Mickey et Mallory Knox, un jeune couple embarqué dans une sanglante odyssée, tuent les gens croisant leur route, à commencer par les parents de Mallory, qui maltraitaient leur fille...
Vous aurez certainement reconnu sous ce pitch minimaliste le génial film d'Oliver Stone, Tueurs nés, qui déboule ce 26 juin sur Disney+ Star. Sorti il y a 26 ans, rarement un film n'aura déclenché une telle polémique, aussi bien aux Etats-Unis qu'outre-Atlantique, quand il ne fut pas carrément interdit (temporairement) comme en Irelande.
Totalement amoral, cette dénonciation sous acide de la surmédiatisation omni-présente était pourtant du jamais vu en 1994. Les partisans d'Oliver Stone concèdent volontiers que l'on peut contester le fond; mais la forme relève du génie : le film compte entre 2500 et 3000 plans, alors qu'en moyenne la plupart des films en compte entre 600-700.
En revoici la bande-annonce...
Pour l'anecdote, Oliver Stone s'attela à la fin des années 1990 à créer une version director's cut de son film. Plus longue de 3 min, elle restaure en outre quelques 150 plans, que le cinéaste fut obligé de laisser sur la table de montage en vue d'obtenir une classification "R" aux Etats-Unis.
Une influence néfaste
De nombreux faits divers sordides furent mis sur le compte de l'influence de ce film. En 1995, deux jeunes adultes américains, Benjamin Darras, 18 ans, et sa petite amie Sarah Edmondson, 19 ans, se sont pris pour Mickey et Mallory Knox.
Après avoir vu le film, le couple s'est embarqué dans une équipée meurtrière sur les routes du Sud des Etats-Unis. Un homme, Bill Savage, fut abattu sans raison dans une ferme du Mississippi. Une femme, du nom de Patsy Byers, travaillant dans une station de service, fut laissée pour morte. Grièvement blessée, elle devint paraplégique.
Sur la foi de la double référence dans le témoignage de Sarah Edmondson au film d'Oliver Stone, elle engagea une requête en responsabilité civile pour le dommage subi en direction d'Hollywood. Etaient visés : Warner Home Video, responsable de la distribution vidéo du film, les studios Warner Bros, les actionnaires (Time Warner), les producteurs et enfin, le réalisateur, Oliver Stone. Une première.
Sa plainte précisait que la responsabilité d'Hollywood pouvait être engagée "au motif qu'ils ont distribué un film dont ils savaient ou auraient dû savoir qu'il pourrait inspirer des individus tels que les accusés à commettre des crimes similaires à celui commis contre Patsy Byers (...), un film glorifiant des actes de violence similaires à celui qui allait être commis contre elle", et, enfin, "entre autres négligences", ont "traité les auteurs de tels actes violents comme des célébrités et des héros".
La plainte concernant la Major et la production du film fut rejetée, sur la base du premier Amendement de la Constitution des Etats-Unis, garantissant (notamment) la liberté d'expression. Si Patsy Byers gagna en appel, l'affaire fut définitivement cassée en 2001, lorsqu'un Juge décida qu'il n'y avait, in fine, aucune preuve que Time Warner ou Oliver Stone avaient intentionnellement incité à la violence.