DE QUOI ÇA PARLE ?
Le rapport de force entre l'homme et l'animal a changé. Dans une campagne reculée, toute rencontre avec le dominant peut devenir hostile.
Les Animaux anonymes réalisé par Baptiste Rouveure, avec Thierry Marcos, Aurélien Chilarski, Emilien Lavaut...
INVERSER LES RÔLES
OVNI en vue. Après être passé par le documentaire et le court métrage, le Français Baptiste Rouveure met en scène son premier film, Les Animaux anonymes. Derrière ce titre énigmatique se cache une idée aussi étrange que captivante. Elle est simple : et si les animaux s'emparaient du pouvoir des hommes ? Il suffit d'imaginer un cerf chasseur, carabine à la main, ou un cheval employé dans un abattoir. Plus de soixante-quinze ans après le classique de George Orwell, La Ferme des animaux, le réalisateur fantasme un monde dans lequel les êtres humains sont réduits à du bétail. Il offre un regard sombre et plus actuel sur la souffrance animale, sujet brûlant et au cœur de la société contemporaine.
Fascinant, Les Animaux anonymes l'est encore plus sur le plan cinématographique. Objet inhabituel d'une heure à peine, le film est à la limite de l'œuvre expérimentale. Il n'y a aucune ligne de dialogue et peu de repères temporels ou géographiques, comme pour mieux appuyer son message universel. L'action, qui se situe dans une campagne déserte et brumeuse, suit deux intrigues de manière parallèle : l'arrivée d'un groupe de personnes dans un abattoir et le destin d'un homme, attaché à une chaîne, recueilli sur le bord de la route. La suite des événements est, hélas, bien trop familière.
Une œuvre engagée
Le film réussit à retranscrire avec précision les sentiments de crainte et de vulnérabilité ressentis par les animaux lorsqu'ils sont pris au piège. C'est sur cet axe que se développe toute l'horreur des Animaux anonymes. La peur grandit à mesure que les personnages thérianthropes (mi-humains, mi-animaux, NDLR) deviennent menaçants. Un tel sujet dystopique n'empêche pas Baptiste Rouveure d'opter pour le réalisme des situations, permettant au film d'être encore plus immersif.
Difficile de catégoriser un tel projet tant le fond et la forme bouleversent certains codes de la fiction. Il y a dans cette proposition une véritable volonté artistique et un engagement assumé pour la cause animale. Les spectateurs préoccupés par cette thématique seront sensibles à la puissance du film. Pour les autres, Les Animaux anonymes devrait, sans en douter, inciter au débat. C'est toute la force du cinéma.