Elysium c’est le genre de films qui vous fait dire « Dommage ! ». Dommage parce que ça aurait pu être fichtrement bon, dommage parce que le pitch de départ était sympathique… dommage parce que c’est quand même carrément raté.
Affiché comme promesse de succès, le nom de Neil Blomkamp à la réalisation donnait envie. Après tout « District 9 » avec ses allures de documentaire et son parti-pris inattendu avait su séduire. Par ailleurs, il bénéficiait d’une réalisation à la fois soignée et à part. Hélas, notre cher ami Neil a laissé ses bonnes idées au placard et nous sert avec Elysium une production sans âme, calibré sur les standards de l’industrie Hollywoodienne et bourrée de clichés.
« On parie que le meilleur ami il crève ? »
Ce qui est drôle avec le critique cinéma moyen, c’est qu’il s’arrange toujours pour faire deux choses :
1) Casé une phrase incroyablement mal construite avec un ou deux termes à connotation digne de l’intellectuel parisien versé dans l’art de l’auto-fellation cérébrale.
2) Placé de la politique de bas étage histoire d’hameçonner le spectateur lambda et un peu bas du front.
En l’occurrence :
1) « sa transposition militante du fossé entre riches et pauvres manque d'enjeux et n'échappe pas à un certain manichéisme. »
2) « une fable d'anticipation sur la lutte des classes »
Avec ça, si même Papy Karl ne se sent pas concerné il y a un problème.
Le souci, c’est que parler de lutte des classes au sujet du « Meilleur des mondes » de Huxley je veux bien, mais à propos d’Elysium ça revient à dire que le SDF qui a un carton comme toit dispose d’autant que l’ami Bill Gates. Vous me suivez ? Pour faire court : ça n’a pas de sens.
Ici la lutte des classes s’arrête à une chose : les hispaniques et autres types de basanés crèvent de faim sur notre très chère Terre tandis que les Blancs snobinards (Français s’il vous plait) se rincent le gosier et coulent des jours heureux sur Elysium, une station orbitale de luxe. Ça fait un peu léger pour causer de lutte des classes, surtout lorsqu’un seul des protagonistes concernés se bouge vraiment le tronc.
On tient ici le premier cliché d’un film qui en recèle un nombre conséquent. Outre les « hey amigo vient on va voler des voitures » et le pincement de nez de Jodie Foster à la vue des prolos, les deux heures de long-métrage sont employés à voyager de raccourcis en raccourcis. Que voulez-vous, la facilité ça attire.
Pêle-mêle on pourra dire que le meilleur ami à qui on avait pourtant promis que « hey amigo on ne va pas crever ici, ça non » et bien il finit par mourir, que le héros il est badass mais juste ce qu’il faut tu vois, il se fait quand même bien démonter le portrait et ce à plusieurs reprises.
Sans doute pour renforcer le côté « en bas on en a gros », le pourri du coin à établit son camps et fait passer de manière clandestine des Terriens afin qu’ils aillent se faire exploser le bulbe dans les étoiles. Pourri qui s’avérera finalement être… franchement sympa, puisqu’il aide Damon tout du long alors qu’il est censé lui en vouloir. Quand je vous dis facile.
Histoire de continuer de creuser sa tombe, Elysium emploie la bonne grosse corde de marin de la promesse faite quand les protagonistes étaient jeunes, nous offrant au passage des plans gentiment coulant de niaiserie de deux enfants courant dans les rues des bidonvilles.
A ce moment-là, tu réalises que la mention « d’après une idée originale de » a franchement rien à foutre dans le générique de fin.
« Allez viens, moi je suis le gentil, lui il fera le vilain et toi t’es la méchante présidente ! »
Autres noms affichés comme autant de promesses, Jodie Foster et Matt Damon sont censés porter le film à bout de bras. Le souci demeure que lorsque le scénario est écrit avec les pieds lors d’un soir de cuite et que la mise en scène relève du jeu de bac à sable il est dur d’exceller, tout nommé à l’Oscar que l’on puisse être. Ainsi, Damon ne fait que deux choses : courir comme un perdu et s’évanouir… pour se réveiller et se remettre à courir comme un perdu. L’histoire ne devient qu’un prétexte à une course poursuite des plus rasoirs entre Matt et Sharlto « Chuck Norris » Copley (la ressemblance est pire que troublante). A noter que notre vilain pas beau étant tellement hargneux que même lorsqu’une grenade vient lui exploser gentiment la mâchoire (et a peu près tout ce qui constitue son visage d’ailleurs), le cerveau de ce dernier reste intact. Con comme ses pieds mais solide le bougre !
Quant à Foster elle est confondante de médiocrité, ne parvenant qu’à plisser le nez d’un air dégouté tout au long des 4 pauvres scènes où elle apparait avant d’aller se faire éclater la carotide par l’ami Chuck qui vit assez mal l’intensité des opérations chirurgicales subies.
Au final on se retrouve avec le talent de trois enfants dans leur jardin, à première vue c’est plutôt mignon mais à y regarder de plus près c’est affligeant. A 200 millions le film, on ne bénéficie même pas du privilège de pouvoir mettre un coup de pelle aux acteurs, triste.
« Y’a plus d’SF ma bonne dame, moi j’vous l’dis ! »
Elysium est malheureusement le reflet de la SF depuis 10 ans, les idées s’accumulent, les projets se multiplient mais pour n’aboutir que sur des demies-histoires. Des bribes de Bradbury par-ci, un bout d’Huxley par-là, le tout sur rythme de Fast and Furious. Quand on aura compris que la SF ce n’est pas ça, peut-être fera-t-on une avancée. Si la direction artistique et la photographie sont admirables, elles ne suffisent à sauver le film de son naufrage. A l’instar d’Oblivion et de son scénario en carton-pâte, Elysium ne convainc pas une seconde malgré un rythme dopé au Redbull et une histoire qui se veut touchante et engagée. Amis journaleux, pour la lutte des classes on repassera. Dommage.