Largo Winch
Un film de Jérôme Salle
Cela fait près de vingt années que l’héritier du groupe W -consortium multinational aux ramifications tentaculaires- nous fait courir derrière lui. Dans son sillage, une avalanche de péripéties, qui n’ont rien à envier à l’agent secret le plus médiatisé de sa Majesté.
007 n’a en effet qu’à bien se tenir, le vagabond le plus célèbre de la bande-dessinée est lâché sur nos écrans. Et il est dans une forme éblouissante. Son père, Nerio, était l’unique actionnaire et richissime propriétaire du groupe W. Il est retrouvé mort, noyé, sans descendant. Mais si Nerio n’avait officiellement pas de famille, il cachait un petit secret, loin, à l’abri. Trente années auparavant, il avait adopté un petit garçon, Largo, dans un orphelinat bosniaque. Largo a grandi, depuis, et se retrouve désormais orphelin, tout en étant susceptible de prendre la direction de l’empire bâti par son père, puisque unique héritier. Ce qui pourrait déplaire à certains.
Mais voilà, Largo a d’autres préoccupations, car il croupit dans une geôle d’Amazonie suite à une accusation de trafic de drogue.
Simple coïncidence ? Dans ce cas, le hasard ferait bien les choses, en faisant le jeu des hommes de l’ombre, ces intrigants de Conseil d’Administration aux dents longues. La route de Largo Winch sera sinueuse, parsemée d’embûches, chaque obstacle n’ayant qu’un seul but, décourager le jeune orphelin d’accéder à la place qui est la sienne, à la tête du groupe W. Les fans du personnage créé par le dessinateur Philippe Francq et le scénariste Jean Van Hamme seront ravis. Le film éponyme les promènera au cœur d’une histoire qui fait la synthèse des premiers tomes de la saga (on en est déjà au seizième album ! ), tandis que les autres participeront à une quête haletante comme on en voit rarement dans le cinéma français, souvent trop frileux pour courir le risque d’une telle production, en se donnant les moyens financiers d’y parvenir.
Jérôme Salle avait déjà concocté un petit film aux nombreuses qualités. C’était Anthony Zimmer, en 2005, avec Yvan Attal, Sophie Marceau, Sami Frey et Gilles Lellouche. Trois années plus tard, il revient avec un second film, qui confirme les points forts constatés auparavant. Largo Winch fait partie de ces films qui ne se limitent pas à mettre en valeur l’une ou l’autre vedette au milieu d’une débauche d’effets spéciaux, mais essayent de communiquer autre chose que la simple surprise liée aux prouesses de la technique.
Au-delà d’une banale histoire d’argent –de très très grosses sommes, il faut en convenir- le film nous fait partager le parcours chaotique d’un être déraciné. Le mystère qui plane sur ce mystérieux héritier est vite levé, les décors et son histoire sont plantés dès les premières scènes. La mort de Nerio sème immédiatement la panique au sein de son groupe. L’arrivée de cet héritier venu de nulle part permettra au metteur en scène de filmer des scènes d’action réalistes, pas excessivement spectaculaires, mais d’autant plus savoureuses. L’ensemble de la distribution, de Kristin Scott Thomas à Gilbert Melki, en passant par Mélanie Thierry et Anne Consigny, suit la performance de Tomer Sisley dans le rôle-titre. Au final, Largo Winch s’avère un film à grand spectacle parfaitement maîtrisé, doté d’un petit supplément d’âme, et de malice, qui nous fait espérer une suite encore plus enlevée, avec un visage désormais familier, puisque le héros devrait reprendre les mêmes traits…