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    Prime Video : la meilleure saga du cinéma quitte la plateforme dans 7 jours
    Corentin Palanchini
    Passionné par le cinéma hollywoodien des années 10 à 70, il suit avec intérêt l’évolution actuelle de l’industrie du 7e Art, et regarde tout ce qui lui passe devant les yeux : comédie française, polar des années 90, Palme d’or oubliée ou films du moment. Et avec le temps qu’il lui reste, des séries.

    Pendant plusieurs mois, Prime Video a mis à disposition de ses abonnés une saga mythique du cinéma, qui s’est étirée sur plusieurs décennies. Elle quittera la plateforme le 8 juillet prochain et on vous invite vivement à la redécouvrir d’ici-là !

    Attention, l'article ci-dessous dévoile de potentiels spoilers sur la saga Rocky. Si vous ne souhaitez pas en connaître la teneur, merci de ne pas lire ce qui suit…

    L'écran de cinéma s'allume. On entend le nom de Rocky scandé au loin, le thème musical du personnage commence... Nous sommes le mercredi 24 janvier 2007, la séance de Rocky Balboa vient à peine de débuter, et les frissons arrivent déjà. Il ne fait pas froid dans la salle, il fait même un peu trop chaud.

    Il faut dire que l'annonce de ce retour de Rocky seize ans après un cinquième opus mal aimé a de quoi inquiéter. Sylvester Stallone a plus de soixante ans, comment peut-il être crédible dans le rôle d'un boxeur capable de rivaliser avec un sportif dans la force de l'âge ?

    Rocky Balboa
    Rocky Balboa
    Sortie : 24 janvier 2007 | 1h 45min
    De Sylvester Stallone
    Avec Lahmard J. Tate, Kevin King Templeton, Sylvester Stallone
    Presse
    3,7
    Spectateurs
    3,7
    Voir sur Prime Video

    Et pourtant, les frissons sont là. Parce que Rocky, ce n'est pas qu'un personnage ou qu'un film, c'est une saga, une saga importante de l'Histoire du cinéma, une saga qui fait pleurer autant qu'elle secoue, c'est l'histoire de Sylvester Stallone, et c'est aussi un peu la nôtre. Ce 24 janvier 2007, beaucoup de spectateurs ont pris une leçon de vie en plus d'une leçon de cinéma. Mais d'où vient notre attachement vicéral à Rocky ?

    Rocky, c'est un être humain

    Rocky Balboa est un monsieur tout le monde sans le sou dont la vie se résume à ses deux tortues et à son chien Butkus. À ses débuts, pour subvenir à ses besoins, il sert d'homme de main à un petit truand et fait de la boxe dans des salles minables. Son seul rayon de soleil s'appelle Adrianne (Adrian en VO, jouée par Talia Shire), la soeur de son ami Paulie (Burt Young), une jeune femme un peu coincée qui travaille à l'animalerie la plus proche.

    Mais un jour, l'actuel champion du monde de boxe catégorie poids lourds Apollo Creed (Carl Weathers), qui se retrouve sans adversaire pour son combat à Philadelphie, demande qu'on lui trouve un "ringard" prêt à tenter l'aventure pour essayer de devenir le nouveau champion du monde. L'entraîneur Mickey (Burgess Meredith) contacte Rocky pour l'inciter à tenter sa chance. La saga commence.

    Capture d'écran

    Elle n'aurait pas tenu 6 longs métrages (et un peu plus si l'on ajoute les apparitions du personnage dans une franchise spin-off, Creed) s'il ne s'agissait que du parcours d'un boxeur remportant un prix et tentant de le garder de film en film.

    Selon la célèbre maxime : "Si j'ai changé, et que vous avez changé, alors tout le monde peut changer", le personnage de Rocky va évoluer avec finesse, tandis que sa relation aux autres va s'améliorer au fil du temps. Son histoire d'amour avec Adrianne est une des plus touchantes du cinéma. Rocky n'est pas qu'un boxeur butor, c'est surtout un petit gars de Philadelphie timide, trop gentil, empoté et un peu trop naïf.

    Son humanité vient aussi des épreuves personnelles qu'il traverse. Il subit au fil des longs métrages de nombreux deuils qui le bouleversent un peu plus à chaque fois, pour des raisons différentes. Il perd son ami Apollo Creed, assassiné sur le ring par le géant soviétique Ivan Drago (Dolph Lundgren) et développe alors un aveugle désir de vengeance (R4*).

    Il est également violemment touché par le décès de son entraîneur Mickey et se rend responsable de sa mort (R3), puis il a le coeur brisé par la perte de sa bien-aimée Adrianne (R6) et de celle de son beau-frère Paulie (C1). Voilà pourquoi on retrouve dans R6 et les deux films Creed un homme brisé et lassé de la vie.

    Cela étant dit, il faut bien reconnaître que Rocky reste une saga de boxe, et quelle saga de boxe !

    Rocky, c'est un bon boxeur (quoique)

    Les films de boxe existent depuis les débuts du cinéma. L'un des plus connus de cette époque est la comédie Charlot et Fatty dans le ring, sortie en 1914. Mais au moment du tournage de Rocky nous sommes en 1976, et la référence récente du film de boxe est Fat City (1972), réalisé par John Huston (lui-même un ancien boxeur), et qui a plu à Mohamed Ali en personne. 

    Pour Rocky, le réalisateur John G. Avildsen souhaite être encore plus réaliste et demande à Stallone, auteur du scénario, de décrire chaque mouvement du combat final afin que la chorégraphie soit parfaite. Du reste, l'ancien boxeur Jimmy Gambina participe aux entraînements des deux acteurs principaux.

    Pourtant, il faut admettre la vérité en face, malgré toutes ses bonnes intentions de départ, la saga Rocky n'est aucunement fidèle à un vrai match de boxe. Les gants employés dans le premier film sont illégaux, le fait de se faire ouvrir l'arcade n'arriverait pas et le combat serait arrêté, quant aux charges récurrentes de Rocky sur ses adversaires, davantage dignes du catch, elles n'ont rien à faire sur un ring de boxe. Mais alors, pourquoi ça marche ?

    Titre                  Box-Office mondial
    Rocky225 millions de dollars
    Rocky II220 millions de dollars
    Rocky III270 millions de dollars
    Rocky IV300 millions de dollars
    Rocky V119,9 millions de dollars
    Rocky VI155,5 millions de dollars

    Parce que Stallone a compris que le réalisme d'un combat de boxe n'est pas cinématographique. Il opte donc pour un montage très nerveux, des combats d'une vingtaine de minutes (sauf celui de R5, très vite expédié), des blessures ouvertes sanguinolentes, des boxeurs qui vont au bout de leurs forces et des arbitres plus ou moins regardants. 

    Ce côté jusqu'au-boutiste et irréaliste se ressent aussi dans la personnalité de Rocky qui se défend rarement et se prend coup sur coup, misant sur sa résistance hors du commun. Il sera même prêt à mourir sur le ring pour assouvir un désir de vengeance face à l'assassin d'Apollo Creed (R4). Il remportera ce combat de haute lutte, en envoyant un message d'une touchante naïveté au monde soviétique.

    Mais suite à ce combat éprouvant, Rocky ne peut plus combattre (R5) : il a des problèmes de vue et ses mains tremblent, ce qui, pour le coup, apportait une dose de réalisme. Ce retour de manivelle est hélas resté au stade de bonne idée de départ mal exploitée du film.

    Pour le reste, la boxe dans Rocky, c'est n'importe quoi, mais un n'importe quoi impressionnant où chaque coup semble faire le poids d'un 32 tonnes. Et c'est aussi grâce à ça que la saga fait passer le spectateur par des émotions fortes, et trouve un juste équilibre avec les parties centrées sur l'histoire sentimentale de Rocky et Adrianne.

    Rocky, c'est Sylvester Stallone

    Mais ce qui fait le sel de Rocky, c'est encore une autre dimension. Car l'histoire de Rocky, c'est celle de son créateur, Sylvester Stallone. Lorsque dans R1, le boxeur commence en vivotant et qu'on lui offre une opportunité de faire ses preuves, c'est une allégorie de ce que l'acteur vivra avec la bonne réception du premier film de la saga, qui récoltera d'ailleurs trois Oscars. Lorsque dans R2, le personnage retente sa chance et remporte enfin le titre de champion, cela symbolise l'espoir de Stallone de réitérer le succès du premier film.

    Plus tard (R3), Rocky expérimente la rançon de la gloire. Il a tout ce qu'il pourrait souhaiter : il est riche, connu partout, participe à des oeuvres de charité et pourtant, il passe à côté de l'essentiel... Adrianne n'est pas heureuse et son fils est pourri gâté.

    Du reste, il commence lui aussi à développer un ego qui le dessert. Sa rencontre avec le "chien fou" Clubber Lang (Mister T.), qui lui donne la raclée de sa vie, aura tôt fait de le ramener sur terre : rien n'est jamais acquis. Là encore, c'est Stallone qui gère sa célébrité nouvellement acquise, constate les excès que cela peut amener et faire preuve d'humilité à travers son personnage fétiche.

    Rocky comme Stallone ne resteront d'ailleurs pas au top. De manière quasi prophétique, Stallone écrit en 1989 l'histoire de R5, dans lequel Balboa est ruiné et décide de devenir coach pour vivoter, en se reposant sur sa gloire passée. Et dans la réalité, l'échec de ce cinquième long métrage et plusieurs mauvais films durant les années 90 le verront vivre une traversée du désert d'une dizaine d'années.

    Les deux derniers longs métrages de la saga abordent la désillusion, la résignation aussi. Dans R6, on retrouve Rocky tenant un petit restaurant dans le quartier miteux de son enfance, où il passe son temps à raconter les anecdotes de son passé glorieux.

    Sans doute là encore du vécu pour l'acteur, qui à l'époque du tournage, n'avait plus rien tourné d'intéressant depuis presque dix ans. Ces deux films se focalisent sur des idées beaucoup moins positives que les quatre premiers Rocky qui, tournés entre 1976 et 1986, défendent bec et ongle l'idée de l'American Dream. Une idéologie dont Rocky (et Stallone ?) semble bel et bien revenu.

    La façon dont l'acteur-réalisateur a anticipé sa propre vie à travers le personnage de Rocky est fascinante, et fait de Rocky un héros profondément humain et beaucoup moins caricatural que l'image qu'il dégage pour ceux qui n'en ont vu que des photos ou des extraits sur leur plateforme vidéo préférée. Si la franchise ne brille pas toujours par sa réalisation, les émotions qu'elle dégage sont réelles et l'arc narratif de Rocky passionnant, pour peu que l'on s'y plonge vraiment.

    Profitez de leur disponibilité sur Prime Video pendant encore une semaine pour redécouvrir ce qui est, à n'en pas douter, l'une des sagas les plus fortes du cinéma, la meilleure pour l'auteur de ces lignes, par la trajectoire de personnage qu'elle propose, les décennies qu'elle traverse, la cohérence globale qu'elle a, et le fait qu'elle a porté son interprète principal à bout de bras de 1976 à 2018. Du jamais vu ? Peut-être bien, et des éléments qui ne peuvent inspirer qu'une chose : le respect.

    Les gaffes de Rocky :

    * Pour éviter des répétitions, les films de la saga sont référencés comme suit : R1, R2, R3 pour Rocky 1, 2, 3 etc. et les films Creed sont C1 et C2.

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