Comment est née votre collaboration sur Chambers ?
Uma Thurman, interprète de Nancy : J'ai fait la rencontre de Leah, et on s'est entendues tout de suite. J'ai lu la première version du pilote, et je l'ai trouvé vraiment beau. J'ai trouvé qu'elle avait vraiment quelque chose de particulier à offrir, et on s'est lancées dans l'aventure.
Qu'est-ce qui vous a séduit sur ce projet ?
Uma Thurman : De manière générale, j'étais très attirée par la métaphore du coeur, et le fait qu'il y ait une forte énergie féminine; mais aussi par le drame et la tragédie vécus par la mère que j'interprète, et la relation qu'elle entretient avec cette jeune femme (Sivan Alyra Rose) qui lutte avec son identité d'une façon très intense.
Leah, d'où vous vient cette attrait pour le genre horrifique ?
Leah Rachel, créatrice et showrunneuse : Ici il s'agit plus précisément d'horreur psychologique. Mon attrait pour ce genre est particulièrement lié à l'histoire de Chambers qui traite de la perte d'un enfant, la perte d'une soeur - ce qui, à mes yeux, est déjà bien assez chargé en matière d'horreur psychologique !
Jennifer Yale, productrice exécutive et scénariste : Par rapport à l'horreur psychologique, on essayait avant tout de jouer avec la métaphore de l'adolescente, sur le fait qu'elle se sente incapable de contrôler son corps. Et dans notre série, elle est littéralement incontrôlable. Mais la série joue aussi sur les autres personnages, les parents en particulier, et sur ce qu'ils traversent : vivre la perte d'un enfant puis faire la rencontre de cette jeune fille qui possède un morceau de cet enfant en elle, et commencer à percevoir des aspects de sa personnalité à travers elle. Ce traumatisme psychologique joue sur Nancy et l'amène à se demander "est-ce que je deviens folle, ou est-ce que tout est vrai ?" C'est vraiment de cette manière que nous voulions jouer avec l'horreur, à travers la psychologie des personnages.
Etait-ce facile d'interpréter une femme endeuillée par la perte de son enfant ?
Uma Thurman : Non,bien au contraire. Puisqu'on parle d'horreur centrée sur les personnages, il n'y a pas de terreur plus grande que l'idée de perdre un enfant. J'ai moi-même trois enfants en bonne santé (elle tape du pied sur le sol par supersition), donc c'était très puissant pour moi d'interpréter ce personnage.
Nancy est aussi très ambivalente, elle apparaît parfois menaçante, on ne connaît pas vraiment ses intentions envers l'héroïne, Sasha...
Uma Thurman : C'est une femme complètement tourmentée par le chagrin, qui éprouve aussi la sensation d'être hantée. C'est une femme au foyer qui ne se sent exister qu'à travers son rôle de mère, alors qu'en réalité elle ne sait pas vraiment ce qui se passe dans la vie de ses enfants. Je pense qu'il y a un vrai tourment chez ce personnage, elle est véritablement hantée.
C'est une femme au foyer qui ne se sent exister qu'à travers son rôle de mère, alors qu'en réalité elle ne sait pas vraiment ce qui se passe dans la vie de ses enfants.
Etes-vous vous même amatrice de récits horrifiques ?
Uma Thurman : Je suis plutôt fan de drama, de comédies musicales à la "Song and Dance"... (rires) Je ne suis pas très amatrice de jumpscares, contrairement à Leah et Jennifer ! L'horreur n'était pas un problème pour moi, c'était plutôt le leur. Elles étaient en charge de la partie horrifique, et moi me concentrer sur mon rôle, donner un coup de main à tout le monde, soutenir les acteurs et être présente pour les membres de l'équipe, comme j'ai appris à le faire au cours des nombreuses années de pratique de mon métier.
Avez-vous trouvé la série effrayante ?
Uma Thurman : J'ai toujours peur ! A la moindre musique inquiétante, je cours me cacher sous une table ! (rires)
Avec la prolifération des supports de diffusion, les séries TV sont-elles un nouvel espace de liberté pour la création artistique, selon vous ?
Uma Thurman : Je suis très enthousiasmée par la télévision, mais j'adore le cinéma, ne vous méprenez pas... Je suis ravie de la liberté et de l'espace d'expression que la télévision incarne actuellement. C'est une forme d'art très démocratique, à la portée de tous... Mais je suis désespérément attachée au cinéma avant toute chose ! J'ai bâti ma carrière là-dessus, et le réalisateur a toujours primé sur le rôle. Chambers est un peu mon baptême du feu sur ce nouveau média; Jennifer Yale a beaucoup plus d'expérience en télévision que Leah et moi. On ne savait vraiment pas ce qu'on faisait et on a dû se débrouiller ! (rires)
Leah Rachel : On a eu beaucoup de chance d'avoir Uma sur la série. Son expertise, ses connaissances... On avait des comédiens plutôt inexpérimentés, et ils se sont vraiment améliorés sur le tournage car Uma arrivait préparée tous les jours, c'était la première sur le plateau le matin - je ne sais pas si j'ai le droit de dire ça ! - mais je lui en suis vraiment reconnaissante, nous étions vraiment très chanceux de l'avoir.
Uma Thurman : Merci. Mais quand on tourne avec des jeunes, la première chose à faire lorsqu'on vous convoque sur le plateau c'est de vous y rendre le plus tôt possible pour y être avant eux. Ca les fait paniquer. (rires) Vous savez, c'est juste un minimum de rigueur professionnelle et de discipline, et c'est un privilège de pouvoir faire un travail qui implique de raconter des histoires, de quelque manière que ce soit. C'est vraiment un de mes plus grands privilèges que de pouvoir mener une vie créative. Et je pense que ça imprègne les équipes que l'on côtoie avec du professionalisme et de la passion.
Quand on tourne avec des jeunes, la première chose à faire lorsqu'on vous convoque sur le plateau c'est de vous y rendre le plus tôt possible pour y être avant eux. Ça les fait paniquer !
Pensez-vous que les oeuvres pensées pour les plateformes méritent la même reconnaissance artistique que celles pensées pour le cinéma et la télévision traditionnelle ?
Uma Thurman : Je pense que les technologies évoluent si vite que la question ne posera bientôt plus. Un ticket de cinéma coûte cher, et même si j'aimerais que le public continue d'aller au cinéma, je voudrais qu'il puisse accéder aux films sur le support de leur choix. Dire le contraire serait du snobisme. Mais j'aime le cinéma, et je pense les gens doivent continuer à partager des histoires ensemble, et le faire par tous les moyens possibles.
Leah Rachel : Uma a raison sur le fait que l'art sous toutes ses formes devient plus accessible aux gens. La façon de raconter les histoires change, et elles sont désormais racontées selon différents points de vue qu'il est important d'entendre et de digérer. Le sens du mot "cinéma" peut être amené à évoluer, mais l'art restera toujours de l'art !
Découvrez la bande-annonce de Chambers, disponible sur Netflix :