LE JAZZ
Pete Docter (réalisateur) : C’est une bonne chose de démarquer le jazz du reste de la musique, parce que c'est quelque chose de beaucoup plus improvisé. Un de nos consultants a surnommé le jazz "la musique d’improvisation noire", car on part d’un thème pour en faire quelque chose de personnel mais également de mélodieux. Et c’est exactement ce que nous avons voulu faire avec ce film ! D’un point de vue thématique, le jazz a donc été en parfaite adéquation avec le message que nous voulions faire passer, et c’est en plus de la bonne musique, agréable à écouter et qui fait parfaitement corps avec de l’animation, donc c’était le choix parfait pour nous !
« LE GRAND AVANT »
Dana Murray (productrice) : Très en amont dans la préparation du film, nous sommes allés à la rencontre de personnalités religieuses et spirituelles pour parler de leur vision des âmes, leur signification, leur provenance... Dans la plupart de ces échanges, nous avons évoqué ce qu’il y a après la mort, mais très rarement de ce qui précède la naissance. A partir de ces rencontres, nous avons commencé à imaginer ce monde totalement inconnu et amusant, et c’est pour cette raison que nous n’avons pas cherché à explorer l’au-delà mais de nous concentrer essentiellement sur "le grand avant".
LA DIVERSITÉ A L’ÉCRAN
Kemp Powers (coréalisateur) : C’est un problème qui a été largement abordé au cours des dernières années. A l’évidence, c’est un film important pour bon nombre de spectateurs, puisqu’il s’agit du tout premier Pixar à mettre en avant un protagoniste afro-américain. Quand la décision a été prise de faire du personnage un joueur de jazz, un genre musical qui occupe une place importante dans la culture afro-américaine, il a paru comme naturel de mettre en scène un homme noir. J’ai rejoint le projet quelques années après son développement, et il avait déjà été acté qu’il s’agirait d’un film se déroulant à New York, la ville dont je suis originaire, que le protagoniste serait un homme d’âge moyen, comme moi, et donc la première mission que je me suis fixée a été d’ajouter suffisamment d'épaisseur à ce personnage pour que tous les hommes noirs originaires de New York puissent se reconnaître en lui.
Historiquement, l’animation a toujours été une industrie touchée par le manque de diversité, mais fort heureusement les choses ont commencé à changer ; mais il faut bien comprendre que dans le monde de l’animation les choses prennent plus de temps qu'ailleurs, un film demande généralement quatre à sept ans de préparation, et le constat est le même pour les changements mis en place au sein de l’industrie. Quand Pete et ses associés ont fait Toy Story il y a vingt ans, les écoles d’art étaient principalement fréquentées par des hommes blancs. Mais désormais, on croise dans ces même écoles des femmes, des hommes aux origines différentes, et ce sont ces personnes qui intègrent aujourd’hui le monde de l’animation. Donc je pense que nous verrons de plus en plus de diversité, non pas simplement à l'écran, mais également au sein des équipes qui les conçoivent.
LA VRAIE RECETTE DU BONHEUR
Pete Docter : C’est un point essentiel du film. Je ne sais pas si cela s’applique à la France, mais aux États-Unis nous mettons sur un piédestal ces gens qui ont accompli de grandes choses. Cependant, cela renvoie le message que si l’on n’accomplit pas quelque chose de similaire, alors nous ne valons rien. Le thème central du film est donc de dire que ce n’est pas vrai. Pour apprécier la vie, il faut juste la saisir sur l’instant présent, et il n’est pas nécessaire d’accomplir quoi que ce soit, de gagner des prix ou de devenir riche et célèbre. Il ne tient qu’à chacun de vivre sa vie comme il l’entend.
LE STREAMING
Dana Murray : Nous sommes à vrai dire reconnaissants que le film puisse sortir, car nous l’avons terminé en juin et depuis nous étions dans l'attente de savoir ce qui allait se passer. C’est donc un vrai soulagement de pouvoir enfin en discuter et d'avoir une date de sortie. Nous n’allons pas mentir, le film a été conçu pour le cinéma, nous voulions que le public puisse le découvrir sur un grand écran, et nous nous réjouissions de venir le présenter au festival de Cannes. Mais nous sommes vraiment heureux qu’il y ait la possibilité pour les spectateurs de le découvrir chez eux, loin de tous ces risques pour leur santé. Les fêtes de fin d’année sont l’occasion pour beaucoup de familles de se réunir, donc nous sommes heureux que le film sorte à cette période.
Kemp Powers : Oui, nous avons beaucoup parlé de films comme La vie est belle et A Christmas Carol alors que nous travaillions sur Soul, et que nous pensions le sortir au mois de juin. Lorsque la date de sortie a été modifiée, il nous a paru ironiquement plus naturel encore de le dévoiler pour les fêtes de fin d’année.
La bande-annonce de Soul, à découvrir dès aujourd'hui en exclusivité sur Disney Plus :