Le 28 décembre 1895, George Méliès a un choc, une révélation. Il vient de découvrir en effet, médusé, les images photographiques animées lors de la première représentation publique à Paris du Cinématographe par les frères Lumière. Il est, comme les autres spectateurs, ébloui par L’Arrivée d’un train en gare de LaCiotat, Bébé mange sa soupe, L’Arroseur arrosé... Ces petits courts pionniers du cinématographes.
Méliès propose alors à Antoine Lumière, le père des inventeurs, d'acheter 10.000 francs la machine de projection, mais ce dernier refuse. Il décide alors de créer lui-même son appareil. Mécanicien accompli, la tâche ne lui fait pas peur. Il se tourne alors vers un ami londonien, le premier réalisateur britannique, Robert W. Paul, qui lui fournit un mécanisme intermittent avec lequel il tourne son premier film en 1896, Une partie de cartes, réplique du même sujet réalisé par Louis Lumière.
Cette même année, il se trouve sur la place de l'Opéra Garnier, à Paris. Alors qu'il commence à faire ses prises de vue, la manivelle de son appareil se bloque. Une minute s'écoule avant que ne soit relancée la pellicule, et un lap de temps durant lequel les badauds et les véhicules ont naturellement changé de place. Un peu plus tard, en projetant la bande ressoudée au point où s’était produite la rupture, il voit l’omnibus Madeleine - Bastille soudain changé en corbillard, et des hommes changés en femmes. Le trucage dit "par arrêt de caméra" est né; trucage que Méliès mettra largement à profit dans ses petits films suivants, entre disparition de personnages, dédoublements ou multiplication, ou encore carrément des têtes coupées (L'homme à la tête en caoutchouc en 1901).
Encore que... La paternité de cette découverte du trucage est contestée. Car le même effet aurait été obtenu un an plus tôt par une équipe d'un autre inventeur, Thomas Edison, pour décapiter une reine dans L'Exécution de Mary, reine des Écossais.
Ci-dessous, un exemple d'utilisation du trucage "par arrêt de caméra", dans l'un de ses fameux petits films, Escamotage d'une dame chez Robert-Houdin, réalisé en 1896...