S’il vous est commun de palper de près ou de loin le monde du cinéma, vous avez forcément déjà entendu parler de ce film tant ovationné, Palme d’or 1966, symbole du cinéma français, ou même déjà fredonné sa magnifique musique en accolant côte à côte des « da ba da ba da, ba da ba da ba », le tout l’esprit guilleret de romantisme. « Un homme et une femme », c’est l’histoire de Jean-Louis et Anne, deux veufs qui se rencontrent et s’éprennent l’un de l’autre. Débute alors une histoire d’amour tumultueuse et d’un époustouflant réalisme, omettant les stéréotypes cinématographiques et privilégiant l’aspect dramatique de la vraie vie.
Indéniablement, c’est une découverte mitigée car le film est couvert de défauts qu’il me serait impossible de taire ici, mais dans le même temps, on en ressort si attendri et émerveillé que je me dois de ne pas être trop rude.
Je commence par les défauts qui occupent selon-moi une trop grande place dans une œuvre qui semble parfois ne jamais s’achever. C’est une contemplation, un enchaînement de plans liés par une histoire d’une simplicité déconcertante. J’aime les silences et je salue l’audace de les faire exister au cinéma, mais ici, ils sont si nombreux qu’ils finissent par ne plus rien raconter. Pour faire un bon film, il ne suffit pas de nous mettre à la suite de belles images et de jolies musiques, il faut un fil conducteur qu’on suit aveuglément, chose essentielle mais trop souvent absente ici. On passe d’interminables minutes à suivre les courses automobiles de Jean-Louis et tout autant à virevolter auprès de la mélancolie d’Anne, le tout dans une succession de vues aux couleurs changeantes. Je n’ai pas saisi l’intérêt de mettre cette image lunatique en scène car elles ne correspond ni à une époque, ni à un sentiment. Tout cela emmène des longueurs et c’est dommage.
Toutefois, le film se pare aussi de qualités. La principale est sûrement la réalisation de Claude Lelouch qui use de l’image comme un maître, avec une précision photographique et un œil qui décèle les harmonies filmiques. Chaque plan est une respiration, que le réalisateur nous emmène sur la plage à Deauville, dans les rues de la ville où a travers la campagne. Il filme les corps avec un respect et une religiosité admirative, se complaisant dans un beau silence. Les acteurs sont excellents et nous font comprendre en un regard l’émotion de leur rôle, c’est pétillant. Les musiques de Francis Lai sont tout bonnement géniales et restent en tête des jours durant, une fraîcheur romantique qui fait du bien. Ma mention spéciale va cette fois à la scène durant laquelle Jean-Louis, seul au volant de sa voiture, veut rejoindre Anne et se met à songer dans la nuit. Il établit les scénarios de leurs retrouvailles, tentant de prévoir leurs réactions, c’est si vrai. Enfin, la romance est réaliste, dénuée de tout rajout : on se projette dans cette aventure, propulsant nos propres réflexions et concluant comme le héros que « Je n’ai aucune psychologie féminine ».