De quoi ça parle ?
Vicki Ellis, impitoyable coach de concours de beauté de l'Etat d'Oklahoma, n'entraîne que des gagnantes. Mais lorsque sa pouliche, grande favorite pour le concours national, explose ses chances en plein vol, Vicki accepte de coacher sa dauphine, la très jolie mais peu raffinée Samantha. Toute la réputation de Vicki va alors être mise en péril...
À quoi ça ressemble ?
C'est avec qui ?
La série est créée et produite par Meaghan Oppenheimer, assistée de Paul Lee, ex-patron de la chaîne ABC, et Bruna Papandrea, également productrice de Big Little Lies. Intégralement réalisés par Alethea Jones, les dix épisodes de la série mettent en scène Catherine Zeta-Jones dans le rôle de l'intransigeante Vicki Ellis, Jennifer Westfeldt (Samantha Cole), Victoria Justice et Judith Light dans le rôle de Regina, l'ancienne mentor de Vicki.
Ça vaut le coup d'oeil ?
Voici l'un des nombreux commentaires que l'on peut lire sur la page Facebook de Queen America :"Wow, this is my dream of free global television come true! Watching from SPAIN!! I hate it when we have to wait for months or years to receive the new shows here or can only resort to buy dvds. THANK YOU FOR THIS!" ("Mon rêve de télévision mondiale et gratuite se réalise enfin ! Je regarde depuis l'ESPAGNE! Je déteste devoir attendre plusieurs mois, voire des années, avant de recevoir les nouvelles séries dans mon pays, ou de devoir les acheter en DVD. MERCI POUR CA !")
Tel était en effet le pari du géant des réseaux sociaux : concurrencer Youtube, Amazon, Hulu et consorts en proposant lui aussi une plateforme de contenus exclusifs. Atout de taille : depuis cet été, les épisodes mis en ligne sur Facebook Watch sont 100% gratuits, disponibles partout dans le monde en simultané, et accompagné de sous-titres locaux. Des séries de "qualité" accessibles à tous par le biais d'un simple compte Facebook, ça semblerait presque trop beau. Mais n'oublions pas qu'il s'agit avant tout d'un enjeu économique majeur pour le réseau social, avec une audience de taille à capter : près de 2 milliards d'utilisateurs actifs par mois dans le monde. Leurs premières séries diffusées mondialement auront donc peu le droit à l'erreur.
Dans la lignée des premières séries "teen" proposées par Facebook Watch aux Etats-Unis (Sorry for Your Loss, Five Points, Sacred Lies, et Skam Austin, version US de la série norvégienne Skam), Queen America est résolument calibrée pour une audience jeune. En effet, les injures y sont "bipées", pas de nudité ni de séquences trop trash, et son discours a valeur de pédagogie sur des problématiques dans l'air du temps. En trois épisodes, la série aborde ainsi des sujets tels que les troubles alimentaires, les abus sexuels et la notion de consentement, de manière presque trop didactique. Mais le rythme est si bien mené, et les dialogues saupoudrés d'un humour féroce si minutieusement dosé, qu'on se laisse facilement séduire par ce guilty pleasure. L'univers des concours de beauté américains y est dépeint avec réalisme et cruauté, toute l'artificialité du milieu se reflétant dans ses personnages. Des jeunes premières aux dents longues prêtes à tout pour réussir aux prédateurs sexuels qui rôdent autour d'elles, en passant par leurs coachs dépressifs ne pensant qu'à leur carrière, tout le monde en prend pour son grade. La série s'ancre dans la bible belt américaine pleine de contradictions, où la religion côtoie le sexe et la vulgarité et où une majorité de la population est confrontée à la précarité. Cet aspect de l'Amérique white trash s'incarne dans le personnage de Samantha Cole (la touchante Jennifer Westfeldt), jeune aspirante à la couronne de beauté qui rêve de décrocher la bourse du concours pour payer ses études universitaires. Le show brille également par sa dimension inclusive avec le personnage de Nigel (Teagle F. Bougere), meilleur ami de Vicki, personnage afro-américain homosexuel qui dévoile une part de profondeur inattendue, au-delà du simple rôle de faire-valoir.
Mais la vraie réussite de la série, la "queen" en titre, c'est incontestablement Catherine Zeta-Jones, qui signe ici son grand retour. Après une première incursion dans les séries en 2017 dans Feud aux côtés de Jessica Lange et Susan Sarandon, l'actrice britannique revient dans un rôle principal clinquant qui lui sied à merveille, après s'être faite discrète au cinéma au cours des dernières années. Impossible de ne pas s'attacher à cette mère maquerelle sans pitié des concours de beauté et à sa vie personnelle morcelée, dont elle comble le vide par de violentes crises de boulimie. On attend beaucoup de sa relation avec sa nièce Bella, une ado ronde avec les pieds sur terre, à mille lieux des jeunes filles écervelées et sous-alimentées que Vicki entraîne pour la victoire. L'actrice n'a rien perdu de sa prestance et nous réserve quelques punchlines féministes jubilatoires et bitchy à souhait. Un début de saison prometteur, et une belle réussite pour Facebook Watch. Attendons de voir si la plateforme osera s'aventurer ailleurs qu'aux Etats-Unis pour ses prochains projets...