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    Les films phares de 1999

    Plusieurs films cette année ont particulièrement marqué les spectateurs. Rétrospective des surprises, des scandales et des grandes réussites de 99.

    Pour démarrer en fanfare l'année 99, le producteur Claude Berri lance sur les écrans l'adaptation des aventures d'Astérix et Obélix. Réalisé par Claude Zidi et bénéficiant d'une prestigieuse distribution, le film est un immense succès. Mais Astérix et Obélix contre César est aussi sujet à controverse. Il est reproché en effet à Claude Berri de présenter son film comme le dernier rempart contre l'invasion américaine et, de ce fait, d'obliger les spectateurs à voir le film.

    L'autre divergence d'opinion tourne autour de la qualité même de cette adaptation. Pourvu d'un faible scénario, le film ne parvient jamais à capter l'esprit de la bande dessinée. Enfin, la prestation de Christian Clavier dans le rôle du petit Gaulois est fortement décriée ; on lui reproche principalement ses éructations dignes de Jacquouille la Fripouille. Toutefois, ces critiques n'empêchent pas le film d'engranger 9.5 millions d'entrées en France.

    Si Astérix et Obélix contre César regorge d'effets spéciaux, il en va de même pour Matrix. Disposant d'un budget de 80 millions de dollars, le film des frères Wachowski est une véritable démonstration d'imagination et de virtuosité. Matrix pille certes tous les genres déjà existants mais pour en proposer un amalgame extrêmement séduisant. En ce sens, le film divise en France. Pour certains, il s'agit d'un simple plagiat remis au goût du jour ; pour les autres, c'est ni plus ni moins une petite révolution dans le monde de la science-fiction.

    Outre-Atlantique, Matrix soulève un débat d'une toute autre nature. Encore sous le choc du massacre de Littleton, les Américains condamnent la violence du film (notamment la scène du hall) banalisée par les agissements des protagonistes du film. En dépit des avertissements, Matrix est un succès critique et public international. Par ailleurs, il remet en selle Keanu Reeves, ressuscité dans la peau de Neo, le cyber-Christ d'un monde virtuel. L'acteur signera un contrat faramineux (30 millions de dollars pour jouer dans les deux suites et des bénéfices sur leurs recettes) pour reprendre ce personnage.

    Le film le plus surprenant de cette année 99 nous vient de deux Américains : Daniel Myrick et Eduardo Sanchez. Ces deux amis ont imaginé une histoire très simple de trois étudiants perdus dans les bois. Tourné caméra à l'épaule et en vidéo, Le Projet Blair Witch est un savoureux retour aux sources du cinéma d'horreur. Jouant habilement sur nos phobies les plus ancestrales (celle du noir par exemple), ce film, bricolé avec 50.000 dollars, terrifie son audience. Comme le souligne très justement Jean-Pierre Lavoignat de Studio "jamais les films n'ont coûté si cher. Et jamais il n'a été si facile de faire du cinéma". Le Projet Blair Witch en est l'illustre exemple.

    Cependant, il serait sûrement passé inaperçu sans son incroyable campagne promotionnelle. Le phénomène Projet Blair Witch est né en fait avec la création du site officiel. Conçu autour de la disparition de trois étudiants pendant le tournage d'un documentaire, le site retrace leur parcours, preuves de l'enquête policière à l'appui. Aussi c'est avec une certaine curiosité que les spectateurs s'engouffrent dans les salles de cinéma pour connaître le véritable sort de ces trois jeunes. Le bouche à oreille fait son oeuvre et le film devient rapidement culte... Avec 140 millions de dollars de recettes, Le Projet Blair Witch est devenu le film le plus rentable de l'histoire du cinéma.

    Avant de partir, Stanley Kubrick a eu la bonne idée de nous laisser son film-testament Eyes Wide Shut. Entre fantasme sexuel et réalité, le réalisateur plonge le couple Tom Cruise-Nicole Kidman dans une spirale de débauche bien aseptisée. Quelques mois auparavant, les spectateurs découvrent le teaser du film qui montre les deux stars nues et enlacées devant un miroir. S'ensuit un retentissement médiatique énorme uniquement axé sur le caractère voyeuriste et pornographique du film.

    Mais comme à son habitude, Stanley Kubrick se joue de son public. Eyes Wide Shut n'est pas l'étalage de sexe promis mais plutôt une longue introspection des désirs et des frustrations d'un couple. Le film ennuie les Américains (qui le censure inutilement) mais transportent les Européens qui lui réservent un bel accueil. Finalement, Stanley Kubrick est parti, emportant avec lui A.I. (pour Artificial Intelligence), son projet le plus ambitieux depuis 2001 : L'Odyssée de l'espace.

    Que dire sur La Menace Fantôme qui n'a pas déjà été dit ? Le film le plus attendu cette année a tout simplement réalisé le plus gros score au box-office américain (429 millions de dollars de recettes). Mais le délire qui a accompagné la sortie américaine de La Menace Fantôme n'a pas traversé l'Atlantique. Les Français, beaucoup plus réservés à l'égard du film de George Lucas, ne lui ont pas accordé le même dévouement.

    Ainsi le 13 octobre, le soir des premières projections, peu nombreux étaient les fans déguisés comme leurs homologues américains. Quant au film, il ne convainc pas vraiment : trop d'effets spéciaux, un scénario un peu mince, des personnages inexistants, un Jar Jar Binks à tuer et surtout l'esprit de la première trilogie absent. La Menace Fantôme fait plus parler de lui à travers son marketing et l'invasion des produits dérivés dans les foyers. Mais qu'importe, La Guerre des Etoiles reste La Guerre des Etoiles et totalise en France près de 7 millions d'entrées.

    Avec Jeanne d'Arc, Luc Besson a encore le mérite de surprendre son audience. A cent lieux de la flamboyante esthétique du Cinquième Elément, il signe une fresque spectaculaire, à la fois intimiste et grandiose. Dans le rôle-titre, Milla Jovovich se révèle être une brillante actrice et crève littéralement l'écran. Même si certains jugent le film un peu long et l'actrice trop hystérique, le public reste fidèle à Besson et se rue dans les salles.

    Dans la presse, Jeanne d'Arc prend une toute autre dimension. Sorti seulement 15 jours après La Menace Fantôme, le film de Besson devient le symbole de la résistance française face aux majors hollywoodiennes. Luc Besson s'amuse de ce statut et annonce contre toute attente que sa carrière de réalisateur s'arrêtera à son dixième film. Désormais, il ne lui en reste plus que deux à tourner.

    Cette année, la palme du film-scandale revient sans conteste à Fight Club de David Fincher. Après Alien 3, Se7en et The Game, ce jeune réalisateur met cette fois-ci son implacable virtuosité au service d'un discours violemment anarchiste. Adapté d'un roman de Chuck Palahniuk, Fight Club dénonce la société de consommation et prône un retour aux sources par l'autodestruction. Un exercice périlleux qui ne manque pas de susciter de nombreuses critiques. Film fascinant pour les uns ou fascisant pour les autres, Fight Club a le mérite de ne laisser personne indifférent.

    Contrairement aux Etats-Unis où la violence du film reste le centre des débats, la France s'intéresse plus aux références nazies. L'utilisation du savon par exemple, qui rappelle indirectement les pratiques des Allemands dans les camps de la mort, soulèvent un tollé chez la plupart de nos confrères. Mais Fight Club reste un objet cinématographique captivant, d'une ingéniosité miraculeuse et d'une beauté plastique indéniable. Certains n'hésitent plus à considérer David Fincher comme le fils spirituel de Stanley Kubrick... L'avenir nous le dira.

    Enfin, on retiendra en vrac la gifle sonore de Seul Contre Tous, la réalisation conceptuelle de Buffalo 66, l'hallucinante galerie de portraits de Gummo, les théories mathématiques de Pi, le pseudo-scandale de Romance, la métamorphose d'Edward Norton pour American History X, le doigt d'honneur de Richard Berry dans Quasimodo d'El Paris, les beignes de Payback, l'atmosphère moite de Cookie's Fortune, le sadisme de Cube, le coup de théâtre final d'Arlington Road, la boucherie de Vorace, la grossièreté de South Park le film, la démarche planante du Ghost Dog, les pleurnicheries de Robert de Niro dans Mafia Blues, la musique de L'Eté de Kikujiro, la demeure de Hantise, le Paris ensablé de Peut-être, l'insolence de The Big One, les colères des Ennemis Intimes, la lubricité désopilante d'Austin Powers et la tarte aux pommes d'American Pie... Rendez-vous l'année prochaine. C.V

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