Plus de 2 ans après son excellent Audition, Takashi Miike réalise ce drame glauque avec une enveloppe de 7 millions de dollars. Filmé en caméra digitale, Visitor Q est une charge virulente contre la société japonaise et les individus qui la composent. Articulant sa diatribe autour d'une famille désunie, le réalisateur s'essaie au chaos pour réveiller les consciences et, dans un optimisme salvateur, parvient à insuffler de l'espoir. Autant le dire, Visitor Q est à déconseiller aux âmes sensibles. Miike, cinéaste aussi dur que doué, ne s'embarrasse guère de douceur. Son oeuvre est sans concession, malsaine, folle, dérangeante et...pleine d'amour.
Kiyoshi vit dans une famille originale. C'est la violence qui dicte la vie de ce cocon corrompu. Sa femme, Keiko se fait battre par leur fils Takuya. Lui-même battu par des gars de son âge. Et leur fille, Miki se prostitue. On vit comme on peut. Bientôt un visiteur s'impose dans cette maison...
'Il faut être sacrément malade pour réaliser de tels films'. J'entends déjà la sempiternelle remarque, agaçante, qui oublie que le cinéma est un art. Si il s'attaque au réel, si son désir est de donner l'illusion du vrai, c'est que l'homme l'a mérité. Visitor Q n'égratigne pas, il caresse violemment jusqu'à ce que la peau soit à vif. D'abord, il traite de thèmes tabous (inceste, prostitution, violence...) puis il s'acharne volontairement sur la cellule familiale. Cette phrase au début, sale et gênante, ces séquences amplifiant la monstruosité ou cette fausse placidité qui nappe le film font de Visitor Q une oeuvre entre l'abomination et la témérité. Heureusement que le climat surréaliste vient apaiser le ton froid et que cette métaphore finale, de la mère nourricière, et partant de la patrie, forment un contraste saisissant. 3,5/5