Le réalisateur Pascal Rabaté est enfin de retour derrière la caméra, 8 longues après son dernier film, Du Goudron et des plumes.
Avec Les Sans-dents, titre inspiré par une tristement célèbre formule de François Hollande, le cinéaste nous présente un clan qui vit à rebours de la civilisation, dans l'inframonde d'une décharge.
Cette mini-tribu recycle en toute illégalité notre rebut pour s'aménager de manière étonnante un hameau de bric et de broc. La vie pourrait ainsi couler si une équipe policière ne se mettait sur leurs traces.
Décrite comme une comédie entre Mad Max et le cinéma de Jacques Tati, Les Sans-dents est un film muet mais très sonore !
Avec ce film, le metteur en scène avait envie de parler de ces populations auxquelles on prête peu attention ("les invisibles, comme on les appelle !").
"Les migrants, les gens du quart-monde, toutes ces personnes qu’on laisse au bord de la route, qu’on juge, qu’on condamne et qu’on prend surtout bien garde de ranger sous le tapis. En tant que citoyen, je me suis toujours intéressé à eux", a-t-il confié dans le dossier de presse du film.
UN PARTI PRIS AUDACIEUX
Avec Les Sans-dents, Pascal Rabaté a opté pour un parti pris très radical : pas de dialogues intelligibles, pas de musique et des plans souvent très crus. Selon le cinéaste, ce projet ne pouvait exister que s’il était radical.
"Donc, en effet, pas de musique, pas de mots – les seuls qui sont prononcés dans le film par le personnage de François Morel sont incompréhensibles, à la fois pour la tribu mais aussi pour le spectateur – et pas de typo non plus – l’équipe a passé son temps à enlever de l’écran les marques de voiture, les plaques d’immatriculation, les panneaux indicateurs, tout ce qui possédait des lettres", précise le réalisateur.
Les acteurs, de Gustave Kervern à Yolande Moreau en passant par François Morel ou David Salles, s'exprimaient par des gestes, des pantomimes et des corps qu’on devait entendre et ressentir.
"C’est mon côté primaire, premier degré. Et puis, étant une catastrophe en langues vivantes, mon rapport aux autres, en voyage ou simplement en hébergeant des étrangers chez moi, est toujours passé par le dessin ; c’est une autre façon de communiquer", estime le cinéaste.
À noter que le film s’est longtemps appelé "Les Sans Voix". Mais cette expression étant, selon Pascal Rabaté, à la fois très utilisée et à la connotation trop dramatique, il a finalement opté pour Les Sans-dents.
"Pendant le tournage, j’ai balancé Les Sans-dents et tout le monde, sur le plateau, s’est mis à rigoler. Dans un certain sens, on renouait un peu avec le titre Affreux, sales et méchants, d’Ettore Scola. Le message du film ne passe pas en second plan mais il y a un filtre comique", précise-t-il.