Deux ou trois fois, la caméra se pose, laissant un peu d’air entrer dans ce film au rythme effréné, comme si le réalisateur avait peur du vide, comme si le besoin de mouvement et de liberté apparente estompait tout contraste. Pendant ces instants de calme, on sent qu’il aurait pu se passer autre chose, une sorte d’épopée, une légende en marche…
Mais la machine à broyer toute velléité de contemplation repart à chaque fois, et la déception grandit au fur et à mesure. Pourtant, l’histoire d’amour entre le truand au grand cœur et la fille de bonne famille valait mieux que cette succession de scènes attendues et finalement convenues. Trop vite, le scénario délaisse le couple maudit pour s’attacher aux splendeurs et déboires de cette bande de copains, attachants malgré leurs méfaits. Mais au final, on en sait peu sur leur histoire, on cherche des repères, les pourquoi et les comment sont insuffisants et ce manque d’explications n’est pas compensé par une ambiance prenante, par quelque chose qui basculerait du côté de la légende, comme une sorte de Bonnie and Clyde, auquel il est fait allusion, en vain.
La déception est importante car il y avait pas mal d’attentes autour de ce film qui outre son aspect "gendarmes et voleurs", avait sur les années 80 un potentiel social et politique fort, d’autant que la période est encore peu exploitée dans le cinéma français. Il y avait aussi trois acteurs aux personnalités contrastées. Vincent Elbaz, énergie énorme, charme incontestable, mélange de gouaille et de classe à la Depardieu, pas vraiment utilisé. Sami Bouajila, vraie gueule de cinéma, capable d’imposer une présence par un regard, froideur effrayante ou intimité chaleureuse. Et la petite actrice qui monte, qui monte : Clémence Poésy, concentré d’émotions au début du film, puis pas vraiment aidée par les différents aspects physiques qu’on a voulu lui faire prendre.
On attend donc avec un espoir plus important encore un autre film de truand hors normes, celui-là plutôt années