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    Comme Johnny Depp sur Pirates des Caraïbes, 5 talents ingérables sur les plateaux de tournage
    Olivier Pallaruelo
    Olivier Pallaruelo
    -Journaliste cinéma / Responsable éditorial Jeux vidéo
    Biberonné par la VHS et les films de genres, il délaisse volontiers la fiction pour se plonger dans le réel avec les documentaires et les sujets d'actualité. Amoureux transi du support physique, il passe aussi beaucoup de temps devant les jeux vidéo depuis sa plus tendre enfance.

    Acteurs ou actrices lunaires, colériques, comportements complètement erratiques... Certains tournages ne furent pas de tout repos avec certains talents. Voici cinq exemples.

    New Line Cinema

    Acteur ou actrice lunaire et / ou réputé(e) colérique, comportement de diva, exigences parfois tordues des têtes d'affiches... La vie d'un tournage n'est pas toujours, loin s'en faut, un long fleuve tranquille. Nous sommes d'ailleurs longuement revenu récemment sur le cas de Johnny Depp, lors du tournage homérique de Pirates des Caraïbes 5.

    Qu'à cela ne tienne, voici cinq autres exemples, qui ont engendré pas mal de crispations durant les tournages, à des degrés divers...

    Marlon Brando sur "L'île du docteur Moreau" (et d'autres films...)

    On ne présente guère plus Marlon Brando, icône absolue du 7e Art et un des plus influents acteurs américains du XXe siècle, dont l'insolence et la modernité continuent encore d'être un modèle pour toute une génération d'acteurs. S'il était un fabuleux acteur, quoique très tourmenté côté vie privée, il avait aussi gagné une solide réputation d'être souvent ingérable sur les plateaux de tournage, avec un comportement lunaire.

    Sur La poursuite impitoyable par exemple, le chef-d'oeuvre d'Arthur Penn, il incarnait le Shériff Calder, chargé d'arrêter un Robert Redford en cavale. Brando détesta tourner le film, en plus d'avoir peu de considération pour son personnage, pourtant fabuleux. En service minimum, il déclara s'être contenté de faire errer son personnage sur le plateau...

    Sur Le Parrain, la mauvaise réputation de l'acteur le précédait largement. Francis Ford Coppola cherchait à convaincre la Paramount de l'engager pour jouer Don Corleone. Mais, comme il nous l'avait lui-même raconté, Brando était considéré comme "un empoisonneur absolu du Box Office". Trop toxique et ingérable, personne n'en voulait, en plus de ne plus être bankable depuis longtemps...

    On se souvient bien entendu de Brando, l'acteur-monstre dans sa composition en Colonel Kurtz dans Apocalypse Now. Quand l'acteur débarqua avec trois semaines de retard sur le tournage, Coppola fut horrifié : en surpoids de 40 Kg, Brando n'avait appris aucune ligne de dialogue et n'avait pas lu l'oeuvre de Joseph Conrad dont est tiré le film. A peine arrivé, le réalisateur ferma le tournage pendant une semaine et emmena Brando en bateau, le temps de lui expliquer sa vision du personnage. N'aimant pas ses dialogues, Brando demanda alors à improviser son texte, en fonction des indications que Coppola lui donnerait....

    New Line Cinema

    Plombé financièrement par les tragiques affaires familiales (le suicide de sa fille Cheyenne consécutif au meurtre de son amant par son frère, et le procès qui s'ensuivit), Brando n'eut pas d'autre choix que de retourner devant les caméras qu'il avait passablement délaissé dans la décennie 1980-1990 pour s'engager sur le tournage du remake de L'île du Dr Moreau. C'est un Brando plus obèse que jamais, n'apprenant toujours pas ses dialogues, grimé comme un gourou de secte des 70's, qui participait ainsi au pathétique naufrage artistique et commercial de ce film.

    Le tournage, hallucinant, mériterait à lui seul un livre. Il a d'ailleurs été raconté en 2021 dans une formidable série d'articles parus dans Libération, Blockbusters de l'apocalypse. Le titre de l'article ? L'île du docteur Moreau : glauque en stock. Et d'égrener comme un chapelet la liste des problèmes. Un Val Kilmer insuppportable, exigeant de réduire de moitié son temps de tournage, tuant le temps assis sans bouger quand il ne se mettait pas à brûler (!) volontairement les cheveux d'un technicien pendant une prise parce qu'il s'ennuyait. Brando se faisant souffler les dialogues dans une oreillette par son assistante, Caroline Barrett...

    "Un soir, il convoque Frankenheimer pour lui proposer d’arrêter le tournage et de réécrire entièrement le scénario avec lui. Il a une idée : le docteur Moreau devait porter un chapeau et à la fin du film, l’enlèverait pour révéler qu’il est en réalité un dauphin"... Pire, il se prend d'affection pour Nelson de la Rosa, l’acteur lilliputien d'origine dominicaine qui joue à ses côtés.

    Il demande à revoir le scénario pour l’intégrer dans toutes ses scènes. "De la Rosa devient le double miniature de Brando, rôle culminant dans une scène où il joue d’un mini piano à queue posé sur celui de Brando, qui l’accompagne à l’unisson – tableau dément, parodié en 1999 dans Austin Powers avec le personnage de Mini-Moi. Grisé par ce revirement, l’acteur de 72 centimètres change d’attitude – il devient infect, violent, insistant avec les femmes"... Une bonne ambiance de tournage en somme...

    Un train entier pour Sharon Stone

    Ce n'est pas faire injure au talent de la comédienne de dire que le sommet de sa carrière remonte déjà à plus de 25 ans, avec son fabuleux rôle dans le Casino de Martin Scorsese. Du reste, elle l'a d'ailleurs dit elle-même, dans un entretien accordé à un journaliste du Guardian en 2008 : "Casino était un sommet pour moi".

    Toujours est-il que Sharon Stone continue de tourner régulièrement, y compris dans des productions étrangères. Comme en 2013 en Italie par exemple, sous la direction de Pupi Avati, dans un film intitulé Golden Boy, produit par son frère, Antonio Avati.

    Pour ce film à petit budget, la venue de Sharon Stone était une belle prise de guerre. Les frères étaient particulièrement flattés que la comédienne accepte de jouer dans leur film, d'autant que son rôle fut précisément écrit en pensant à elle. C'est là que les choses ont commencé à se corser...

    Cité par le Hollywood Reporter, les frères racontent la suite : "une correspondance a commencé, assez épaisse pour écrire un livre, entre ses agents et nos avocats. C'était une négociation qui frôlait le ridicule, concernant des détails embarrassants, comme si l'Italie était un pays du Tiers monde. Au fait, nous avons de l'électricité en Italie !"

    SGP / BESTIMAGE

    Ils ont ainsi affrété spécialement pour elle un train complet (un train très chic, l'Italo)  pour la faire venir de Rome à Florence. Dès le premier jour de tournage, il y avait 200 paparazzi. "Là son ego à commencé à gonfler; un classique chez ces actrices américaines qui sont légèrement en déclin" lâchent-ils non sans perfidie.

    Surprenant sur le tournage une caméra appartenant à une équipe TV, la comédienne s'est alors volatilisée, exigeant que cette caméra TV disparaisse faute de quoi le tournage ne reprendrait pas. Plutôt que de s'adresser directement à l'équipe du film, la comédienne passa par son avocate à Los Angeles, qui contacta le jour même les frères Avati pour faire part des exigences de l'actrice...

    Une comédienne du film, Cristiana Capotondi, raconte aussi que Sharon Stone a demandé à faire elle-même le shopping de toute la garde-robe de son personnage, avec la carte bleue de la production évidemment. En s'arrêtant de temps à autre chez de grandes marques comme Bulgari. Pas franchement le genre de marque très Indé friendly côté budget...

    Contactée par le Hollywood Reporter à propos de ces allégations, l'avocate de Sharon Stone a répondu d'un laconique : "rien de cela est vrai. Madame Stone est une professionnelle accomplie". Fermez le ban.

    Blade Trinity : un Wesley Snipes sous Weeds qui ne parle plus que par post-it

    Wesley Snipes est-il devenu (très) paresseux sur les tournages ? C'est en tout cas ce que laisse entendre le comédien Patton Oswalt, qui a tourné avec lui sur le film Blade Trinity, mis en scène par David S. Goyer, dans une interview qu'il avait accordé en 2012.

    Oswalt se souvient "d'une production très compliquée. [...] Wesley ne sortait jamais de sa caravane de tournage, sauf pour faire les gros plans. Il fumait de l'herbe toute la journée. Je me souviens d'un jour où la production a laissé tout le monde mettre le vêtement qu'il voulait. Il y avait un acteur noir qui portait une chemise, la sienne donc, avec marqué en gros "Garbage" dessus [NDR : "ordure"]. Wesley s'est pointé sur le tournage, et ne venait que pour les gros plans. Tout le reste était fait par sa doublure. Il a alors vu ce mec avec sa chemise, et a explosé : "il n'y a qu'un seul autre acteur noir dans ce film, et vous lui faite porter une chemise avec "garbage" écrit dessus ? Vous n'êtes que des enfoirés de racistes ! Il a alors essayé d'étrangler le réalisateur, David S. Goyer".

    New Line Cinema

    Plus tard le même jour, dans la soirée, le réalisateur interpella une bande de bikers dans un strip Club, en leur proposant de leur payer à boire s'ils se pointaient le lendemain matin sur le tournage, en se faisant passer pour ses gardes du corps. Wesley Snipes, présent à ce moment là, est rentré dans sa caravane.

    "Le lendemain, Wesley s'est assis à côté de David, et lui a dit : "pourquoi tu ne quittes pas le tournage ? Tu portes préjudice à ce film !" Ce à quoi Goyer aurait répondu : "pourquoi TOI tu ne pars pas ? On a déjà en boîte tous les gros plans, et on pourrait tourner le reste du film avec ta doublure". L'acteur aurait été tellement remonté par la remarque du réalisateur qu'il n'a plus communiqué avec lui que par posts-it interposés, signés "From Blade".

    Gary Busey, l'acteur qui a déjà visité le Paradis et fait refaire le décor

    Eternel second couteau du cinéma US, Gary Busey promène sa tignasse blonde et son sourire extra large depuis les années 70, avec à son actif une quantité industrielle et hallucinante de films, malheureusement souvent de piètre qualité.

    Si côté vie privée le comédien a accumulé les problèmes (accident de moto à la fin des 80’s qui le défigurera partiellement, forte consommation de cocaïne qui lui vaut une overdose en 1995, problèmes judiciaires de violence conjugale, etc...), l'acteur est en outre réputé pour être sacrément perché, en tout cas lunaire, et parfois difficilement gérable sur un plateau...

    Un exemple parmi (beaucoup) d'autres, sur le tournage d'un inoffensif film familial dont le pitch a été écrit sur le coin d'une nappe, inédit chez nous : Quigley, en 2003. Dans ce film (qui n'a au passage aucun rapport avec Monsieur Quigley l'Australien), Busey incarne Archie, un milliardaire qui a tout ce que l'on peut imaginer, sauf ce qui est le plus important, un cœur et une conscience.

    Sur le point de faire une annonce qui changerait à jamais la vie de ses employés, Archie subit un tragique accident qui l'emmène aux portes du Paradis. Il est décidé qu'il va finalement être renvoyé sur Terre, sous la forme d'un loulou de Poméranie (!!!) - une créature qu'il méprise encore plus que les gens. Accompagné de son ange gardien, Archie est envoyé dans une mission céleste pour aider la vie de ceux qui l'entourent, tout en sauvant la sienne.

    Vous mourrez d'envie de voir la bande-annonce du film ? La voici !

    Tout se serait passé dans le plus merveilleux des mondes si le comédien n'avait pas tiqué sur la scène du film se déroulant au Paradis, qu'il a refusé de jouer, alors que le calendrier de tournage accusait 3 jours de retard. Motif ? Ayant vécu lui-même une NDE, acronyme de Near Death Experience, il lâcha à une assistance médusée : "j'ai visité le Paradis, et ca ne ressemble absolument pas à ça. Ce sofa n'est pas bon. Ce miroir est ridicule. Ils n'ont même pas de miroir !" Il est devenu fou à propos du design du Paradis !" racontait le comédien Curtis Armstrong, qui lui donne la réplique dans le film.

    Qui ajoutait : "Par-dessus ça, il se trouve qu'un autre comédien qui jouait un ange dans le film avait lui aussi vécu une Near Death Experience, avant de revenir à la vie. Et ce gars s'est mis à s'engueuler avec Gary à propos du design du Paradis. Ils en sont venu aux mains, si bien que tout le monde fut renvoyé à la maison".

    Marilyn Monroe

    Capable d'être bonne actrice mais manquant terriblement de confiance en elle, très sensible, Marilyn Monroe a parfois laissé quelques souvenirs acrimonieux de tournages à ses collègues acteurs et actrices, comme sur le film le Prince et la danseuse, en 1957, dans lequel elle donnait la réplique à Laurence Olivier.

    Avec son confrère britannique John Gielgud, Olivier est l'acteur shakespearien par excellence. Immense comédien, il était semble-t-il d'un tempérament difficile, en plus d'être réputé pour sa capacité à lâcher des commentaires peu amènes sur ses confrères; un peu à la manière d'un Orson Welles. L'intéressé dira par exemple de sa partenaire dans Rebecca, Joan Fontaine, qu'elle était "détestable", tandis qu'il trouvait l'actrice Merle Oberon "stupide et amatrice"... Sympa. "C'est quelqu'un d'assez déplaisant" dira de lui l'illustre Alec Guinness; "et même quelqu'un de vindicatif".

    Lorsqu'il tourna en 1957 Le Prince et la danseuse, Olivier pris en grippe Marilyn Monroe. La comédienne était très nerveuse sur le tournage, au point de passer aussi peu de temps que possible en compagnie des autres acteurs / actrices du film. Olivier méprisait son usage de la Method Acting et la présence permanente sur le plateau du coach de l'actrice, Paula Strasberg. Le -fameux- directeur de la photographie du film, Jack Cardiff, déclara d'ailleurs : "dès le départ, il était évident que Marilyn allait être un problème pour Larry".

    Il faut dire que la comédienne a aussi la réputation d'être ingérable et capricieuse sur les plateaux de tournage. "Elle était tout le temps en retard, négligée, elle n'arrivait jamais à dire deux fois de suite sa réplique de la même manière" affirma l'une des comédiennes du film, Jean Kent, dans une interview donnée en 2012. Qui enfonçait le clou : le casting s'était carrément mis à boire pour se motiver pour tourner les scènes avec Marilyn, tandis que Laurence Olivier "pris 15 ans" tellement le tournage fut douloureux pour lui. Marilyn Monroe, de son côté, ne pardonnait pas au comédien shakespearien de lui avoir dit "essayez donc de jouer et soyez sexy !" Ambiance...

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