Ils avaient prévenu, les frères, qu'il voulaient faire "un western à l'ancienne, dans la plus pure tradition du genre", lors de la Mostra de 2008, et ils ne nous avaient pas menti.
C'est une résurrection que subit le grand western américain, véritablement. Crasseux, poussiéreux, vaste, l'Ouest américain est tout simplement beau lorsqu'il est filmé comme ça, et on ne peut qu'avoir le souffle coupé lorsque la ville, après le départ d'un train, apparaît à l'écran. On ne peut s'empêcher de penser à l'esthétique de Leone lors de ce plan large, rappelant l'arrivée de Claudia Cardinale dans Il était une fois dans l'Ouest.
Ici, pas de Claudia, mais une jeune fille en deuil, Mattie Ross - campée par la révélation Hailee Steinfield, nommée à l'Oscar, très juste, et qui tient tête au grand Jeff Bridges et surclasse ses autres partenaires -, dont le père vient d'être tué... Mais bien loin d'être éplorée, elle n'a qu'une seule chose en tête, la vengeance. Pour cela, elle engage le Marshall Cogburn - un Jeff Bridges qui connait une nouvelle naissance cinématographique, les projets, les bons projets se suivent, ici, il est impérial - imbibé de Whisky du matin au soir, borgne, cynique mais réputé pour avoir du cran, d'où le True Grit du titre.
Dans cette course à la vengeance, ils croiseront également un Texas Ranger - un Matt Damon en petite forme qui se fait bouffer dans chaque scène par ses partenaires. A sa décharge, le rôle en lui même n'est pas bon - et, bien sûr, le fameux Tom Chaney, le tueur - un Josh Brolin un peu hésitant dans sa cruauté -, celui par qui l'histoire débute...
S'il ne fallait ne retenir qu'une chose du film, ça ne serait pas les acteurs, ni l'histoire, trop classique et dotée d'élément trop prévisibles, mais la photographie et les décors. Comme dit plus tôt, l'Ouest n'a jamais été aussi beau, que ça soit la ville au début du film, ou les décors naturels de l'Oklahoma, tellement magnifiques que certains plans vous hérissent véritablement les poils et restent collés à la rétine pour longtemps, c'est visuellement que ce long-métrage est grandiose. Au niveau photographie pure, c'est aussi du grand art, des champs / contre-champs sans fausses notes, des plans larges qui donnent envie d'y être, des alternances de plans géniales, que ça soit de plus en plus près pour découvrir Bridges, ou lorsque Mattie veut mettre la pression au détaillant en coton, l'effet est garanti...
Le seul bémol, c'est que justement, les Coen ont voulu faire un Western classique, si classique qu'il présente les mêmes défauts que ses modèles, à savoir une tendance à l'essoufflement sur la fin et un manque d'originalité dans quelques moments censés apporter du suspense. On se surprend à être un peu déçu à la fin, bien qu'il n'y ait pas vraiment de raison, sinon que, connaissant les frères, on avait imaginé, envisagé, une petite touche personnelle. Un grand western moderne, certes, mais on à beau se rincer la bouche, le goût de trop peu ne part pas...