Troisième adaptation d’un roman d’Agatha Christie par Pascal Thomas, «Le crime est notre affaire» (France, 2007) aborde encore l’atmosphère si britannique de la romancière sous l’angle de la dérision. Reposant en grande partie sur le jeu du duo André Dussollier-Catherine Frot et du reste de la fameuse distribution, la réussite du film tient aussi au soin apporté par Thomas aux costumes aux décors. Plongé dans l’atmosphère surannée des vieux manoirs aristocratiques, obtenu notamment grâce à la photographie de Renan Pollès, le film déploie une vision humoristique de l’enquête policière. Mené par un couple dont le personnage de Frot signale qu’il «sent le vieux», l’enquête apparaît comme le souhait exaucé de repartir en enquête. En constituant la trame du film comme l’accomplissement d’un désir d’aventure, Thomas assimile frontalement les deux protagonistes aux spectateurs. Comme le spectateur, les Beresford ne sont là que pour jouir des évènements rocambolesques. Tandis que Prudence s’enthousiasme devant les péripéties policières, Bélisard fait montre de plus de retenu. Entre euphorie et crainte, Thomas résume la double émotion ressenti par le spectateur face à une intrigue meurtrière. L’allégresse générale, soutenue par l’emploi contrapuntique des musiques de Reinhardt Wagner, donne au film le ton d’une comédie. Sans le prosaïsme d’un Audiard ni l’esprit potache des parodies américaines, Thomas prend garde à rester dans la justesse. L’humour, flirtant parfois avec une certaine préciosité de l’irrévérence, demeure dans un cadre très bourgeois. Peu enclin à concevoir son film comme un instant esthétique ou épris d’un certain amour de la forme, Pascal Thomas préfère réaliser une sage adaptation en y incluant l’humour qui fît le lot de ses précédents films. Par là, il y a bien un geste d’appropriation et donc d’interprétation. «Le crime est notre affaire», comme l’entend le titre, travaille à faire d’une enquête criminelle l’affaire de Thomas comme des spectateurs.