L'histoire d'un candidat à la présidentielle, vue d'un intérieur feutré qui est loin des émissions sérieuses ou divertissantes.
J'y allais un peu à reculons, la bande annonce étant un peu simpliste, et le sujet principal ne m'intéressant guère, et j'avais tort.
Comment Arestrup a eu l'idée de se lancer dans un projet pareil, mystère, mais il faut bien que le politiquement correct et les jeux en haut lieu commencent à dégoûter beaucoup de monde pour en arriver à un film pareil.
La première objection est que le choix de la France n'est pas forcément bien représentatif, car dans les détails, c'est plutôt l'Angleterre et les USA qui sont visés. Les hommes politiques bien de chez nous ne roulent pas en Jaguar et autres Mercédès.
Ensuite, tout est trop bien huilé pour être « vrai ». Mais ce film fait élégamment l'impasse sur le « vrai » populaire ou logique pour ausculter le dessous des cartes, celles qui se donnent entre hommes d'influence où la logique dépend de sommes colossales qui ne permettent plus de raisonnements humains.
Et c'est là que ce film devient superbe. L'intrigue est bien vue, tout concorde, rien n'est parfait, ça transpire l'expérience, l'élégance, la subtilité, la violence sourde des gens « biens ».
Le jeu de Attal est définitivement l'un des meilleurs des acteurs français actuels. Même si le film était râté, il l'aurait sauvé in extrémis. Et la panoplie de seconds rôles fatigués autant que laids correspond parfaitement au milieu politique qui n'a rien du glamour d'Hollywood, malgré ce qu'essaye de nous faire croire Paris Match ou TF1.
Le côté démonstratif des trucs et ficelles des médias pour rendre populaire un candidat est un peu moins prenant, puisque la TV fait de moins en moins d'effort pour se cacher, tellement son égo lui donne envie de se montrer sous toutes ses coutures. Mais c'est une facette nécessaire du film. Qui explique pourquoi tant de gens intelligents décident un jour de ne pas venir en politique ou de la quitter.
Le côté extrêmement machiste dans les faits a aussi son importance et le scénario ne fait rien pour en parler, il le montre, c'est suffisant.
La musique, la photo sont enfin d'un très haut niveau.
Quand au script, en dehors de quelques hésitations sur les flash back qui déstabilisent pour rien, tout est dans un rythme feutré, pas du tout lent, qui prend simplement le temps, et qui accélère quand il le faut. Nous sommes dans le domaine de la parole et non de l'action. Encore faut-il rendre justice à Arestrup d'avoir concocté quelques scènes d'action nous empêchant de sentir l'ennui poindre son nez.
Malgré une maîtrise surprenante pour un premier film, je ne met pas la note du Chabrol, où la perfection de la direction du jeu des acteurs, la fin « réelle » et l'impression d'être un peu chez soi avec les habitudes d'un grand cinéaste font que « l'ivresse du pouvoir » garde une petite longueur d'avance sur « Le candidat ».
Mais chapeau bas à Arestrup pour ce coup de maître innatendu. Qui pourrait se faire poser beaucoup de questions à bien des jeunes « fonctionnaires » du cinéma français actuel, face à leur peu de talent.