"Elle est de retour." Si cette phrase concerne Riley North, l'héroïne de Peppermint, tous les connaisseurs d'Alias qui iront voir le film en salles ne pourront s'empêcher de penser, le sourire aux lèvres et leurs pompons de cheerleaders prêts à s'agiter, qu'elle concerne en réalité Jennifer Garner. Avec Peppermint, réalisé par Pierre Morel, alias monsieur Taken, l'actrice américaine fait en effet, et sans conteste, son grand retour au cinéma, mais surtout à l'action. Celle-là même qui l'a amenée à être célébrée dans le monde entier dans les années 2000.
Car avant d'être cantonnée au rôle d'épouse de Ben Affleck et assujettie à des comédies romantiques ou familiales où ses talents n'étaient pas toujours exploités à leur juste valeur, Jennifer Garner a été une star de l'action. Bien évidemment, l'actrice sait briller autrement et l'a très bien prouvé, autant dans le genre dramatique que dans la comédie, avec des films comme 30 ans Sinon rien, Juno, Dallas Buyers Club, Love Simon. Mais, c'est bien dans le registre de l'action qu'elle a toujours su être totalement inégalable, en arrivant justement, comme peu d'autres, à insuffler dans le même mouvement, tous ses autres talents...
La révélation
L'éclat de Jennifer Garner, c'est bel et bien J.J. Abrams qui l'a trouvé et fait étinceler en premier. Le futur réalisateur de Star Wars la fait d'abord jouer dans trois épisodes de Felicity puis, sentant chez l'actrice quelque chose d'autre, un "petit plus" inexplicable, écrit le premier rôle d'Alias, série d'espionnage mêlant action, fantastique et drame, en pensant à elle : "Il y avait quelque chose chez elle, quelque chose de vraiment spécial à mon sens. J'ai toujours pensé qu'elle avait quelque chose dans sa personnalité qui était plus drôle, plus sexy, plus intelligent et plus espiègle que tout ce qu'elle avait pu jouer jusqu'à présent. Et quand j'ai écrit le rôle de Sydney, j'ai voulu le montrer", explique-t-il en 2002 à USA Today.
L'instinct, désormais légendaire, de J.J. Abrams en matière d'héroïne ne s'est pas trompé. A l'époque, Garner, qui n'a joué que des petits rôles dans Sarah ou Pearl Harbor, n'est pas connue du grand public. Le pari est donc risqué mais l'actrice fait de suite chavirer la critique et obtient, dès la fin de la saison 1, le Golden Globe de la Meilleure Actrice dans un drama. Et on comprend pourquoi. Impeccable dans les scènes dramatiques ou comiques, Garner impressionne aussi dans les scènes physiques.
Arts martiaux, sports de combat, maniement des armes à feu ou blanches... Pour le rôle, Garner, déjà bien sportive, s'entraîne très sérieusement. Le résultat est à la hauteur de l'investissement puisque, dans toutes les scènes d'action, l'actrice livre, cinq saisons durant, une prestation impressionnante et transforme Sydney en une redoutable et impitoyable combattante, capable de mettre au tapis n'importe quel ennemi, qu'il s'agisse d'un homme ou d'une femme. Mais, Garner ne s'arrête pas à ça. L'actrice offre un autre plus à Sydney : un incomparable style de combat, une touche personnelle totalement inimitable que l'on reconnait d'un coup d'oeil, alliant grâce, force, vitesse, flexibilité, adresse et amplitude de mouvements, certainement dus au passé de danseuse de Garner :
"J'ai commencé comme danseuse de ballet et cela demande une certaine dose de discipline et de compréhension de votre corps et de savoir comment repousser vos limites. Alors, lorsque j'ai commencé à me battre dans "Alias" et que j'ai commencé à utiliser mon corps dans ce but-là, lorsque je jouais, c'était comme si un monde entier s'ouvrait à moi. Que j'ai une aptitude et une telle passion pour ça a été une grande surprise pour moi (...) Je n'en avais jamais assez", expliquait-elle à CBR en 2003.
L'énorme bataille entre Sydney et la "fausse" Francie :
Confirmation et déceptions
Cette aptitude pour l'action ouvre par la suite, et en toute logique, les portes du cinéma à Jennifer Garner. Alors qu'elle est toujours dans Alias, elle décroche le rôle d'Elektra dans le film de super-héros Daredevil (2003). Un rôle pour lequel elle va encore plus loin en termes d'entrainement : "J'étais tellement obsédée par les combats après mes années dans Alias et tellement avide d'apprendre autant que je pouvais. Je voulais vraiment passer à un autre niveau. Et c'est ce que Daredevil m'a permis de faire", raconte-t-elle, toujours à CBR au moment de la sortie du film.
Pour Daredevil, elle s'entraîne ainsi tous les jours, durant toute la durée du tournage : "Ca a en quelque sorte construit ma confiance".
Si le rôle lui permet de s'améliorer, profitant d'ailleurs au passage à Alias, il ne fait, en revanche, pas du bien à sa carrière. Daredevil est mal reçu et le spin-off qui s'ensuit, offrant cette fois toute la lumière à Elektra (2005), ne lui permet malheureusement pas de tirer son épingle du jeu. Malgré l'excellence de Garner dans les scènes de combat, le personnage d'Elektra,peu ambitieux et mal développé dans le film, a comme été mal compris par les scénaristes. Mal écrit, le film, véritable échec au box-office, heurte sans surprise la carrière de Jennifer Garner.
Ce revers intervient à la même période où Alias, épuisant pour la star, s'achève. Alors en couple avec Ben Affleck, Garner décide de prendre du recul et s'éloigne logiquement des plateaux de tournage pour s'occuper de sa famille, après avoir bouclé les tournages de Juno et Le Royaume (2007). Le thriller de guerre de Peter Berg sera d'ailleurs le dernier film d'action où les spectateurs verront briller Jennifer Garner dans le genre, avant bien longtemps...
Jennifer Garner badass dans "Le Royaume" :
Garner, ou le cocktail magique entre férocité et sensibilité
L'actrice ne reviendra au registre de l'action que 10 ans plus tard, à l'occasion de Peppermint. Un virage qu'elle a souhaité prendre à un moment où sa vie reprenait un cours "normal", comme elle nous le confiait au moment de la sortie du film : "Quand j'ai commencé à avoir des enfants, je me suis beaucoup éloignée de l'action. C'était trop difficile pour mon corps. Et j'étais soit enceinte, soit j'allaitais ou j'étais en train de me remettre de l'un ou de l'autre (rires). Puis, soudainement, j'ai réalisé que j'étais en forme, que mes enfants étaient tous à l'école et que je pouvais donc m'entraîner pour refaire un film d'action."
Ce film, ce sera donc Peppermint. L'histoire de Riley North, mère de famille ordinaire qui, au lendemain de l'assassinat de sa fille et de son mari, quitte les écrans radars. Pour revenir se venger de ceux qui les ont tués.
Un pur vigilante movie qui permet de retrouver Garner au sommet de son art. Selon les dires de sa doublure depuis 20 ans, Shauna Duggins, l'actrice a même effectué 98% de ses scènes d'action et de cascades. Déjà bien athlétique, elle s'est beaucoup entraînée pour ce rôle très physique, pratiquant le MMA, le maniement des armes et, toujours, son adresse au couteau.
A 46 ans, comme un Statham, un Reeves, une Hamilton, une Rodriguez ou un Cruise, Garner n'a donc pas changé en terme d'exécution, de crédibilité, de précision et d'habilité. Et lorsqu'on ne l'a pas revue dans ce registre depuis 10 ans, c'est un vrai régal de retrouver le même "style Garner" et de le voir toujours aussi affûté et animal.
Car si l'actrice américaine maîtrise les scènes d'action, elle sait aussi leur offrir une autre dimension. Dans Alias, elle était ainsi capable d'enquiller sur les nombreuses et complexes figures d'action imposées par son personnage puis de passer à des moments de fragilité et d'émotion aussi touchants qu'inoubliables. Le tout sans que l'un ne fasse faillir l'autre. Garner, c'est tout bonnement un concentré de sentiments, d'humanité, d'humour et de douceur dans un corps de guerrière. Une actrice qui peut à la fois être féroce et sensible en un seul mouvement. Et c'est là qu'elle parvient à être totalement inégalable.
2018 et 2019 devrait d'ailleurs enfin le rappeler. Enfin remise sur le devant de la scène par Peppermint, l'actrice poursuivra dans cette veine avec Camping, la nouvelle comédie de HBO dont elle sera l'une des stars, aux côtés de Juliette Lewis ou David Tennant.
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