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    The Northman : ce film de Vikings est tiré d’une histoire vraie ?
    Maximilien Pierrette
    Journaliste cinéma - Tombé dans le cinéma quand il était petit, et devenu accro aux séries, fait ses propres cascades et navigue entre époques et genres, de la SF à la comédie (musicale ou non) en passant par le fantastique et l’animation. Il décortique aussi l’actu geek et héroïque dans FanZone.

    Avec "The Northman", son troisième long métrage, Robert Eggers lève un peu le pied sur l’horreur au cœur des précédents. Mais les mythes et légendes animent toujours son cinéma, comme il nous l’a expliqué.

    Il y a eu les sorcières avec The Witch, film qui l’a révélé et mis dans le collimateur des fans d’horreur. Puis les créatures marines dans The Lighthouse. Place maintenant aux Vikings pour Robert Eggers avec The Northman. Une épopée furieuse et bestiale sur fond de vengeance et de famille dont le réalisateur anglais nous a parlé lors de son passage à Paris.

    The Northman
    The Northman
    Sortie : 11 mai 2022 | 2h 17min
    De Robert Eggers
    Avec Alexander Skarsgård, Nicole Kidman, Claes Bang
    Presse
    3,4
    Spectateurs
    3,1
    louer ou acheter

    AlloCiné : Vos trois longs métrages se basent sur des mythes et des légendes. En quoi les trouvez-vous assez intéressants pour vouloir en faire des films ?


    Robert Eggers : Je suis attiré par le passé, la mythologie, la religion et l'occulte. Et je pense qu'il n'est pas surprenant que, lorsque l’on recherche le sublime ou le spirituel en racontant des histoires, celles-ci tendant à être de la science-fiction. Car nous nous promenons toute la journée avec un ordinateur dans les mains. Je le vis assez chaque jour (rires) Donc j’aime me demander qui nous sommes et où nous allons, en m’appuyant sur ce d’où nous venons.

    Quelle est la principale difficulté lorsque l’on est attiré par le passé comme vous l’êtes ? Quand on cherche à réinventer des histoires anciennes sans tomber dans l’illustration pure ?


    Quand je dis "Vikings", les gens pensent les connaître. Car ils ont vécu il y a plus de mille ans et que l’archéologie permet d’en apprendre un peu plus sur eux chaque jour. Mais ils ne connaissent rien de leur monde matériel et culturel, car rien de ce nous avons vu au cinéma, à la télévision ou dans les bandes-dessinées n’était basé sur la recherche.

    Et Wagner nous a donné les cornes sur les casques, ce qui nous a mis sur la mauvaise piste pendant longtemps. Mais il y a des choses auxquelles vous pouvez vous attendre lorsque l’on parle des vikings, comme ces longs navires. Ou les funérailles. Et je voulais, dans mon film, avoir ces éléments reconnaissables mais les faire intervenir d’une manière qui pourrait être inattendue, en me basant sur des recherches.

    Et aussi développer des tropes vikings que vous ne connaissiez peut-être pas mais que l’on retrouve dans toutes les sagas. Comme le fait de devoir combattre un viking mort-vivant pour obtenir votre épée si vous êtes un héros. Il y a aussi ce jeu de balle appelé Knattleikr, qui est dans beaucoup de sagas mais que les gens connaissent peu. L’idée est donc d’anticiper les attentes du public, et parvenir à les défier dans une certaine mesure (rires)

    Je voulais avoir ces éléments reconnaissables mais les faire intervenir d’une manière qui pourrait être inattendue

    Avez-vous songé à faire le film en langage nordique, pour être le plus fidèle possible à ce monde ?

    
J’aurais préféré pouvoir tourner le film en vieux norrois. Mais seul Mel Gibson, qui finance lui-même ses épopées, peut faire une telle chose.

    Aviez-vous des références visuelles, issues de films ou de peintures ?

    
C’était difficile ici. Lorsque je travaille autour d’une période historique, j’ai tendance à me servir des œuvres d’art de l’époque comme d’un point de départ pour l’aspect visuel. Or l’art viking est très stylisé et peu atmosphérique. Les paysages sont donc devenus ma source d'inspiration principale pour l’atmosphère, avec le temps et les éléments tels que la boue et les flammes.

    Mais comme la poésie et l'art visuel, c'était magnifique, mais également austère et rugueux. Nous avons essayé de trouver une simplicité nordique dans la narration. Et, au-delà de ça, la caméra est toujours en mouvement. Ce qui, je l’espère, crééra quelque chose d’immersif qui vous plonge dans l’histoire. Tout en ayant un univers qui se construit autour de vous.

    Cette importance des paysages signifie-t-elle que les lieux ont joué un rôle clé dans l’écriture et la mise en scène ? Quitte à devoir les trouver très tôt ?

    Je n’ai pas trouvé les lieux avant l’écriture ou le tournage. Mais l’échelle du film le permettait. Si le projet avait été plus petit, nous aurions sans doute dû chercher des lieux pour nous en inspirer. Il y a bien sûr le volcan Hekla, que j’avais vu et intégré dans l’histoire, mais c’est après l’écriture que nous avons cherché les villes perchées et les fermes islandaises.

    Comme beaucoup de films récents, "The Northman" a rencontré des complications à cause du Covid. Avez-vous dû faire beaucoup de changements pour vous adapter aux nouvelles mesures sanitaires ?


    Nous n’avons pratiquement pas eu à changer le contenu du film à cause du Covid, ce qui est formidable. La seule chose dont je me souviens, c’est dans cette scène où nous rencontrons le personne d’Olga joué par Anya Taylor-Joy. Elle est en train de pratiquer un sort de guérison sur une femme et met des herbes dans sa bouche. À l’origine, Anya était censée les mettre dans sa bouche, les mâcher et les mettre ensuite dans la bouche de la femme. Ce que nous n’avons pas pu faire. En-dehors de cet exemple, il s’agissait de trouver des solutions créatives.

    Ma plus grande frustration, c’est que la majeure partie du film se déroule en Islande, mais nous avons très peu tourné là-bas. Le tournage principal devait s'y dérouler, mais nous n’avons pu y faire que les prises de vues additionnelles. Donc il nous a fallu trouver des lieux en Irlande qui ressemblaient le plus possible à l’Islande. Il y a aussi des plans de l’Islande que nous avons mis en boîte pour ensuite les ajouter au second plan. Je n’aime pas beaucoup cette manière de faire, mais je devais raconter cette histoire.

    Et pourquoi cette histoire précisément ? Celle qui a inspiré "Hamlet" ?

    Si je voulais faire un film de Vikings, il fallait que ce soit avec une histoire de vengeance. Et très vite je suis tombé sur celle d’Amleth, qui a inspiré Hamlet à Shakespeare. Comme The Northman est destiné à un public large, je savais que si j’avais un conte mythologique aussi simple et que tout le monde connaît - car c’est aussi Le Roi Lion ! - je pourrais davantage me concentrer sur le monde matériel et intérieur des Vikings, sans risquer de perdre le public.

    Propos recueillis par Maximilien Pierrette à Paris le 28 mars 2022

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