AlloCiné : La maladie d’Alzheimer peut se manifester différemment chez chaque individu. Aviez-vous des recommandations du réalisateur concernant cet aspect de votre personnage ?
Caroline Silhol : Martin Rosete ne voulait pas faire un exposé clinique de la maladie d’Alzheimer ni établir le type démence dont était atteinte Lily (il existe déjà pléthore de films sur ce sujet). Nous étions convenus que l’évolution de mon regard devait raconter l’histoire : des yeux désespérément vides de la première scène jusqu’au regard douloureusement conscient de la séparation dans la dernière scène en passant par le réveil de la mémoire déclenché par le souvenir et la pratique de son art (le théâtre) et surtout par la force de l’amour de Claude. Je crois d’ailleurs que ce serait deux pistes intéressantes pour lutter contre ce fléau : l’éducation artistique intense à l’école car les artistes, je l’ai constaté, semblent plus protégés que les autres et bien sûr le grand amour mais ça, ce n’est pas du ressort de l’état…
Vous êtes-vous préparée et si oui, de quelle façon, à jouer une personne atteinte de la maladie d’Alzheimer ?
Il y a quelques années j’ai joué au théâtre un personnage de scientifique atteinte de démence dans une très belle pièce américaine La Maison d’à côté. J’avais à l’époque beaucoup travaillé sur le comportement de ces personnes et comme je ne suis pas (encore) alzheimerisée, il m’en restait beaucoup de souvenirs.
Sur un aspect plus physique, avez-vous adapté votre façon de vous mouvoir ou de réagir ?
J’ai essayé d’incarner ma Lilly par un jeu de présence-absence et de flottement physique y compris dans ma manière de marcher jusqu’au moment où je retrouve concrètement le plancher des vaches, en l’occurrence des planches de théâtre. Mais je n’aime pas donner d’explications intellectuelles après avoir interprété un personnage ni dévoiler sa fabrication faite d’instinct acquis par des années d’expérience agrémenté… d’un zeste de réflexion.