Peu connu chez nous, Toru Muranishi est pourtant une grande figure du porno au Japon. Ancien vendeur d'encyclopédies, il rejoint les récents studios Crystal-Eizou en 1984 et se lance dans la réalisation de films pour adultes. C'est lui qui révèle la star Kaoru Kuroki dès 1986 et bouscule les codes de l'industrie pornographique de l'époque avec des vidéos qui sortent de l'ordinaire : la série satirique culinaire "Fuck Lunch", la série "Face Shower" qui terminait sur des éjaculations faciales et la série "Conch Shell" où l'actrice soufflait dans un sifflet en forme de coquillage pour signifier qu'elle avait atteint l'orgasme.
Bien qu'originales, ces vidéos lui ont valu des ennuis avec la justice sous l'ère Shōwa, particulièrement nationaliste et répressive. Son respect pour ses actrices, qu'il laissait libres dans leur sexualité, ne l'a pas empêché d'embaucher des femmes mineures, ce qui lui vaudra plusieurs arrestations. En 1986, Toru Muranishi entame un marathon de tournage à Hawaï avec une quinzaine d'actrices lors duquel il réalise 30 films en 30 jours. Celui qu'on a surnommé l'"Empereur du porno" fût alors arrêté et incarcéré pour usage de faux passeports. Il sera libéré l'année d'après.
UNE FORTE EMPREINTE DANS L'INDUSTRIE
En 1988, Toru Muranishi quitte Crystal-Eizou pour fonder sa propre compagnie : Diamond Visual. Avec cette nouvelle société de production, le réalisateur peut laisser libre cours à sa créativité et repousser les limites de l'industrie pornographique de l'époque. Autour de lui gravitent sa star Kaoru Kuroki et une nouvelle en devenir à la plastique particulière, Kimiko Matsuzaka, qui apporteront énormément de succès à Diamond Visual. Le style excentrique et quasi documentaire de Toru Muranishi fait de lui l'une des grandes figures de la pornographie japonaise, avec 3000 vidéos produites et 7000 actrices embauchées, selon ses dires.
Malgré sa popularité et son investissement, en tant que producteur, directeur, caméraman et acteur, Toru Muranishi s'est retrouvé criblé de dettes et sa boîte a fait deux fois faillites. Il s'est depuis reconverti dans l'écriture d'articles sur son blog et vend ses films culte sur son propre site. Selon Japan Times, le cinéaste X était enchanté à l'idée d'être le sujet d'une série Netflix et a laissé les scénaristes s'amuser avec la réalité des événements "tant que cela restait intéressant."
UNE VERSION POP ET DÉCALÉE DE L'HISTOIRE EN SÉRIE
The Naked Director s'intéresse à l'éclosion de ce génie du porno controversé. La série Netflix met en scène la vie de Toru Muranishi de manière plus édulcorée et décalée. En huit épisodes, le futur "Empereur du porno" incarné par Takayuki Yamada (L'Île aux chiens), passe vite d'ancien loser largué par sa femme à pionnier de l'industrie du porno en gravissant les échelons avec ses associés Toshi et Kawada contre les géants du milieu, de mèche avec la police et les yakuzas.
Ce personnage haut en couleur débute en premier lieu par l'impression de binibon, des magazines plastifiés pour adultes, où les sexes féminins sont recouverts à cause de la censure. On découvre ensuite comment Toru Muranishi se lance dans la production de vidéos pornographiques avec un certain avant-gardisme et beaucoup de fantaisie. Au menu : la fondation de sa compagnie, le passage à Hawaï et la naissance de la star Kaoru Kuroki. L'excentricité du roi du porno, qui souhaite casser les codes de la société moralisatrice japonaise de l'époque, est décryptée avec humour dans cette série.
La première saison de The Naked Director se termine lorsque l'ère Shōwa prend fin en 1989 : Toru Muranishi est alors au sommet de sa carrière après avoir mis ses ennemis à terre. Si la série est renouvelée pour une saison 2, elle devrait débuter à l'ère Heisei où le succès de ses vidéos non censurées incluant des actes non simulés ne fait qu'accroître. Reste à savoir si Netflix lui donnera cette chance.
La bande-annonce de The Naked Director :