L'histoire d'un gars qui aurait mieux fait de se casser une jambe le jour où il a fait correctement son métier.
Vu sous cet angle, le résumé ne permet pas d'y voir très clair, mais je trouve que le vrai script, l'histoire d'une folle (érotomane) à enfermer, est trop facile et réducteur.
Pour les amatrices de Melki, autant le dire tout de suite, on ne le voit pas tellement, et il n'a pas la pêche des grands jours, puisqu'il a le beau rôle, presque lisse, bien rasé, qu'on ne lui voit guère dans le cinéma et qu'on imagine mal dans la vraie vie.
Consigny est carrément absente, mais excellente.
C'est clair, le sujet, c'est Isabelle.
Pour les amateurs de Carré, bonne nouvelle, tout le film est basé sur sa tête, son nez, sa poitrine et ... ça suffira amplement. Comme dans « l'avion », une bonne partie des trentenaires réalisateurs semblent sous le charme de ce visage si esthétique, à la fois enfantin, banal et décidé. Ca tombe bien, le film décrit une femme entre deux âges, à la fois jeune fille et adolescente caricaturale dans un corps de femme mûre.
Je la trouve parfaite dans son genre, elle n'en fait pas trop, et on peut même dire que son physique et son minois se confondent parfaitement avec le sujet, sans parler de ses fringues de vieille fille de campagne, l'horreur absolue à fleurs qui accompagne à merveille la caricature de nana à problèmes.
Le film s'attaque à toutes les institutions, la psychiatrie, la police d'une certaine manière, mais aussi la religion d'une façon assez originale. On peut résumer une des scènes finales en disant que seuls les simples d'esprit peuvent se satisfaire des dogmes, et que pire encore, les dogmes de droit divin les enferment dans une spirale qui les empêchent de grandir pour affronter les réalités et s'adapter au monde tel qu'il est.
En fait, l'originalité marquante du film, c'est qu'il est bien filmé.
La photographie est remarquable parce que maîtrisée et esthétique, mais pas seulement, elle s'adapte en plus aux sujets.
Quand Isabelle pête les plombs, elle devient toute petite dans un monde trop grand ou trop adulte.
Quand on voit une scène d'action, la caméra prend de la hauteur pour montrer la simplicité de la violence, puis retourne à la hauteur humaine pour voir l'explosion de la folie des êtres.
Enfin, les moments d'introspection sont carrément sublimes. On est en plein format sur le visage de Carré qui cherche une chose que l'on ne peut décidément pas trouver à sa place. C'est cette proximité voyeuriste qui donne du sel au jeu de l'actrice.
Ce qui fait que l'on ne s'ennuit pas, c'est la gêne d'imaginer le pire qui va arriver à la suite d'une scène déjà éprouvante. Et le film est hélas trop basé sur ce système. On aurait pu imaginer plus d'action ou de psychologie décrivant les autres personnages par exemple. On a que des faits.
On reste à la surface du problème, ce sont juste des pistes pour faire peur au grand bourgeois, seule la grammaire nous change de tous ces films puritains, ici, on touche à la folie qui attaque, pas à l'adultère qui moralise.
Mais c'est de toute façon le film d'un réalisateur qui maîtrise son sujet et ça change.