Il était assez prévisible que les critiques soient partagées entre ceux qui ont adoré et ceux qui ont détesté. Webb se démarque beaucoup de Raimi, c'est indéniable, et ceux qui ont détesté ont tendance à sortir l'argument "On a été habitués à autre chose, là c'est différent, donc c'est nul" ou "c'est du déjà vu on s'fait chier". Mais si c'était Webb le premier à avoir adapté Spidey en film, ce genre de critiques se serait très sûrement appliqué dans le sens inverse.
Pourtant, après avoir vu et revu les 4 films, je pense que les deux réalisateurs ont mutuellement leurs points positifs comme négatifs. Fan de Spidey, des comics et des DA étant gamine, voir un de mes super-héros préférés à l'écran est toujours un réel plaisir, et je trouve que Webb et Raimi ont réalisé du bon boulot, mais différemment. Développons :
Raimi a eu l'idée brillante de nous rendre beaucoup plus proche de Spidey, en privilégiant l'émotion et l'aspect humain de Peter. Mais cet avantage était aussi son défaut. Il s'étendait parfois un peu trop, et parfois mal. On a parfois droit à des scènes ridicules (cette scène où Peter essaye de devenir le beau gosse racaille dans le 3, par pitié faites qu'elle n'ait jamais existé ; ou encore celle où il
redevient "normal" et se casse joyeusement la gueule sur un fond de musique niais avec Raindrops keep falling on my heart) ; et beaucoup, beaucoup trop fleur bleue. Le plus lourd et redondant, c'est bien M.J, le fond éternel et chiant du scénario, le plus gros défaut des 3 Spider-man. La fin est toujours la même: dans le 1, le 2 et le 3, elle se fait kidnapper, elle hurle à s'en arracher les poumons tout le long, Spidey la sauve en manquant de se faire tuer et tout est bien qui finit bien.. pour recommencer plus tard. Pour ça, Raimi manquait cruellement d'originalité. Espérons que Webb ne fasse pas la même erreur, Gwen ayant un rôle déjà beaucoup plus intéressant et audacieux.
Quant aux effets de spéciaux, ils étaient bien utilisés et les scènes de combat (le train dans le 2, le combat final dans le 3) très bien menées. Raimi restait appréciable et savait miser sur pas mal d'effets !
Il l'emporte donc largement sur le côté humain du super-héros, sur ses limites (le 2) et ses dérives (le 3), et ça c'est génial.
Webb quant à lui n'a pas eu tort de reprendre depuis le début, de refaire les bases d'une façon différente. C'était essentiel pour une nouvelle saga, pour démarrer sur un nouvel aspect. Certes il n'y a aucun suspense au début,on redécouvre juste Spidey différemment. Mettre le mystère des parents de Peter donne par exemple une intrigue essentielle en plus, et un tourment supplémentaire pour Spidey, en rajoutant le côté sombre et énigmatique des enjeux d'Oscorp et de leurs expériences sur la modification du corps humain.
Mais je reprocherai le rôle très limité de Tante May et Oncle Ben (très très mal joués contrairement aux 3 Spider-Man), surtout au moment de la mort de Ben, la médiocrité de la scène par rapport au Spider-man 1 est limite choquante. "Un grand pouvoir implique de grandes responsabilités" oublié, c'est impardonnable là quand même.
Mais heureusement TASM se rattrape en respectant beaucoup plus l'univers du comic. Andrew Garfield incarne de façon plus cohérente le nouveau Spidey, car si on suit un tant soit peu les comics, on sait que le vrai Spidey, c'est celui de Stan Lee : il est sûr de lui, dynamique, drôle (adepte de blagues moisies comme on l'aime), charismatique. Il dégage quelque chose de plus profond, de plus engagé, insouciant et audacieux à la fois. À mon sens il est plus convainquant que Maguire en Spidey dans le sens où il se rapproche plus du personnage du comic. J'aime beaucoup sa nouvelle façon de bouger aussi, Webb exploite encore mieux que Raimi la gestuelle de l'araignée (mais ça c'est un détail ahah). MAIS, ce qui m'a surprise, c'est le Peter de TASM : Garfield (un bon acteur au passage, regardez Never let me go et The social network !) est mignon à croquer, on est d'accord, mais... Peter Parker n'est pas mignon à croquer. C'est dérangeant dans le sens qu'on peut se demander si Garfield ne serait pas à TASM ce que Pattinson est à Twilight (navet commercial affreux pour pucelles en chaleur alors que les livres sont tout sauf ça) : le beau gosse choisi pour attirer le public féminin de 10 à 15 ans. Après, Maguire était un peu trop victime/tête à claques/coincé, je veux dire même avec M.J/May/Harry, et donc ça en faisait trop. Quant à Garfield, il a un côté faussement victime du lycée, car il a un air assuré de beaugossatitude de nature. Ça aurait été judicieux de trouver un juste milieu..
Sinon, TASM a son gros point fort, c'est un nouveau côté sombre avec de nouveaux enjeux (notamment ceux d'Oscorp cités plus haut, et qui vont surtout s'accentuer dans TSAM 2 ; et l'énigme des parents de Peter). Ici, j'ai trouvé intéressant comment le pauvre Connors amputé était investi dans ses recherches. Quelles dimensions mauvaises et aliénantes elles pouvaient prendre. Rhys Ifans joue très bien un personnage qui est de base intéressant. C'est là qu'on voit totalement d'autres enjeux que le fond de "je t'aime moi non plus" avec M.J, et ça fait du bien. La relation Peter/Gwen est aussi nouvelle et intéressante sur le fond (sur la forme ça aurait pu être légèrement mieux joué).
Quant aux effets spéciaux, il n'y a rien à redire, Webb a réussi son projet de faire un Spidey époustouflant visuellement.
Après, il faut garder à l'esprit que Spider-Man, c'est un comic. C'est pas un univers
philosophique, c'est un univers de super-héros. Donc ne demandez pas à Gran Torino d'envoyer du pâté, des explosions et des supers-pouvoirs comme nous ne
demanderons pas à Spider-Man d'être un sujet métaphysique (en réaction à la critique négative la plus "utile" qui affirme que les films qui ne poussent pas à la réflexion sont promus par les médias et donc "dangereux dans un système où les médias et l'éducation fait tout pour modeler le peuple à sa guise". C'est inquiétant d'être parano à ce point quand même, et triste).
Spider-Man et The Amazing Spider-man ne sont pas des chefs d’œuvre du cinéma. Ce sont des films qui adaptent tout l'univers d'un comic populaire. Ce sont des films à regarder pour le plaisir, pour voir le héros de notre enfance adapté avec davantage de moyens.
Raimi privilégie davantage l'aspect émotionnel (mais parfois TROP cul cul), et Webb privilégie la référence au comic et les enjeux d'Oscorp (mais moins axé sur les émotions, après ce n'est que le 1, ça viendra très sûrement). Je dirai quand même que Webb se rapproche davantage des comic, et pour les fans c'est un gros plus. D'ailleurs, il dit lui-même qu'en regardant ses films, il veut qu'on se retrouve comme devant un comic de Spidey, mais en 10 fois mieux. Chacun aura ses préférences. Personnellement je trouve que ces 4 films valent le coup d’œil, et qu'on passe de très bons moments devant chacun, à condition d'arrêter de se limiter à des à priori, et d'apprécier l'enjeu de chaque réalisateur.
Sinon, je donne un 4/5 à TSAM, pas parce que c'est un chef d’œuvre du cinéma, mais parce que c'est une très bonne adaptation du travail de Stan Lee, agréable à voir.