Etrange, mystique, le film de Jodorowsky nous entraîne vers un univers impitoyable et sadique, l'intrigue suit scrupuleusement la chronologie du protagoniste. Cet homme incarné par le réalisateur lui-même commence par une vengeance personnelle. Il est accompagné d'un enfant dont l'origine de sa présence avec lui se révèle purement dans le sens de la création. Le réalisateur place son personnage en plein dix-neuvième siècle, époque où violer et tuer constituaient les principales occupations de l'homme. Le moins que l'on puisse affirmer, c'est que cette aventure, oscillant entre le fantastique, l'horreur et le western, adresse au spectateur des thématiques qui collent parfaitement à notre réalité. En premier lieu, le réalisateur montre son personnage de façon péjorative dans le sens où ce sont principalement ses défauts qu'il met en valeur. Dans cette première partie, il est un barbare, un sanguinaire, un combattant, un cupide, un sadique, un profiteur, un opportuniste et surtout il abandonne son enfant aux mains des moines. Il ne respecte donc qu'une seule morale propre à lui-même: profiter de tout à tout instant. Il ne se pose pas de questions, il n'éprouve aucun remords pour les actions horribles qu'il met en oeuvre, il tue avec sang-froid, il tue avec lâcheté tout cela parce qu'il désire impressionner une femme qu'il a sauvée des griffes d'un groupe d'hommes ennemis. Le réalisateur montre également les femmes comme des arrivistes, des capricieuses, des jouisseuses. Autrement dit, Jodorowsky dresse un portait au vitriol de l'âme humaine chez les deux sexes. Dans une seconde partie, on assiste à d'autres valeurs et d'autres horreurs. Le film ne précise pas combien de temps sépare la mort et la résurrection en tant que Saint du protagoniste. Cette seconde partie dénonce la bêtise des hommes et des femmes d'une ville qui s'est bâtie entre-temps. Les humains croient en une divinité qui leur assure longue vie et bonheur, cette croyance, cette secte s'oppose avec le catholicisme puisque un moine intervient pour imposer sa doctrine et pour retirer une partie de la méchanceté et de la violence des habitants. Le réalisateur veut donc montrer que les humains sont esclaves de leur croyance et de leurs principes de morale puisqu'ils cherchent à tout prix une façon d'expier leurs crimes en étant pardonnés à chaque fois dans un monde sans foi ni loi. Jodorowsky critique les sectes, l'Eglise, il affiche également de façon très claire que les hommes comme les femmes ne tolèrent pas la présence d'une invasion étrangère. La haine et l'égoïsme sont le propre de chacun et ces sentiments ne sont pas réservés au vingtième ni au vingt-et-unième siècle, le réalisateur démontre clairement que le racisme et le rejet des autres ont toujours été les principaux défauts de tout le monde, chacun a essayé de voiler cette vérité d'une façon ou d'une autre. Les valeurs de tolérance depuis 1945 enseignées aux enfants ne servent à rien. L'homme est raciste, il est violent, il est assassin, il est moqueur. De nos jours, qui peut prétendre le contraire? Qui peut déclarer sans hypocrisie qu'il a toujours accepté les autres, qu'ils les a toujours accueillis chaleureusement, qu'il n'a jamais éprouvé le moindre sentiment de haine envers qui que ce soit? Personne ne peut honnêtement se déclarer tel quel. Au final, Alejandro Jodorowsky rédige, réalise et signe une analyse parfaite de l'ensemble de la population, un chef-d'oeuvre profond et indispensable!