Lui : à moitié marginal sans emploi, castagneur et ancien boxeur amateur, se retrouve avec son gosse de 5 ans dans les pattes. Il a déjà du mal à s’occuper correctement de lui. Il débarque donc sur la Côte d’Azur chez sa sœur. Elle peut s’occuper de son gamin et aussi le pistonner sur un job pour trouver de la stabilité.
Elle : gracieuse, bien dans sa vie et mordant la vie à pleines dents, se retrouve amputer des 2 jambes par un orque qu’elle dresse au Marineland d’Antibes.
A égalité, ces deux font office d’accidenter de la vie. Durant 2 heures, on va assister à la reconstruction de 2 êtres détruits. Audiard fait partie de ces réalisateurs rares et rigoureux ; chaque mot, chaque son, chaque mouvement de caméra alimentent son univers : un orfèvre. Dans ce film poignant, aucune scène n’est inutile, même les temps morts et les silences sont pleins de sens. Il capte aussi formidablement les morceaux de vie pour donner une véritable atmosphère où les émotions et les sensations sont au cœur du film. Pour arriver à cela, il n’hésite pas à mettre le spectateur au plus près des comédiens avec des plans serrés fréquents.
Et puis, il y a ces deux personnages abimés par la vie. « Du brutal » chez lui comme dirait Audiard Père, mais tout comme elle, une humanité énorme soit cette carapace. Il est « opé » pour la ramener à la vie : relations sexuelles pas par hygiène et ni par pitié ; juste pour la beauté du geste… pour la tendresse, la belle attendra. La belle, elle, à chaque scène fait abstraction de son handicap et reprend une vie normale ; on finit même par oublier son handicap.
Et puis la scène finale ; quelle peur qu’Audiard cède à la facilité et au tire larme… mais que néni, là encore en maestro, il nous donne à voir la renaissance de la brute épaisse par un « je t’aime » émouvant. Matthias Schoenaerts a bel et bien mérité ses prix et son César.
Définitivement conquis par Audiard, la semaine prochaine, je rattrape mon retard avec le seul Audiard non visionné à ce jour : « Sur mes lèvres ».
Serge Kaganski dans les Inrock’ : « De rouille et d'os est un film impressionnant de maîtrise, d'intensité et, finalement, de simplicité. (...) chaque plan est impeccablement composé, éclairé, découpé tout en restant au service du récit et des personnages. Car la plus large part de réussite du film tient dans les personnages, donc les acteurs : leurs corps, leurs phrasés, leurs interactions, leurs regards, leur palette de sentiments. »
A voir absolument