Rarement, un film n'aura dépeint la vie des exclus avec une telle force.
Une jeune fille est retrouvée morte de froid dans une tranchée, sur un chantier, en plein hiver. Partant de ce constat, en voix off, Agnès Varda nous propose de relater les derniers mois de vie d'errance de cette sdf qui se prénomme Mona. Et elle va le faire très habilement, En ponctuant son récit par divers témoignages de personnes qui ont croisé Mona dans son itinéraire. elle va lui donner un aspect quasi documentaire. Elle va aussi éviter de tomber dans le pathos.
Mona n'est pas sympathique avec les autres. C'est un animal écorché qui ne cherche qu'à survivre. Même quand on lui propose un embryon de vie sociale, elle finit par envoyer tout bouler. Sa vie, c'est no future. Pourtant, une scène, très touchante, nous révèle une profonde humanité chez Mona. Lorsqu'elle garde la mamie, et qu'une grande complicité unit les deux femmes. C'est la seule fois où on la voit joyeuse.
Quant aux autres protagonistes de rencontres, surtout chez les hommes, les comportements vertueux brillent souvent par leur absence.
En nous livrant une œuvre puissante et sans fard, sur le quotidien des laissés pour compte de notre société, sdf ou travailleurs immigrés, Agnès Varda nous assène un énorme coup de poing à l'estomac. Et on n'en sort pas indemne.
Gardons le meilleur pour la fin. C'est Sandrine Bonnaire qui interprète Mona. Où plutôt, elle ne l'interprète pas, elle EST Mona. Eblouissante de justesse. Dans sa démarche, dans ses regards, dans ses colères et ses révoltes, et même dans sa façon de manger des sardines. Du Grand Art.
On l'aura compris. Sans Toit Ni Loi est un film essentiel.