Diffusé ce soir sur C8, Quo vadis est un classique absolu et indéboulonnable du péplum hollywoodien. Sorti en 1953 et signé par Mervyn Leroy, le film est porté par un très solide casting, au milieu duquel émergent un excellent Robert Taylor dans le rôle titre, et Deborah Kerr, l'esclave chrétienne dont Taylor s'éprend. Et surtout un Peter Ustinov absolument génial et impérial - c'est le cas de le dire -, sous les traits du cruel empereur romain Néron, amateur de poèmes et de chants composés à l'aide de sa lyre, déclamant ses "vers médiocres" comme le rappelle cruellement son conseiller Suétone dans le film, devant le spectacle hallucinant de la ville de Rome dévorée par les flammes...
Pour mémoire, Quo Vadis, c'est ça...
Le titre de ce péplum racontant la persécution des premiers chrétiens est en fait tiré de la phrase "Quo Vadis Domine" ("Où vas-tu, Seigneur ?") prononcée par l'apôtre Pierre lorsque Jésus lui apparaît sur la Via Appia, à la sortie de Rome, dans le livre des Actes.
En entendant le Messie lui répondre qu'il retourne vers Rome pour y être crucifié une seconde fois, Pierre comprend son erreur d'avoir abandonné les chrétiens à leurs sorts. Il s'y rend alors à sa place, et finira selon les récits crucifié la tête en bas, par humilité, s'estimant "indigne de mourir comme le Christ".
Au IXe siècle, une chapelle sera érigée sur le lieu supposé de cette rencontre entre Pierre et Jésus ; puis une église, baptisée Santa Maria in Palmis, ou église Domine Quo Vadis, sera construite par-desus, au XVIIe siècle.
L'église abrite une plaque de marbre blanc qui est une copie de celle de la basilique Saint-Sébastien-hors-les-Murs voisine, présentant l'empreinte de deux pieds que la tradition populaire associe à ceux du Christ lors de son apparition à Pierre, et que le pape Innocent III (1160-1216) avait décrétée comme vraie.
Des racines latines... Et polonaises
Si l'on parle de cette célèbre locution latine et de cette église, c'est qu'il y a aussi un point commun évidemment avec le film, au-delà de son titre. Car Quo Vadis est avant tout une adaptation (la 4e en fait, la première remontant à 1901 !) d'une oeuvre écrite par un auteur polonais, Henryk Sienkiewicz, futur Prix Nobel de littérature en 1905.
Publié d'abord sous la forme de feuilleton à partir de mars 1895, puis sous la forme de roman en 1896, le livre connaîtra un immense succès international. En France, il ne sera publié qu'en 1900, sous le titre Quo vadis : roman des temps néroniens.
Ce qui est intéressant, c'est qu'à travers cette histoire des amours contrariées d'un patricien, Marcus Vinicius (Robert Taylor dans le film), et d'une jeune fille chrétienne, Callina, surnommée Lygie (Deborah Kerr), sur fond des persécutions chrétiennes sous Néron, l'auteur transpose en réalité l'oppression russe sur la Pologne alors divisée à la fin du XIXe siècle, tandis que le Tsar est représenté par Néron. La famille de l'écrivain oeuvra d'ailleurs activement pour l'indépendance de la Pologne.
Henryk Sienkiewicz voyagea beaucoup, et notamment en Italie. C'est là qu'il rencontra des résistants polonais à Rome, dans la fameuse église sur la Via Appia, l'église Domine Quo Vadis...