Voilà ce qu’on appelle un classique, un vieux film qui n’arrive pas à se démoder, bien que la pellicule elle, vieillit, mais pourquoi il ne vieillit pas le film ? Sûrement parce qu’il y a du fond, et du bon. Cela va plus loin que la simple satire antimilitariste annoncée. Déjà le décor planté est complètement abstrait, ça pourrait être n’importe où, là c’est supposé être en Corée. Les deux médecins qui sèment la pagaille dans le camp, semblent ne se soucier que d’une chose, prendre la vie du bon bout, et détestent la hiérarchie et la discipline. Le tour de force est d’arriver à ce niveau de dérision sans tomber dans le film « comique », où le film donneur de leçon. Ce ne sont pas des héros, ils ne sont pas parfaits mais parfaitement égoïstes et individualistes. Les gags sont du pur troisième degré, et le comique de situation. Ainsi ce haut-parleur qui intervient à intervalles réguliers comme un gimmick (gag génial), pour annoncer le menu du jour à la cantine, le film à l’affiche du soir, ou pour passer du rockabilly japonais, complètement décalé au possible. Ce haut-parleur est un personnage à part entière, qu’on le tienne pour dit, en gros plan comme un acteur qui montre son meilleur profil.
Le sang gicle seulement des sutures au bloc opératoire, seule chose qui nous rappelle que c’est la guerre. Pour tuer le temps et tromper la mort, on se fait les infirmière, on boit, on ridiculise l’autorité, et tout le monde semble contaminé par cette folie douce. Si ce n’’était la bêtise confondante des gradés on pourrait dire qu’il est à côté du sujet, mais non. Et ce morceau qui sonne comme un chant "flower ", mélancolique et funeste : «Suicide is painless », à chanter avec le sourire pour que ça marche.
L’histoire prend le pas sur les personnages, il y a ces deux camps qui se détestent et qui organisent un match de football, pour régler ça sur le terrain, et on se croit tellement aux states, qu’on en oublie le contexte du film, la boucherie qui se déroule pas loin. Le tout non séduisant au possible, vestes militaires, tenues de camouflages, jeep, tentes, et ça semble être tourné en lumière naturelle, pour faire plus sale, plus reportage sur l’arrière du front. L’histoire prend le pas sur la forme, heureusement c’est subtil et intelligent, peut-être trop, certains pourraient passer à côté. Belle leçon de cinéma.