enfants ou les adultes. Les personnages et les chansons font très contes de fée mais les bois font très sombre et promettent une ambiance plus mature et sombre, et au final ça devient assez gênant à certains moments quand ça se veut plus mature et que Disney se moque de certains de ses codes. De plus, et là ça va paraître paradoxal mais même si il fait une heure cinquante quatre, ce film est un peu trop court pour ce qu’il raconte et ne prend pas son temps pour que l’ambiance et l’atmosphère s’installent réellement malgré le bon rythme musicale et dans la première moitié de film, on finit par ressentir un sentiment de répétition à un moment durant la première heure. Je vous donne le schéma :
j’ai d’ailleurs un petit faible pour le plan du loup à la fin de sa chanson hurlant à l’appétit
0
Et ça peut vite devenir lassant, si ça avait décidé de se dérouler en une seule journée et nuit mais que le film avait prit son temps de cette manière, on aurait pu arriver à quelque chose de plus intéressant mais en moins de temps, et il aurait fallu ajouter au moins un quart d’heure pour remplir les vides et incohérences du scénario. Parce que, oui, là j’arrive à la partie qui me fâche mais des bourdes scénaristiques il y en a à un paquet et je suis obligé d’en parler,
j’ai d’ailleurs un petit faible pour le plan du loup à la fin de sa chanson hurlant à l’appétit
1
J’en ais d'autres en tête, mais ça ce sont les principales idioties que j’ai remarqué et malheureusement, ce ne sont pas les seuls.
C’est vraiment dommage parce que ça promettait beaucoup, seulement tout ces petits défauts viennent rendre le résultat final laborieux et dans la seconde partie ça sent le désintérêt plus d’une fois pour ce que ça raconte et ce que ça montre. Parfois ça devient même ridicule même pour une adaptation de conte de fée en live, parce que les scènes légèrement plus cru
j’ai d’ailleurs un petit faible pour le plan du loup à la fin de sa chanson hurlant à l’appétit
2
ne vont jamais au bout, mais je suis même sur que les enfants n’apprécieront probablement pas quand on voit ce que ça raconte dans la seconde partie du film.
Cela dit, il y a quand même quelques bons points dans l’histoire, déjà la liaison entre les contes se tient bien en général et la rencontre entre les personnages et les interactions qu’ils ont entre eux ne sont pas dénué d’intérêt, plusieurs évènements se lient bien entre eux pour atteindre ensuite la seconde partie du film et la morale apporté par la sorcière et la chanson "Your Fault" marche bien pour ce qu’il veut faire comprendre en montrant que les actions des uns comme des autres sont le résultat de ce qui arrivent et que personne en particulier n'est à blâmer, tous sont responsables.
Et des scènes marchent quand même bien
j’ai d’ailleurs un petit faible pour le plan du loup à la fin de sa chanson hurlant à l’appétit
3
, ou la dernière scène de Meryl Streep qui m’a plutôt bien prit au tripes et je garde quand même une touche de pitié pour elle au final.
Pour conclure, "Into The Wood" n’est pas une mauvaise comédie musicale ou un mauvais film, il est assez appréciable pour ce qu’il est mais la réception critique actuelle est compréhensible quand on voit ce que ça vaut au final. Je ne regrette pas ma séance, mais je reste assez déçu malgré un petit faible pour quelques chansons, et j’attend maintenant avec impatience "Les nouveaux Héros" dans l’espoir que ça rattrapera largement cette déception.