Une impression de déjà-vu nuancé. Certes. Mais pas une mauvaise impression pour autant.
L'exercice de style gagne en efficacité technique. L'écriture de Let Me In est plus resserré, rythmé et maitrisé. Mais en même temps, le film est aussi plus compact, lisse, superficiel. Plus accès sur le divertissement brut. Ce qu'il gagne en homogénéité, il le perd en respiration et en malaise. Mais avec plus d'argent, de savoir faire et d'expérience. Un casting plus aguerri. Une mise en scène plus varié et moins statique. Les longues plages atmosphérique de silence presque vide, laissent place à une musique symphonique qui vous prend constamment la main.
Et il n'en fallait pas plus pour transformer l’œuvre singulière, candide, glaciale et morne de Thomas Alfredson, en un chaleureux petit bis classique et hollywoodien. D'un regard d'auteur centré sur le social, la solitude et son aliénation, on passe à un autre plus standardisé, simplifié et tourné vers le romantique. Let Me In est plus clairement une histoire d'amour, là où Morse mettait plus en avant la toxicité de cette codépendance bien glauque.
Après, dans la mesure ou je n'ai pas lu le livre dont on a tiré les deux films, je ne saurais juger objectivement de l'adaptation de Matt Reeves. Mais une chose est sure, par rapport à Morse, il a été effectué un certain travail d'élagage, de substitution ou d'amélioration de parties jugé superflu, faible ou simplement fade. Tandis que beaucoup d’autres passages, en revanche, ont l'air parfaitement copié-collé du premier film, avec des effets de manche identique et des dialogues semblable au mot prêt. Mais viennent-ils vraiment de Morse, ou ont-ils été simplement reprit tel quel du livre ?...
Des personnages annexe ont plus ou moins disparu du cadre narratif. Du spectaculaire léché et ronronnant a été rajouté. Et si d'un coté, cette version gagne beaucoup par rapport à son ainé, d'un autre, pas mal a aussi été perdu. Comme certains paroxysme d'intensité émotionnelle, de tension, de ressenti de la violence ou même de grâce immense, qui étaient accentué par le contraste avec les phases calme, désœuvré et dépressive de Morse. Morse contient aussi plus de séquence aussi sublime qu'inoubliable. La photographie y est d'ailleurs plus raffiné que dans Let Me In. Et pourtant, globalement, Let Me In est plus régulier et ambitieux dans la qualité de ses plans. Et si l'ennui est moins présent dans Let Me In, avec sa disparition, une bonne dose atmosphérique de poésie mélancolique est aussi parti. Let Me In est moins ancré dans le réel que Morse. Mais il parait aussi moins grotesque et pataud.
Bref, pour moi, ces deux films miroir sont vraiment à voir. Et si possible l'un à la suite de l'autre. Les deux ont leurs défauts et leurs qualités, parfois en commun. Mais à mon sens, aucun ne prend vraiment complétement le pas sur l'autre. Par contre, si vous êtes un spectateur facile, il est préférable de voir le film de Alfredson avant celui de Reeves. Sinon vous avez de fortes chances, de trouver injustement Morse globalement moins bon, alors qu'il est surtout volontairement moins abordable. Ce n'est pas mon cas. Longue vie à la Hammer. 3/5 d'une subtile variation sur le même thème.